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03/04/1991 | FRANCE | N°84626

France | France, Conseil d'État, 4 /10 ssr, 03 avril 1991, 84626


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 26 janvier 1987, présentée pour la société S.M.A.C. Acieroid, dont le siège social est ... (75240), représentée par ses représentants légaux en exercice ; la société S.M.A.C. Acieroid demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 1er décembre 1986, par lequel le tribunal administratif de Toulouse l'a condamnée à payer à l'Etat la somme de 753 438 F avec intérêts au taux légal à compter du 29 octobre 1982 ;
2°) de rejeter la demande présentée par l'Etat en tant qu'elle est

dirigée contre elle ;
3°) subsidiairement de ramener à 533 539 F le coût de la...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 26 janvier 1987, présentée pour la société S.M.A.C. Acieroid, dont le siège social est ... (75240), représentée par ses représentants légaux en exercice ; la société S.M.A.C. Acieroid demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 1er décembre 1986, par lequel le tribunal administratif de Toulouse l'a condamnée à payer à l'Etat la somme de 753 438 F avec intérêts au taux légal à compter du 29 octobre 1982 ;
2°) de rejeter la demande présentée par l'Etat en tant qu'elle est dirigée contre elle ;
3°) subsidiairement de ramener à 533 539 F le coût de la réparation susceptible d'être pris en charge par la requérante, en affectant ce coût d'un coefficient de vétusté de 60 % et en fixant le point de départ des intérêts au plus tôt en juin 1985 ;
4°) de laisser à la charge de l'Etat les frais de l'expertise ordonnée en référé, à laquelle la requérante n'était pas partie ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu le code civil ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Colmou, Maître des requêtes,
- les observations de Me Odent, avocat de la société S.M.A.C. Acieroid,
- les conclusions de Mme Laroque, Commissaire du gouvernement ;

Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du second rapport de l'expert X... que la société Ferem-Ruberoïd, aux droits et obligations de laquelle se trouve la société S.M.A.C. Acieroid, titulaire du lot étanchéité du restaurant universitaire du Mirail à Toulouse, n'a muni d'un dispositif pare-vapeur qu'une faible partie de la superficie de la toiture-terrasse de cet immeuble alors que le descriptif prévoyait une protection totale ; que cette exécution incomplète, n'est justifiée par aucun avenant au marché ni même, malgré la production par la requérante d'un plan dont l'origine n'est pas établie, par un accord donné au cours d'une réunion de chantier ; que la société a néanmoins réclamé le paiement d'un ouvrage entièrement exécuté ; que cette inexécution du marché a entraîné l'imbibition de la totalité du système d'étanchéité et d'isolation thermique par condensation de la vapeur provenant notamment des cuisines ; que l'entreprise requérante, spécialiste de l'étanchéité, ne pouvait ignorer les conséquences prévisibles de cette inexécution ; que l'ensemble de son comportement a constitué une faute qui, par sa nature et sa gravité est assimilable à une fraude ou à un dol ; que, dès lors, la société S.M.A.C. Acieroid n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, pour ce motif, le tribunal administratif de Toulouse a jugé que sa responsabilité, après l'expiration du délai de la garantie décennale, restait engagée sur le fondement de la responsabilité trentenaire ;

Sur l'indemnité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que des infiltrations d'eau se sont produites dans trois des quatre salles du restaurant universitaire et que, nonobstant l'utilisation au moins partielle de ce restaurant depuis sa construction, la nature et l'ampleur des désordres ont rendu nécessaire une réfection complète de l'étanchéité ; que, compte tenu de la responsabilité incombant aux autres constructions le coût de cette réfection s'élève pour la part imputable à la société S.M.A.C. Acieroid, à 533 539 F dont il faut déduire 29 873 F au titre de la remise en état des cornières métalliques formant "goutte d'eau", qui n'incombait pas à la requérante ; que la majoration de 10 % du montant du coût des travaux de réparation pour frais de maîtrise d'oeuvre doit être ramenée à 6 %, taux retenu pour les honoraires dans les contrats conclus avec les architectes pour la construction initiale ; qu'enfin, les désordres provoqués par le défaut d'étanchéité de la toiture-terrasse sont apparus dès le mois d'octobre 1973 ; que, dès lors, et bien que l'origine de ces désordres n'ait pu être établie que postérieurement, il n'y a pas lieu de tenir compte de la vétusté de l'ouvrage ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que le montant de l'indemnité due à l'Etat par la société S.M.A.C. Acieroid doit être ramené de 753 438 F à 533 886 F ;
Sur les intérêts :
Considérant que la somme de 533 886 F due par la société S.M.A.C. Acieroid à l'Etat doit porter intérêt au taux légal à compter du 8 novembre 1983, date d'enregistrement au greffe du tribunal administratif de Toulouse, du premier mémoire de l'Etat contenant des conclusions contre la Société Ferem-Ruberoïd, nonobstant la réévaluation de l'indemnité au niveau des prix de juin 1985 dans le second rapport d'expertise ;

Sur les frais d'expertise :
Considérant que la première expertise prescrite par le tribunal administratif a été utile à la solution du litige ; que, dès lors, et alors même que la société S.M.A.C. Acieroid n'a pas participé aux opérations, elle n'est pas fondée à soutenir que les frais afférents à cette expertise ne pouvaient être mis à sa charge par le tribunal administratif ;
Article 1er : La somme que la société S.M.A.C. Acieroid a été condamnée à verser à l'Etat est ramenée de 753 438 F à 533 886 F. Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 8 novembre 1983.
Article 2 : Le jugement attaqué du tribunal administratif de Toulouse en date du 1er décembre 1986 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société S.M.A.C. Acieroid est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société S.M.A.C. Acieroid, et au ministre d'Etat, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.


Synthèse
Formation : 4 /10 ssr
Numéro d'arrêt : 84626
Date de la décision : 03/04/1991
Sens de l'arrêt : Réformation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-05,RJ1 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE, L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE TRENTENAIRE -Entrepreneur - Faute assimilable à une fraude ou à un dol (1).

39-06-01-05 Entrepreneur titulaire du lot d'étanchéité d'un restaurant universitaire et n'ayant muni d'un dispositif pare-vapeur qu'une faible surface de la superficie totale de la toiture-terrasse alors que le descriptif prévoyait une protection totale et qu'aucun avenant au marché ne prévoyait cette inexécution incomplète. En dépit de la production d'un plan dont l'origine n'est pas établie, aucun accord en ce sens n'a été donné au cours d'une réunion de chantier. L'entrepreneur, spécialiste de l'étanchéité, ne pouvait ignorer les conséquences prévisibles de cette inexécution. La société a néanmoins réclamé le paiement d'un ouvrage entièrement exécuté. L'ensemble de son comportement a constitué une faute qui, par sa nature et sa gravité, est assimilable à une fraude ou à un dol. Dès lors sa responsabilité est restée engagée, après l'expiration du délai de la garantie décennale, sur le fondement de la responsabilité trentenaire.


Références :

1.

Cf. Section 1974-05-24, Société Paul Millet et Cie, p. 310


Publications
Proposition de citation : CE, 03 avr. 1991, n° 84626
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Coudurier
Rapporteur ?: Mme Colmou
Rapporteur public ?: Mme Laroque
Avocat(s) : Me Odent, Avocat

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1991:84626.19910403
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