Vu la requête, enregistrée le 30 octobre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Alain X..., ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 5 octobre 2001 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa protestation contre les opérations électorales qui se sont déroulées les 11 et 18 mars 2001 en vue de la désignation des conseillers municipaux de la ville de Forbach ;
2°) annule ces opérations électorales ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Méda, Maître des Requêtes ;
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;
En ce qui concerne la propagande électorale :
Considérant que si M. Y..., qui conduisait l'une des listes pour les élections municipales, a en sa qualité de maire de Forbach, invité par une lettre en date du 1er mars 2001, les habitants arrivés dans la commune au cours de l'année 2000 à une réception de bienvenue, il résulte de l'instruction que cette réception, qui s'est d'ailleurs tenue le 28 mars 2001 postérieurement au second tour de scrutin, avait été précédée d'une manifestation analogue l'année précédente à la même époque ; que dès lors, cette invitation n'a pas été de nature à altérer la sincérité du scrutin ;
Considérant que la distribution aux riverains, d'un courrier en date du 8 mars 2001 sous le timbre "Ville de Forbach", signé de M. Charles Y... en sa qualité de maire, évoquant la réalisation des travaux d'aménagement des trottoirs, n'a pas constitué, dans les circonstances de l'espèce, une promesse ou une pression illicite sur les électeurs ; que la distribution de ce courrier par un agent communal, pour regrettable qu'elle soit, n'est pas de nature, à elle seule, à altérer la sincérité du scrutin ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'association "Rendez-vous musique nouvelle", qui bénéficie d'une subvention de la commune de Forbach et dont M. Y... est le vice-président, a diffusé dans les jours précédant le scrutin une lettre de soutien à la candidature de M. Y... ; que toutefois, à supposer même que cette lettre n'ait pas été adressée qu'aux adhérents de l'association, sa diffusion n'a pas été de nature, compte tenu de l'importance de l'écart des voix entre les deux listes arrivées en tête, à altérer la sincérité du scrutin ;
Sur certains numéros de la revue municipale :
Considérant que M. X... soutient que plusieurs numéros de la revue municipale publiés au cours des six mois précédant le scrutin ont assuré la promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion de l'équipe de M. Y..., maire sortant, en violation des dispositions de l'article L. 52-1 du code électoral ;
Considérant que les numéros de "Vivre à Forbach" de septembre et novembre 2000 ne constituent pas, eu égard au contenu et à l'orientation des articles qu'ils comportent, des éléments d'une campagne de promotion publicitaire ; que si le numéro de février 2001 de la même revue présente le budget primitif 2001 de la commune qui venait d'être adopté, aucun de ses articles ne peut être regardé comme un élément d'une campagne de promotion publicitaire au profit de M. Y... ;
En ce qui concerne les dépenses électorales :
En ce qui concerne l'application de l'article L. 52-8 du code électoral :
Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 52-8 du code électoral : "Les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne d'un candidat ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués" ; qu'aux termes de l'article L. 118-3 du code électoral : "Saisi par la commission instituée par l'article L. 52-14, le juge de l'élection peut déclarer inéligible pendant un an le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales. Dans les autres cas, le juge de l'élection peut ne pas prononcer l'inéligibilité du candidat dont la bonne foi est établie ou relever le candidat de cette inéligibilité. Si le juge de l'élection a déclaré inéligible un candidat proclamé élu, il annule son élection ou, si l'élection n'a pas contestée, le déclare démissionnaire d'office" ;
Considérant que si la diffusion par l'association "Rendez-vous musique nouvelle" d'une lettre vantant les qualités de M. Y... a constitué pour celui-ci un avantage prohibé par l'article L. 52-8 du code électoral, la seule prescription d'un tel avantage n'entraîne pas nécessairement le rejet du compte de campagne ni, par suite, l'inéligibilité du candidat ; que compte tenu du faible montant de la dépense supplémentaire, il n'y a pas lieu de prononcer le rejet du compte et l'inéligibilité de M. Y... ;
En ce qui concerne l'application de l'article L. 52-12 du code électoral :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 52-12 du code électoral : "Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 est tenu d'établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et; selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection, hors celles de la campagne officielle, par lui-même ou pour son compte, au cours de la période mentionnée à l'article 52-4. Sont réputées faites pour son compte les dépenses exposées directement au profit du candidat et avec l'accord de celui-ci, par les personnes physiques qui lui apportent leur soutien, ainsi que les partis et groupements politiques qui ont été créés en vue de lui apporter leur soutien. Le candidat estime et inclut, en recettes et en dépenses, les avantages directs ou indirects, les prestations de service et dons en nature dont il a bénéficié. Le compte de campagne doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit" ;
Considérant que le coût de l'invitation à une réception de bienvenue adressée par le maire aux nouveaux habitants de la commune n'a pas à être intégré dans le compte de campagne de Y... ; que, dès lors que les numéros de la revue municipale de septembre et novembre 2000 et février 2001 ne peuvent être regardés comme ayant assuré la promotion de M. Y... en sa qualité de maire sortant, leur coût n'a pas à être réintégré en dépenses dans le compte de campagne de celui-ci ;
Considérant, en revanche, que la lettre vantant les qualités de M. Y... diffusée pendant la campagne électorale par l'association "Rendez-vous musique nouvelle", dont M. Y... est vice-président, doit être regardée comme diffusée avec l'accord de l'intéressé et réintégrée, dès lors, dans son compte de campagne ; que le tribunal administratif a fait une exacte évaluation de cette dépense en la réintégrant pour un montant de 400 F ; que compte tenu de cette rectification, le compte de campagne de M. Y..., qui avait été arrêté à 181 602 F, demeure inférieur au plafond de dépenses fixé en l'espèce à 262 256 F ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa protestation contre les opérations électorales qui se sont déroulées pour l'élection des conseillers municipaux de la commune de Forbach les 11 et 18 mars 2001 ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Alain X..., à M. Charles Y... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.