Vu la requête, enregistrée le 12 août 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la VILLE DE TOUL, représentée par son maire en exercice ; la VILLE DE TOUL demande que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 11 juin 1991 par lequel le tribunal administratif de Nancy a annulé les délibérations adoptées par son conseil municipal lors de la réunion tenue par celui-ci le 17 décembre 1990 ;
2° rejette la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Nancy ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Devys, Auditeur,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. Jean X...,
- les conclusions de M. Dutreil, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que si, dans sa séance du 27 juin 1991, le conseil municipal de Toul a, de nouveau, adopté les délibérations adoptées par lui le 17 décembre 1990, et qui ont été annulées par le jugement attaqué, cette circonstance n'est pas de nature à rendre sans objet les conclusions de la requête ; qu'il y a lieu, dès lors, d'y statuer ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-15 du code des communes : "Les séances des conseils municipaux sont publiques. Néanmoins, sur la demande de trois membres ou du maire, le conseil municipal par assis et levé, sans débat, décide qu'il se forme en comité secret" ; et qu'aux termes de l'article L. 121-16 du même code : "Le maire a seul la qualité de police de l'assemblée. Il peut faire expulser de l'auditoire ou arrêter tout individu qui trouble l'ordre" ; qu'il appartient au maire, en application de ces dispositions, de prendre les mesures destinées à empêcher que soit troublé le déroulement des séances publiques du conseil municipal, y compris en faisant interdire, pour des raisons de sécurité et d'ordre publics, l'accès de la salle aux personnes dont le comportement traduit l'intention de manifester et de perturber les travaux de l'assemblée municipale ;
Considérant que si le maire de Toul a fait contrôler, le 17 décembre 1990, l'entrée de la salle dans laquelle se réunissait habituellement le conseil municipal et où il était convoqué pour tenir une séance ce jour-là, il résulte des pièces du dossier que l'accès a été refusé à un groupe de personnes, dont certaines portaient des pancartes et du matériel sonore, et qui, par la suite, ont fait irruption dans la salle par une autre issue, et ont empêché, par leurs manifestations bruyantes, le déroulement normal de la séance ; qu'en faisant ainsi interdire l'accès de la salle des délibérations à ces personnes, afin de prévenir le renouvellement d'incidents qui avaient eu lieu lors de la précédente séance et en avaient perturbé la tenue, le maire n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, fait irrégulièrement usage de ses pouvoirs de police, et n'a pas, en faisant effectuer ce contrôle, méconnu le principe de publicité des séances ; que, dans ces conditions, la décision de se former en comité secret, prise par le conseil municipal au cours de la séance, est bien intervenue lors d'une séance publique ; qu'il en résulte que la VILLE DE TOUL est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a annulé les délibérations du 17 décembre 1990, au motif que le conseil municipal les aurait adoptées au cours d'un comité secret décidé en violation des dispositions précitées de l'article L. 121-15 du code des communes ;
Considérant, toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Nancy ;
Considérant que si, lors de la séance du 17 décembre 1990, la décision de se former en comité secret n'a pas résulté d'un vote pas assis et levé, cette circonstance n'est pas de nature à en affecter la régularité, dès lors qu'il est constant que le conseil municipal s'est prononcé par un vote public, à main levée, dont le résultat n'est pas contesté ;
Considérant qu'en faisant appel à la force publique pour qu'elle procède matériellement, sous l'autorité de ses responsables, à l'évacuation de la salle de séance, le maire n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 121-16 du code des communes ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que le maire aurait dû faire procéder lui-même à l'évacuation doit être rejeté ;
Considérant que le moyen tiré de ce qu'il y aurait eu voie de fait n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la VILLE DE TOUL est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a annulé les délibérations adoptées par le conseil municipal de Toul lors de sa séance du 17 décembre 1990 ;
Sur l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'aux termes de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ; que ces dispositions font obstacle à ce que la VILLE DE TOUL, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la M. X... la somme qu'il demande au titre des sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. X... à verser à la VILLE DE TOUL la somme de 4 100 F au titre des sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy en date du 11 juin 1991 est annulé.
Article 2 : La demande de M. X... devant le tribunal administratif de Nancy est rejetée.
Article 3 : M. X... est condamné à payer la somme de 4 100 F à la VILLE DE TOUL.
Article 4 : Les conclusions de X... tendant à ce que la VILLE DE TOUL soit condamnée à lui payer la somme de 5 000 F sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la VILLE DE TOUL, à M. X... et au ministre de l'intérieur et de la sécurité publique.