Vu la requête, enregistrée le 2 août 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme X...
Y..., demeurant 7 Montée Bonafous à Lyon (69004) ; Mme Y... demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 23 avril 1999 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 12 avril 1999 du préfet du Rhône décidant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant l'Algérie comme pays de destination ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990, la loi du 26 février 1992 et la loi du 24 août 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Falque-Pierrotin, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant que Mme Y... a invoqué, à l'appui de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 avril 1999 du préfet du Rhône décidant sa reconduite à la frontière, l'illégalité de la décision du 23 octobre 1998 du préfet du Rhône refusant de lui délivrer un titre de séjour ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Y..., de nationalité algérienne, a vécu en France de 1966 à 1986, date à laquelle elle est partie vivre en Algérie avec son mari ; qu'elle a regagné la France, le 8 février 1998, avec ses trois enfants à la suite des graves difficultés qu'elle avait rencontrées en Algérie du fait de sa jeunesse passée en France ; que ses frères et soeurs, de nationalité française, vivent désormais en France ; que, par suite, elle est fondée à soutenir que le préfet du Rhône a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la mesure sur sa situation personnelle en refusant de lui délivrer par la décision du 23 octobre 1998 le titre de séjour qu'elle demandait ; qu'il suit de là que l'arrêté en date du 12 avril 1999, pris sur le fondement de la décision du 23 octobre 1998 et ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Y... et la décision du même jour fixant le pays de destination, sont eux-mêmes illégaux ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme Y... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 avril 1999 du préfet du Rhône ordonnant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à payer à Mme Y... la somme de 4 000 F qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon en date du 23 avril 1999, ensemble l'arrêté du 12 avril 1999 du préfet du Rhône ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Y... et la décision du même jour fixant l'Algérie comme pays de destination sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à Mme Y... la somme de 4 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme X...
Y..., au préfet du Rhône et au ministre de l'intérieur.