Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 8 décembre 1987, présentée par M. X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 28 octobre 1987 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 2 mai 1986 par laquelle le ministre des affaires sociales et de l'emploi lui a refusé l'autorisation d'exercer l'art dentaire en France ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique et notamment son article L.356-2 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Savoie, Auditeur,
- les conclusions de Mme de Saint-Pulgent, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L.356-2 du code de la santé publique, ouvre le droit d'exercer en France la profession de chirurgien-dentiste : "soit le diplôme français d'Etat de docteur en chirurgie dentaire ; soit le diplôme français de chirurgien dentiste ; soit, si l'intéressé est ressortissant d'un Etat membre de la Communauté économique européenne, un diplôme, certificat ou autre titre de praticien de l'art dentaire délivré par l'un de ces Etats conformément aux obligations communautaires et figurant sur une liste établie par arrêté conjoint du ministre chargé de la santé et du ministre chargé des universités ou tout autre diplôme, certificat ou autre titre de praticien de l'art dentaire délivré par l'un des Etats membres sanctionnant une formation de praticien de l'art dentaire acquise dans l'un de ces Etats et commencée avant le 28 janvier 1980, à la condition qu'il soit accompagné d'une attestation de cet Etat certifiant que le titulaire du diplôme, certificat ou titre, s'est consacré de façon effective et licite aux activités de praticien de l'art dentaire pendant au moins trois années consécutives au cours des cinq années précédant la délivrance de l'attestation" ; et qu'aux termes des dispositions de l'article 7 de la directive susvisée du 25 juillet 1978 du conseil des communautés européennes : "Chaque Etat membre reconnaît comme preuve suffisante, pour les ressortissants des Etats membres dont les diplômes, certificats et autres titres ne répondant pas à l'ensemble des exigences minimales de formation prévues à l'article 1er de la directive 78/687/CEE, les diplômes, certificats et autres titres de praticien de l'art dentaire délivrés par ces Etats membres avant la mise en application de la directive 78/687/CEE, accompagnés d'une attestation certifiant que ces ressortissants se sont consacrés effectivement et licitement aux activiés en cause pendant au moins trois années consécutives au cours des cinq années précédant la délivrance de l'attestation" ;
Considérant que M. X..., de nationalité française, est titulaire du diplôme de docteur en chirurgie dentaire de l'école dentaire de la faculté française de médecine et de pharmacie de Beyrouth (Liban) ; qu'il a obtenu, en juillet 1979, soit avant la mise en application de la directive 78/687 du conseil des communautés européennes, en équivalence de ce diplôme le titre légal belge de "licencié en science dentaire" ; qu'en application des dispositions précitées de l'article L.356-2 du code de la santé publique, le ministre des affaires sociales et de l'emploi a refusé, par une décision en date du 2 mai 1986, d'autoriser M. X... à exercer en France la profession de dentiste ;
Considérant que M. X... soutient que les dispositions précitées du code de la santé publique ne sont pas compatibles avec les dispositions de la directive du 25 juillet 1978 du conseil des communautés européennes et notamment de celles de son article 7 en ce qu'elles limitent aux diplômes, certificats ou autres titres sanctionnant une formation de praticien de l'art dentaire acquise dans l'un des Etats membres de la communauté, les titres ouvrant le droit d'exercer la profession de chirurgien dentiste en France ;
Considérant que la solution du litige est subordonnée au point de savoir si l'article 7 de la directive du 25 juillet 1978 du conseil des communautés européennes a entendu exclure de son champ d'application les titres obtenus par équivalence, qui ne sanctionnent donc pas une formation de l'art dentaire acquise dans l'un des Etats membres de la communauté ; que la réponse donnée à cette question, dont la solution n'est pas claire, permettra seule d'apprécier le bien-fondé des moyens de la requête ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de surseoir à statuer sur la requête susvisée, jusqu'à ce que la Cour de justice des communautés européennes se soit prononcée sur la question préjudicielle ci-dessus définie ;
Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de M.Tawil-Albertini jusqu'à ce que la Cour de justice des communautés européennes se soit prononcée sur l'interprétation de l'article 7 de la directive 78/686 du 25 juillet 1978 du conseil des communautés européennes.
Article 2 : La question posée dans les motifs de la présente décision, laquelle est relative à l'interprétation de l'article 7 de la directive 78/686 du 25 juillet 1978 du conseil des communautés européennes, est renvoyée à la Cour de justice des communautés européennes siégeant à Luxembourg.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X..., à la Cour de justice des communautés européennes et au ministre des affaires sociales et de l'intégration.