Vu la requête enregistrée le 30 mars 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, pour la commune de Kintzheim (67600) ; la commune de Kintzheim demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt en date du 30 janvier 1990 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté comme portée devant une juridiction incompétente une partie de sa demande dirigée contre l'office national des forêts et a rejeté au fond l'autre partie de cette demande dirigée contre ledit office ;
2°) de renvoyer l'affaire devant une autre cour ou régler l'affaire au fond ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code forestier ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Aberkane, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Odent, avocat de la commune de Kintzheim, et de Me Delvolvé, avocat de l' office national des forêts,
- les conclusions de M. du Marais, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier soumis au juge du fond que la commune de Kintzheim a demandé à l'Office national des forêts, chargé d'assurer la protection, la conservation et la surveillance de la forêt lui appartenant, de l'indemniser du préjudice que lui ont causé les vols de bois dont elle a été victime ; qu'en rejetant cette demande au motif que la responsabilité de l'Office était subordonnée à l'existence d'une faute lourde dans l'organisation de son activité de protection, conservation et surveillance de la forêt appartenant à la commune, la cour administrative de Nancy a commis une erreur de droit ; que la commune de Kintzheim est donc fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi susvisée du 31 décembre 1987 le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que les vols dont a été victime la commune de Kintzheim sont imputables aux négligences commises par le préposé de l'Office national des forêts qui n'a pas surveillé l'importance des enlèvements que M. X... avait été autorisé à effectuer dans les bois appartenant à la commune de Kintzheim ; que cette faute est de nature à engager la responsabilité de l'Office national des forêts envers la commune ; qu'il sera fait une exacte appréciation du montant de la réparation qui lui est due en lui attribuant, comme l'a fait le tribunal administratif de Strabourg, une indemnité de 40.000 F ; qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement et de rejeter, tant l'appel de l'Office national des forêts que l'appel incident de la commune de Kintzheim ;
Considérant que la commune de Kintzheim a demandé la capitalisation des intérêts le 2 mai 1989, le 30 novembre 1990 et le 1er décembre 1993 ; qu'il était dû à chacune de ces dates au moins une année d'intérêts ; qu'il y a donc lieu, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, de faire droit à ces demandes ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy en date du 30 janvier 1990 est annulé.
Article 2 : Les conclusions de l'appel principal formées par l'Office national des forêts et celles de l'appel incident formées par la commune de Kintzheim contre le jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 19 janvier 1989 susvisé sont rejetées.
Article 3 : Les intérêts de la somme de 40.000 F courant à compter du 6 mars 1978, seront capitalisés aux 2 mai 1989, 30 novembre 1990 et 1er décembre 1993 pour produire eux-mêmes intérêts à compter de chacune de ces dates.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'Office national des forêts, à la commune de Kintzheim et au ministre de l'agriculture et de la pêche.