Vu la requête enregistrée le 17 avril 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune d'Armoy, la commune d'Allinges, la commune d'Anthy-sur-Leman, la commune de Bellevaux, la commune de Cervens, la commune de Le Lyaud, la commune de Lullin, la commune de Margencel, la commune de Marin, la commune d'Orcier, la commune de Perrignier, la commune de Reyvroz, la commune de Sciez et la commune de Vailly (Haute-Savoie), représentées par leurs maires en exercice ; la commune d'Armoy et autres demandent au Conseil d'Etat l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 26 février 1997 portant modification et création de cantons dans le département de la Haute-Savoie ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Courtial, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Touvet, Commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité externe :
Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose une consultation des communes situées dans des cantons concernés par un projet de remodelage de limites cantonales ; que par suite, et en tout état de cause, les communes requérantes ne sauraient utilement invoquer la double circonstance que, préalablement à l'émission de son avis sur le projet de scission du canton de Thonon-les-Bains en deux nouveaux cantons, le conseil général du département de la Haute-Savoie se serait abstenu de procéder à une nouvelle consultation des communes situées dans le canton concerné par ce projet et que le décret attaqué, qui procède à ce remodelage, aurait été pris malgré l'opposition des communes concernées ;
Sur la légalité interne :
Considérant que si l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales dispose que : "Les modifications des limites territoriales des cantons, les créations et suppressions de cantons et le transfert du siège de leur chef-lieu sont décidés par décret en Conseil d'Etat après consultation du conseil général", il résulte de l'ensemble des dispositions de la Constitution, notamment de ses articles 3, 24 et 72, que le principe d'égalité des citoyens devant le suffrage s'applique à l'élection des assemblées délibérantes des collectivités locales ; qu'il suit de là que, s'il appartient au gouvernement, sous réserve de ne porter atteinte à aucune disposition législative régissant l'organisation administrative, de procéder, afin notamment de tenir compte de l'évolution démographique, au remodelage des circonscriptions cantonales d'un département, de telles opérations ne peuvent légalement augmenter les disparités d'ordre démographique existantes ; qu'elles ne sauraient avoir pour objet ni, en principe, pour effet d'accroître, sauf pour des motifs d'intérêt général, ni l'écart de la population de chaque canton à la population cantonale moyenne dans le département ni, dans les cas autres qu'une scission, l'écart entre le plus peuplé et le moins peuplé des cantons redécoupés, ni, dans le cas de la scission d'un canton préexistant, l'écart entre le canton le plus peuplé et le canton le moins peuplé de la partie du département englobant ce canton et affectée par ce remodelage ;
Considérant que la scission du canton de Thonon-les-Bains, qui, avec 45 476 habitants était le plus peuplé du département de la Haute-Savoie, en deux nouveaux cantons de Thonon-les-Bains Ouest et de Thonon-les-Bains Est comptant respectivement 26 528 habitants et 18 948 habitants, a pour effet de réduire les disparités d'ordre démographique qui existaient auparavant tant par rapport à la moyenne départementale qu'entre les cantons de la partie du département affectée par l'opération de remodelage et constituée par l'aire géographique correspondant en l'espèce à l'arrondissement de Thonon-les-Bains ; que ni le fait que l'anciencanton de Thonon-les-Bains n'a pas été divisé en deux cantons d'égale population ni celui que d'autres découpages auraient été envisageables ne sont de nature à affecter la légalité du décret attaqué ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les communes requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation de ce décret ;
Article 1er : La requête des communes d'ARMOY, d'ALLINGES, d'Anthy-sur-Leman, de Bellevaux, de Cervens, de Le Lyaud, de Lullin, de Margencel, de Marin, d'Orcier, de Perrignier, de Reyvroz, de Sciez et de Vailly est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la commune d'Armoy, à la commune d'Allinges, à la commune d'Anthy-sur-Leman, à la commune de Bellevaux, à la commune de Cervens, à la commune de Le Lyaud, à la commune de Lullin, à la commune de Margencel, à la commune de Marin, à la commune d'Orcier, à la commune de Perrignier, à la commune de Reyvroz, à la commune de Sciez, à la commune de Vailly, au Premier ministre et au ministre de l'intérieur.