Vu la requête, enregistrée le 24 septembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE GENERALE TRAVAUX PUBLICS BATIMENT (SGTPB), dont le siège est ... ; la SOCIETE GENERALE TRAVAUX PUBLICS BATIMENT demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 28 juillet 1999 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a annulé, à la demande de l'office public d'habitations à loyer modéré de Haute-Corse, le jugement du 16 décembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Bastia l'a condamné à verser à la SOCIETE GENERALE TRAVAUX PUBLICS BATIMENT la somme de 322 747,67 F, augmentée des intérêts moratoires capitalisés au 29 novembre 1989, en règlement d'un marché pour la construction d'un ensemble de logements et a rejeté sa demande devant le tribunal administratif de Bastia ;
2°) de condamner l'office public d'habitations à loyer modéré de Haute-Corse à lui verser la somme de 15 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Edouard Philippe, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Boulloche, Boulloche, avocat de la SOCIETE GENERALE TRAVAUX PUBLICS BATIMENT et de la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de l'office public d'habitations à loyer modéré de Haute-Corse,
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par un marché conclu le 18 juillet 1983, l'office public d'habitations à loyer modéré de Haute-Corse a confié à la SOCIETE GENERALE TRAVAUX PUBLICS BATIMENT la construction d'un ensemble de 25 logements sur la commune de Morosaglia ; qu'après que le préfet eut, le 31 octobre 1986, à la demande de la SOCIETE GENERALE TRAVAUX PUBLICS BATIMENT, mandaté d'office le paiement, par l'office, d'une somme de 262 194,24 F, la société, estimant que cette somme ne représentait pas le solde du marché qui lui restait dû, a saisi le tribunal administratif de Bastia d'une demande tendant à ce que l'office soit condamné à lui verser une somme de 322 747,67 F ; que, par un jugement du 16 décembre 1994, le tribunal administratif de Bastia a condamné l'office à lui payer cette somme ; que ce jugement a été annulé par un arrêt du 28 juillet 1999 de la cour administrative d'appel de Lyon dont la SOCIETE GENERALE TRAVAUX PUBLICS BATIMENT demande l'annulation ;
Considérant qu'aux termes de l'article 13 du cahier des clauses administratives générales, applicable au marché en cause : "13-31 Après l'achèvement des travaux, l'entrepreneur ... dresse le projet du décompte final établissant le montant total des sommes auxquelles il peut prétendre du fait de l'exécution du marché dans son ensemble ... 13-32. Le projet de décompte final est remis au maître d'oeuvre dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la date de notification de la décision de réception des travaux ... 13-34. Le projet de décompte final établi par l'entrepreneur est accepté ou rectifié par le maître d'oeuvre ; il devient alors le décompte final. 13-42. Le décompte général signé par la personne responsable du marché doit être notifié à l'entrepreneur par ordre de service avant la plus tardive des deux dates ci-après : quarante-cinq jours après la date de remise du projet de décompte final ; trente jours après la publication de l'index de référence permettant la révision du solde ... 13-44. L'entrepreneur doit, dans un délai compté à partir de la notification du décompte général, le renvoyer au maître d'oeuvre, revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles il refuse de le signer. ( ...) Si la signature du décompte général est donnée sans réserve, cette acceptation lie définitivement les parties, sauf en ce qui concerne le montant des intérêts moratoires ; ce décompte devient ainsi le décompte général et définitif du marché" ;
Considérant qu'il résulte des stipulations précitées du cahier des clauses administratives générales que c'est l'approbation par l'entrepreneur du décompte général signé par le maître de l'ouvrage ou l'expiration du délai de réclamation laissé à l'entrepreneur qui confèrent à ce décompte son caractère définitif et intangible, lequel a notamment pour effet d'interdire aux parties toute contestation ultérieure sur les éléments de ce décompte ; que, lorsque la personne responsable du marché s'abstient de notifier dans les conditions prévues par l'article 13-42 précité le décompte général à l'entrepreneur, le décompte général ne peut être regardé comme étant devenu définitif ni à l'égard du maître de l'ouvrage ni à l'égard de l'entrepreneur et peut ainsi être contesté devant le juge du contrat ;
Considérant qu'après avoir relevé que le décompte général du marché conclu entre la SOCIETE GENERALE TRAVAUX PUBLICS BATIMENT et l'office public d'habitations à loyer modéré de Haute-Corse n'avait pas été notifié dans les conditions prévues par les stipulations précitées de l'article 13 du cahier des clauses administratives générales, la cour administrative d'appel de Lyon s'est fondée, pour annuler le jugement du tribunal administratif de Bastia, sur ce que, pour le règlement de ce marché, il y avait lieu "de fixer le solde du décompte en faisant état de tous les éléments actifs et passifs résultant d'obligations ayant date certaine ; que, contrairement à ce qu'il est soutenu par chacune des parties à l'encontre des prétentions de l'autre, celles-ci peuvent, en l'absence de caractère définitif du décompte, invoquer toute obligation ayant date certaine nonobstant l'absence de leur mention dans le décompte général" ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'en statuant ainsi, la cour administrative d'appel de Lyon n'a pas entaché son arrêt d'une erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE GENERALE TRAVAUX PUBLICS BATIMENT n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'office public d'habitations à loyer modéré de Haute-Corse, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la SOCIETE GENERALE TRAVAUX PUBLICS BATIMENT la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la SOCIETE GENERALE TRAVAUX PUBLICS BATIMENT à payer à l'office public d'habitations à loyer modéré de Haute-Corse la somme qu'il demande au même titre ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE GENERALE TRAVAUX PUBLICS BATIMENT est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'office public d'habitations à loyer modéré de Haute-Corse sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE GENERALE TRAVAUX PUBLICS BATIMENT, à l'office public d'habitations à loyer modéré de Haute-Corse et au ministre de l'équipement, des transports et du logement