Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 4 septembre 1989 et 4 janvier 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le département de la Seine-Saint-Denis, représenté par le président du conseil général dûment habilité à cet effet ; le département de la Seine-Saint-Denis demande que le Conseil d'Etat annule la circulaire interministérielle du 9 mai 1989 du ministre de l'intérieur, du ministre de l'éducation nationale, du ministre de la jeunesse et des sports, du ministre de l'agriculture et de la forêt, du ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget, et du ministre délégué auprès du ministre de l'équipement, du logement, des transports et de la mer, chargé de la mer, relative à la désaffectation et aux changements d'utilisation, sans désaffectation préalable, des biens de certains établissements d'enseignement ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 modifiée ;
Vu la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 modifiée ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Lallemand, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Ryziger, avocat du département de la Seine-Saint-Denis,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les conclusions de la requête susvisée du département de la Seine-Saint-Denis doivent être regardées comme dirigées contre les seules dispositions de la partie I de la circulaire interministérielle attaquée ;
Sur les conclusions dirigées contre les dispositions de la circulaire susvisée, en tant qu'elle porte sur la désaffectation des biens utilisés par les écoles élémentaires :
Considérant que le département de la Seine-Saint-Denis ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation des dispositions attaquées de la circulaire susvisée, en tant qu'elles portent sur la désaffectation des biens utilisés par les écoles élémentaires, qui sont la propriété des communes ; que lesdites conclusions ne sont donc pas recevables ;
Sur les conclusions dirigées contre les dispositions de la circulaire susvisée, en tant qu'elle porte sur la désaffectation des biens utilisés par les établissements du second degré :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'éducation nationale :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 14 II de la loi susvisée du 22 juillet 1983 : "Le département a la charge des collèges. A ce titre il en assure la construction, la reconstruction, l'extension, les grosses réparations, l'équipement et le fonctionnement, à l'exception d'une part des dépenses pédagogiques à la charge de l'Etat dont la liste est arrêtée par décret et d'autre part, des dépenses de personnel sous réserve des dispositions de l'article 26" ; qu'aux termes du paragraphe III du même article : "La région a la charge des lycées et des établissements d'éducation spéciale. Elle en assure la construction, la reconstruction, l'extension, les grosses réparations, l'équipement et le fonctionnement, à l'exception d'une part des dépenses pédagogiques à la charge de l'Etat dont la liste est arrêtée par décret et, d'autre part, des dépenses de personnel sous réserve des dispositions de l'article 26" ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 13 II de la loi susvisée du 22 juillet 1983 : "Le conseil régional établit et transmet au représentant de l'Etat, après accord des départements et compte tenu des orientations fixées par le plan, le schéma prévisionnel des formations des collèges, des lycées, des établissements d'éducation spéciale, des écoles de formation maritime et aquacole et des établissements d'enseignement agricole visés à l'article L.815-1 du code rural" et qu'aux termes du paragraphe III du même article : "Le conseil général établit, après accord de chacune des communes concernées, ou le cas échéant, de chacun des groupements de communes concernés par les projets situés sur leur territoire, le programme prévisionnel des investissements relatifs aux collèges qui résulte du schéma prévisionnel mentionné au paragraphe II du présent article - A ce titre, le conseil général définit la localisation des établissements, leur capacité d'accueil et le mode d'hébergement des élèves - Le conseil régional établit, après accord de chacune des collectivités concernées par les projets situés sur leur territoire, le programme prévisionnel des investissements relatifs aux lycées, aux établissements d'éducation spéciale, aux écoles de formation maritime et aquacole et aux établissements d'enseignement agricole visés à l'article L.815-1 du code rural qui résulte du schéma prévisionnel mentionné au paragraphe II du présent article - A ce titre, le conseil régional définit la localisation des établissements, leur capacité d'accueil et le mode d'hébergement des élèves" ;
Considérant, en troisième lieu, que le paragraphe IV du même article 13 dispose que : "Chaque année, les autorités compétentes de l'Etat arrêtent la structure pédagogique générale des établissements en tenant compte du schéma prévisionnel mentionné ci-dessus" ;
Considérant, enfin, que l'article 15-5 de la même loi dispose que "les collèges, les lycées et établissements d'enseignement spécial sont des établissements publics locaux d'enseignement (...) - Ces établissements sont créés par arrêté du représentant de l'Etat sur proposition, selon le cas, du département, de la région ou, dans le cas prévu aux paragraphes VII bis et VII ter de l'article 14, de la commune ou du groupement de communes intéressé" ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que le législateur a entendu partager la compétence pour l'organisation du service public de l'enseignement du second degré entre l'Etat d'une part, le département ou la région d'autre part ; que la décision de désaffectation des biens utilisés par un établissement d'enseignement du second degré ne saurait dès lors intervenir qu'au terme d'une procédure permettant de recueillir l'accord tant du représentant de l'Etat que des organes compétents de la collectivité territoriale dont relèvent ces biens, qu'elle en soit propriétaire ou qu'elle exerce l'ensemble des droits et obligations du propriétaire en vertu d'une mise à disposition résultant des articles 19 à 21 de la loi susvisée du 7 janvier 1983 ; qu'ainsi, en prévoyant que la décision de désaffectation serait prise par le représentant de l'Etat sur proposition de la collectivité territoriale intéressée, le passage incriminé de la circulaire attaquée n'a fait que tirer les conséquences des dispositions législatives précitées ; qu'il est dès lors, dépourvu de caractère réglementaire et n'est pas de nature à être contesté devant le juge de l'excès de pouvoir ; qu'il suit de là que les conclusions susanalysées de la requête présentée par le département de la Seine-Saint-Denis ne sont pas recevables ;
Article 1er : La requête du département de la Seine-Saint-Denis est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au département de la Seine-Saint-Denis, au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, au ministre de l'éducation nationale, au ministre du budget, au ministre de l'agriculture et de la pêche et au ministre de l'équipement, des transports et du tourisme.