Vu la décision en date du 13 octobre 1999 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, sur la demande de la COMPAGNIE NATIONALE AIR FRANCE, en tant qu'elle porte sur l'année 1996, ordonné à Aéroports de Paris de faire connaître au Conseil d'Etat, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision, d'une part, le montant total des taxes d'atterrissage effectivement supportées par Air France et les autres compagnies aériennes au titre de cette année 1996 pour leurs avions cargos, d'autre part, les éléments permettant de déterminer sur la base du produit total des taxes d'atterrissage des avions cargos perçues par Aéroports de Paris et des tonnages de jauge atterrie par avions cargos des différentes compagnies, les montants de redevance qui auraient été respectivement exigés de ces compagnies, si aucun abattement ne s'était appliqué et dans l'hypothèse où auraient été seulement appliquées les modalités d'abattement fixées en 1990 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de l'aviation civile ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme de Silva, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Cossa, avocat de la COMPAGNIE NATIONALE AIR FRANCE et de la SCP Piwnica, Molinié, avocat des Aéroports de Paris,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que par la décision susvisée en date du 13 octobre 1999 le Conseil d'Etat statuant au contentieux, d'une part, a annulé la décision d'Aéroports de Paris fixant pour l'année 1996, les taux des redevances d'atterrissage appliquées aux avions cargos utilisant l'une des trois plates-formes d'Orly (Val-de-Marne), Charles de Gaulle (Val-d'Oise) et le Bourget (Seine-Saint-Denis) au motif que les modalités de modulation de ces redevances induisent des écarts de charge entre les compagnies concernées qui, en raison de leur ampleur, ne peuvent être regardées comme limitées à ce que permettait, eu égard aux exigences du principe d'égalité, la prise en compte des considérations d'intérêt général qui s'attachent au développement des aérodromes parisiens comme plate-forme de fret international et, d'autre part, se prononçant sur les conclusions indemnitaires présentées par la COMPAGNIE NATIONALE AIR FRANCE, a jugé que la fixation, selon des modalités illégales, du taux pour 1996 des redevances en cause était constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'établissement public Aéroports de Paris pour autant qu'il en résulte un préjudice ; qu'il a ordonné avant-dire droit qu'Aéroports de Paris lui indique le montant total des taxes d'atterrissage effectivement supportées par les compagnies en 1996, ainsi que ceux qui auraient été à leur charge, pour un même produit global, dans différentes hypothèses de taxation avec ou sans abattement ;
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des éléments chiffrés fournis par Aéroports de Paris que la COMPAGNIE NATIONALE AIR FRANCE a acquitté en 1996 un montant de redevances d'atterrissage de 38 632 000 F pour un total de jauge de 814 885 T, soit un taux moyen de redevance par tonne de 47,41 F, supérieur de 74 % au taux moyen supporté par le deuxième transporteur de fret au départ des pistes d'Aéroports de Paris ; qu'ainsi l'existence d'un préjudice résultant pour Air France des modalités de modulation des redevances d'atterrissage appliquées en 1996 par Aéroports de Paris est établie ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'eu égard à la proportionnalité à respecter entre le montant total des redevances et le coût des services rendus et en l'absence de toute indication fournie par Aéroports de Paris dans le cadre de l'instruction sur d'autres modalités de modulation de ces redevances qui auraient été susceptibles de s'appliquer en 1996 en conciliant les objectifs de développement de l'établissement avec les exigences du principe d'égalité, le préjudice de la COMPAGNIE NATIONALE AIR FRANCE doit être évalué en fonction de la charge qui aurait été la sienne si un taux unique de redevance par tonne atterrie avait été appliqué à toutes les compagnies quel qu'ait été leur tonnage de jauge atterie ; que le produit total des taxes d'atterrissage perçu en 1996 par Aéroports de Paris, pour 1 686 076 tonnes de jauge atterries, s'étant élevé à 58 130 077 F, le taux de redevance moyen par tonne atterrie ressortait à 34,47 F ; que l'application de ce taux aurait conduit la COMPAGNIE NATIONALE AIR FRANCE à acquitter en 1996 un montant de redevances de 28 094 382 F, se comparant au montant effectivement acquitté par elle de 38 632 000 F ; que, dès lors, il sera fait, dans les circonstances de l'espèce, une exacte appréciation de la réparation due à la COMPAGNIE NATIONALE AIR FRANCE en condamnant Aéroports de Paris à lui verser une indemnité égale à la différence entre ces deux sommes et s'élevant par suite à 10 537 617 F ;
Sur les intérêts :
Considérant que la requérante a droit aux intérêts de la somme de 10 537 617 F à compter du 30 décembre 1996, date à laquelle elle a présenté sa demande d'indemnité ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 26 avril 2000 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Sur les conclusions de la COMPAGNIE NATIONALE AIR FRANCE tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit auxdites conclusions et de condamner l'établissement Aéroports de Paris à verser une somme de 20 000 F au titre des dispositions précitées ;
Article 1er : L'établissement Aéroports de Paris est condamné à verser à la COMPAGNIE NATIONALE AIR FRANCE la somme de 10 537 617 F avec intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 1996. Les intérêts échus le 26 avril 2000 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : L'Etablissement Aéroports de Paris est condamné à verser à la COMPAGNIE NATIONALE AIR FRANCE la somme de 20 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la COMPAGNIE NATIONALE AIR FRANCE est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE AIR FRANCE, à l'établissement Aéroports de Paris et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.