Vu 1°) sous le n° 127 092, le recours du ministre de la jeunesse et des sports enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 26 juin 1991 ; le ministre de la jeunesse et des sports demande que le Conseil d'Etat :
- annule pour excès de pouvoir la décision en date du 24 mai 1991 par laquelle le conseil d'administration de la Ligue nationale de football a fait application de l'article 9 de son règlement administratif à l'Association nouvelle des Girondins de Bordeaux football club,
- décide qu'il soit sursis à l'exécution de cette décision ;
Vu l'acte, enregistré le 9 juillet 1991, par lequel le ministre de la jeunesse et des sports déclare se désister de son recours ;
Vu 2°) sous le n° 127 402, la requête enregistrée le 5 juillet 1991, présentée pour l'association nouvelle des Girondins de Bordeaux Football Club ; l'association demande l'annulation de la décision en date du 5 juillet 1991, par laquelle le conseil d'administration de la Ligue nationale de football a retiré sa décision du 24 mai 1991 et prononcé à nouveau sa rétrogradation en deuxième division ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi du 16 juillet 1984 ;
Vu le règlement administratif de la Ligue nationale de football ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Schneider, Maître des requêtes,
- les observations de la S.C.P. Piwnica, Molinié, avocat de l'association nouvelle des Girondins de Bordeaux Football Club, et de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la Ligue nationale de football et de la Fédération française de football,
- les conclusions de M. Pochard, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que le recours du ministre de la jeunesse et des sports et la requête de l'association nouvelle des Girondins de Bordeaux Football Club sont relatifs à la situation d'un même club ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'ils fassent l'objet d'une seule décision ;
En ce qui concerne le recours n° 127 092 du ministre de la jeunesse et des sports dirigé contre la décision du 24 mai 1991 du conseil d'administration de la Ligue nationale de football :
Considérant, d'une part, que le désistement du ministre de la jeunesse et des sports est pur et simple ; que rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte ;
Considérant, d'autre part, que l'instance ayant pris fin par suite de ce désistement, dont il est donné acte par la présente décision, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de l'intervention de MM. X... et Y... et du mémoire présenté le 2 juillet 1991 par l'association nouvelle des Girondins de Bordeaux Football Club, lequel, tendant à ce qu'il soit fait droit aux conclusions du recours du ministre de la jeunesse et des sports, constitue une intervention à l'appui de ce recours ;
En ce qui concerne la requête n° 127 402 de l'association nouvelle des Girondins de Bordeaux Football Club dirigée contre la décision du 5 juillet 1991 du conseil d'administration de la Ligue nationale de football :
Sur l'intervention de MM. X... et Y... :
Considérant que MM. X... et Y..., en leur qualité de commissaires à l'exécution du plan de redressement, ont intérêt à l'annulation de la décision attaquée ; qu'ainsi leur intervention est recevable ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir présentée par la Fédération française de football et la Ligue nationale de football :
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la modification de la rédaction de l'article 9 du règlement administratif de la Ligue nationale de football en vue de rendre automatique, en cas de dépôt de bilan, la rétrogradation des clubs dans la division inférieure a été adoptée par l'assemblée générale de la Ligue de football le 17 mars 1990 ; que les allégations de l'association requérante relatives à la régularité de la procédure à l'issue de laquelle cette délibération est intervenue ne sont assorties d'aucun élément permettant d'en apprécier le bien-fondé ; qu'ainsi l'association nouvelle des Girondins de Bordeaux FOOTBALL CLUB n'est pas fondée à soutenir que ledit article n'aurait, dans la rédaction dont il a été fait application en l'espèce, pas été régulièrement adopté ;
Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la nouvelle rédaction de l'article 9 du règlement administratif de la Ligue nationale de football, aux termes duquel, en cas de dépôt de bilan, "il sera procédé à la relégation sportive du club dans la division inférieure," a été publiée dans le numéro du 25 mai 1991 de "Foot", organe officiel de la Fédération française de football ; qu'eu égard à l'objet de la disposition précitée, à la nature et aux conditions de diffusion du journal "Foot", cette publication a présenté un caractère suffisant pour la rendre opposable ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la décision du 5 juillet 1991 par laquelle le conseil d'administration de la Ligue nationale de football a, sur le fondement dudit article 9, prononcé la rétrogradation du club "Girondins de Bordeaux Football Club" serait dépourvue de base légale doit être écarté ;
Considérant, en troisième lieu, que, d'une part, l'article 9 du règlement administratif a pu légalement, dès lors qu'il ne modifiait pas les règles régissant le déroulement des épreuves, être appliqué aux clubs ayant participé au championnat 1990-1991, alors même qu'il n'avait pas été régulièrement publié avant le début de ce championnat ; que, d'autre part, la circonstance que, pour prononcer, en application de l'article 9 précité, la rétrogradation en deuxième division du club "Girondins de Bordeaux Football Club" pour la saison 1991-1992, le conseil d'administration de la Ligue nationale de football s'est fondé sur l'admission au bénéfice du redressement judiciaire de l'association "Girondins de Bordeaux Football Club", prononcée par jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux en date du 22 février 1991, soit antérieurement à la publication dudit article 9, ne saurait, eu égard à la nature de la décision de rétrogradation, laquelle ne constitue pas une sanction, entacher la décision attaquée de rétroactivité ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article 9 susmentionné que les clubs professionnels participant au championnat de France de football doivent être rétrogradés dans la division inférieure en cas d'admission au bénéfice du redressement judiciaire des personnes morales qui constituent leur support, quels que soient les changements susceptibles d'affecter ultérieurement ces dernières ; qu'ainsi l'association nouvelle des Girondins de Bordeaux Football Club, qui a été autorisée par jugement du 19 avril 1991 du tribunal de grande instance de Bordeaux à reprendre le club "Girondins de Bordeaux Football Club" et que le conseil d'administration de la Ligue nationale de football a autorisée, par décision du 13 avril 1991, à conserver le numéro d'affiliation à la Fédération française de football qui était celui du club avant sa cession, n'est pas fondée à soutenir que, faute qu'elle ait été elle-même admise au bénéfice du redressement judiciaire, la rétrogradation de ce club dans la division inférieure serait entachée d'erreur de droit ;
Considérant, en cinquième lieu, que si l'article 9 susmentionné dispose que la rétrogradation du club dans la division inférieure est prononcée en cas de "dépôt de bilan", l'emploi de ce terme n'a ni pour objet ni pour effet de limiter l'application de la disposition susrappelée de l'article 9 à l'hypothèse où la procédure de redressement judiciaire est ouverte sur demande du débiteur ; qu'ainsi l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que la circonstance que l'Association "Girondins de Bordeaux football club" a été admise au bénéfice du redressement judiciaire sur saisine d'office du tribunal compétent entacherait la décision attaquée d'erreur de droit ;
Considérant, en sixième lieu, que la décision susmentionnée, en date du 13 avril 1991, par laquelle le conseil d'administration de la Ligue nationale de football a donné son accord à la cession du numéro d'affiliation du club "Girondins de Bordeaux Football Club" à l'association nouvelle des Girondins de Bordeaux Football Club n'a eu ni pour objet ni pour effet d'autoriser le maintien du club en première division ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que la décision du 13 avril 1991 aurait créé au profit de l'association requérante un droit acquis au maintien du club en première division et que la décision attaquée méconnaîtrait illégalement ce droit ne saurait être accueilli ;
Considérant, enfin, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 9 du règlement administratif de la ligue que cette dernière est, en cas de redressement judiciaire, légalement tenue de prononcer la rétrogradation du club concerné dans la division inférieure ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que la décision attaquée, qui au surplus ne présente pas le caractère d'une sanction, aurait été prise en violation des droits de la défense est inopérant ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de l'association nouvelle des Girondins de Bordeaux Football Club doit être rejetée ;
Article 1er : Il est donné acte du désistement du recours n° 127 092 du ministre de la jeunesse et des sports.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les interventions présentées par MM. X... et Y... et par l'association nouvelle des Girondins de Bordeaux Football Club à l'appui dudit recours du ministre de la jeunesse et des sports.
Article 3 : L'intervention présentée par MM. X... et Y... à l'appui de la requête n° 127 402 de l'association nouvelle des Girondins de Bordeaux Football Club est admise.
Article 4 : Ladite requête de l'association nouvelle des Girondins de Bordeaux Football Club est rejetée.
Article 5 : La présente décision sera notifiée au ministre de lajeunesse et des sports, à MM. X... et Y..., à l'association nouvelle des Girondins de Bordeaux Football Club, à la Fédération française de football et à la Ligue nationale de football.