Vu 1° sous le n° 110 931 la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 12 octobre 1989 et 16 juillet 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE, représenté par son président en exercice demeurant en cette qualité chez M. Serge X... à Rouvroy (02100) Saint-Quentin ; le RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE demande que le Conseil d'Etat :
- annule pour excès de pouvoir l'arrêté du 17 août 1989 par lequel le secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargé de l'environnement et de la prévention des risques technologiques et naturels majeurs, autorise l'emploi des gluaux pour la capture des grives et des merles destinés à servir d'appelants dans les départements des Alpes-de-Haute-Provence, des Alpes-Maritimes, des Bouches-du-Rhône, du Var et du Vaucluse ;
- décide qu'il sera sursis à l'exécution de cet arrêté ;
Vu 2° sous le n° 111 136 la requête enregistrée le 25 octobre 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES dont le siège social est à Graire, Les Gourds (26400) Crest ; l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES demande que le Conseil d'Etat annule pour excès de pouvoir l'arrêté du 17 août 1989 par lequel le secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargé de l'environnement et de la prévention des risques technologiques et naturels majeurs, autorise l'emploi des gluaux pour la capture des grives et des merles destinés à servir d'appelants dans les départements des Alpes-de-Haute-Provence, des Alpes-Maritimes, des Bouches-du-Rhône, du Var et du Vaucluse ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention du 19 mars 1902 relative à la préservation des oiseaux utiles à l'agriculture ;
Vu la directive communautaire n° 79/409/CEE relative à la conservation des oiseaux sauvages ;
Vu le code rural et notamment ses articles 373 et 376 ;
Vu la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Savoie, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Waquet, Farge, Hazan, avocat de l'Union nationale des fédérations départementales de chasseurs,
- les conclusions de Mme de Saint-Pulgent, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes du RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE et de l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES sont dirigées contre un même arrêté ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur l'intervention de l'Union nationale des fédérations départementales de chasseurs :
Considérant que l'Union nationale des fédérations départementales de chassers a intérêt au maintien de la décision attaquée ; qu'ainsi son intervention est recevable ;
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
Considérant que par l'arrêté attaqué, le secrétaire d'Etat chargé de l'environnement autorise l'emploi des gluaux pour la capture des grives et des merles destinés à servir d'appelants dans divers départements du Sud Est de la France ;
Considérant, d'une part, que la convention pour la protection des oiseaux utiles à l'agriculture, signée à Paris le 19 mars 1902, stipule à son article premier : "Les oiseaux utiles à l'agriculture, spécialement les insectivores et notamment les oiseaux énumérés dans la liste n° 1 annexée à la présente convention (...) jouiront d'une protection absolue" ; que l'arrêté attaqué ne concerne que les grives draines, litornes, mauvis, musiciennes et les merles noirs ; que ces oiseaux ne figurent pas dans la liste annexée à la convention précitée ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il s'agisse d'oiseaux utiles à l'agriculture au sens de cette convention ; que, dès lors, le moyen tiré du non respect des dispositions de la convention du 19 mars 1902 n'est pas fondé ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes des dispositions de l'article 373 du code rural : "Dans le temps où la chasse est ouverte, le permis donne à celui qui l'a obtenu le droit de chasser de jour, soit à tir, soit à courre, à cor et à cri, soit au vol, suivant les distinctions établies par des arrêtés du ministre de l'agriculture, sur ses propres terres et sur les terres d'autrui avec le consentement de celui à qui le droit de chasse appartient. Pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées et de manière sélective, la chasse de certains oiseaux de passage en petites quantités, le ministre chargé de la chasse autorise, dans les conditions qu'il détermine, l'utilisation des modes et moyens de chasse consacrés par les usages traditionnels, dérogatoires à ceux autorisés par l'alinéa précédent. Tous les autres moyens de chasse, y compris l'avion et l'automobile, même comme moyens de rabat, sont formellement prohibés" ; que l'arrêté attaqué qui autorise la chasse aux gluaux, laquelle est une chasse traditionnelle, de quelques espèces d'oiseaux, prévoit notamment une période de chasse réglementée, institue un régime spécifique d'autorisation pour toute personne souhaitant utiliser les gluaux et fait obligation de relâcher tout gibier autre que celui dont la chasse est autorisée lorsqu'il a été capturé accidentellement ; que, dans ces conditions, l'arrêté attaqué ne contrevient pas aux dispositions précitées du code rural, lesquelles sont compatibles avec les objectifs définis par la directive du conseil des communautés européennes du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages ;
Considérant, enfin, qu'aux termes des dispositions de l'article 3 de la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature : "Lorsqu'un intérêt scientifique particulier ou que les nécessités de la préservation du patrimoine biologique national justifient la conservation d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées, sont interdits : La destruction ou l'enlèvement des oeufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur mise en vente, leur vente ou leur achat" ; que les dispositions précitées de l'article 11 de l'arrêté attaqué prévoient que tout gibier capturé accidentellement, n'appartenant pas aux espèces dont la chasse aux gluaux est autorisée, doit être nettoyé et relâché ; qu'ainsi l'arrêté attaqué ne méconnaît pas les dispositions précitées de la loi du 10 juillet 1976 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE et l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté du 17 août 1989 ;
Article 1er : L'intervention de l'Union nationale des fédérations départementales de chasseurs est admise.
Article 2 : Les requêtes du RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE et de l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE, à l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES, à l'Union nationale des fédérations départementalesde chasseurs et au ministre de l'environnement.