Vu 1°) sous le n° 196304 la requête enregistrée le 5 mai 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. François X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat annule le décret n° 98-127 du 4 mars 1998 organisant les modalités du double degré de juridiction en matière de droits d'enregistrement, de taxe de publicité foncière, de droits de timbre, de contributions indirectes et de taxes assimilées à ces droits, taxes et contributions ;
Vu, 2°) sous le n° 196349 la requête enregistrée le 6 mai 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'INSTITUT DES AVOCATS CONSEILS FISCAUX (IACF), dont le siège est ..., représenté par son président ; l'INSTITUT DES AVOCATS CONSEILS FISCAUX (IACF) demande que le Conseil d'Etat annule le décret n° 98-127 du 4 mars 1998 organisant les modalités du double degré de juridiction en matière de droits d'enregistrement, de taxe de publicité foncière, de droits de timbre, de contributions indirectes et de taxes assimilées à ces droits, taxes et contributions ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le nouveau code de procédure civile ;
Vu le décret n° 74-1227 du 3 mai 1974 portant publication de la conventioneuropéenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Belliard, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes de M. X... et de l'INSTITUT DES AVOCATS CONSEILS FISCAUX (IACF) qui tendent à l'annulation du décret n° 98-127 du 4 mars 1998 organisant les modalités du double degré de juridiction en matière de droits d'enregistrement, de taxe de publicité foncière, de droit de timbre, de contributions indirectes et de taxes assimilées à ces droits, taxes et contributions, sont dirigées contre un même texte ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Considérant, en premier lieu, que, les dispositions relatives à la procédure fiscale contentieuse, y compris pour les pénalités, et alors même que celles-ci constituent des "accusations en matière pénale" au sens de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale, relèvent du domaine réglementaire dès lors qu'elles ne concernent ni la procédure pénale, ni les modalités de recouvrement des impositions et ne mettent en cause aucune des règles ni aucun des principes fondamentaux placés dans le domaine de la loi par l'article 34 de la Constitution ; que si l'IACF soutient que l'article 5 du décret attaqué ne pouvait légalement être pris par l'autorité investie du pouvoir réglementaire en tant qu'il prévoit l'exécution de droit à titre provisoire des jugements du tribunal de grande instance sans réserver le cas des sanctions fiscales, aucune disposition de valeur législative ni aucun principe général du droit n'imposent que l'exercice de l'appel soit d'une manière générale et en dehors des cas où la loi l'a prévu, comme en matière de procédure pénale, suspensif de l'exécution du jugement attaqué ; que les stipulations de l'article 6 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne l'impliquent pas davantage ; que, par suite, le moyen doit être rejeté ;
Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions du décret attaqué prévoyant que l'expertise n'est pas de droit en appel si elle est demandée par la partie l'ayant obtenue devant le tribunal de grande instance ou si aucune des parties ne l'a demandée en première instance ne font pas obstacle à ce que le juge prescrive toute mesure qu'il estime utile ; que dès lors ces dispositions, comme celles qui prévoient que l'expertise est effectuée par un expert unique, ne sont contraires à aucun principe et n'ont été édictées en méconnaissance ni des droits de la défense ni en tout état de cause des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la circonstance que l'expertise soit régie par des dispositions différentes devant les tribunaux administratifs et devant les tribunaux judiciaires n'est pas contraire au principe d'égalité ;
Considérant, enfin, qu'aucun principe général du droit ne fait obstacle à ce que l'appelen matière fiscale devant les tribunaux judiciaires soit soumis à la procédure de droit commun de constitution d'avoué prévue par l'article 899 du nouveau code de procédure civile ; que cette représentation obligatoire ne porte pas atteinte au principe du libre choix de leur défenseur par les parties, celles-ci demeurant libres de se faire assister par un avocat de leur choix ; que les frais liés au ministère obligatoire des avoués ne sont pas de nature à entraîner une rupture d'égalité des justiciables devant le service public de la justice ; que, d'ailleurs, les dispositions de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ainsi que celles de l'article 700 du nouveau code de procédure civile sur la charge des frais exposés et non compris dans les dépens sont applicables au contentieux fiscal devant les juridictions judiciaires ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le décret serait entaché d'illégalité en ce qu'il prévoit la constitution obligatoire d'avoué devant la cour d'appel ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation du décret attaqué ;
Article 1er : Les requêtes de M. X... et de l'INSTITUT DES AVOCATS CONSEILS FISCAUX sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. François X..., à l'INSTITUT DES AVOCATS CONSEILS FISCAUX, au Premier ministre, au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au garde des sceaux, ministre de la justice.