Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 mai et 7 septembre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE EN NOM COLLECTIF CIDAL, dont le siège est ... ; la SOCIETE EN NOM COLLECTIF CIDAL demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 27 février 2001 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa demande tendant à la réformation du jugement du 27 novembre 1997 en tant que par ce jugement le tribunal administratif de Lille n'a que partiellement fait droit à sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 30 juin 1981, 1982 et 1984 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Le Roy, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, avocat de la SOCIETE EN NOM COLLECTIF CIDAL,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que la SOCIETE EN NOM COLLECTIF CIDAL a été assujettie, au titre de chacune des années 1981, 1982 et 1984, à l'issue d'une vérification de sa comptabilité, à des suppléments d'impôt sur les sociétés résultés de la réintégration dans ses bases d'imposition des sommes, respectivement, de 6 344 870 F, 6 494 869 F et 6 586 230 F, représentant 80 % et 90 % des bénéfices issus de l'activité de commercialisation de deux catalogues de produits destinés à être revendus par correspondance, qui constitue son objet, et pour l'exercice de laquelle elle a conclu, les 1er juillet 1978 et 1982 avec la SA Trois Suisses France une convention instituant entre elles une société en participation, et stipulant que les profits en seraient, dans ces proportions, dévolus à la SA Trois Suisses France ;
Considérant, en premier lieu, que, pour rejeter, par l'arrêt attaqué, le moyen tiré par la SOCIETE EN NOM COLLECTIF CIDAL de ce que l'administration n'avait pu, pour écarter l'opposabilité de ladite convention, que se placer implicitement sur le terrain de l'abus de droit régi par les dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, la cour administrative d'appel de Douai s'est fondée sur ce que l'administration, tant dans la décision de rejet de sa réclamation que dans la réponse à ses observations a fait valoir, non, sur le fondement dudit article, que ladite convention était fictive ou que la société en participation avait été instituée dans le seul but de déguiser un transfert de bénéfices, mais que cette convention était demeurée occulte, faute d'avoir été déclarée, et lui était par suite inopposable ;
Considérant, d'une part, qu'en se fondant, pour regarder ladite convention comme inopposable, non sur la seule circonstance qu'elle n'avait pas été soumise à la formalité de l'enregistrement, mais sur ce qu'elle n'avait pas davantage été déclarée à l'administration, la cour a jugé sans erreur de droit, et par une appréciation souveraine qui ne peut être discutée en cassation que si elle est entachée de dénaturation, que l'existence de la société en participation n'avait été révélée à l'administration par aucun de ses membres ;
Considérant, d'autre part, que l'administration pouvait légalement, sans invoquer même implicitement la procédure de répression de l'abus de droit prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, faire valoir que ladite convention, à laquelle les parties ont entendu conserver un caractère occulte, ne lui était pas opposable ;
Considérant, enfin, que c'est par suite sans erreur de droit que la cour a jugé que les bénéfices de cette société en participation occulte devaient être imposés, conformément aux dispositions des articles 206-4 et 218 du code général des impôts en vertu desquels dans les sociétés en participation dont les noms et adresses des associés n'ont pas été indiqués à l'administration, l'impôt sur les sociétés est établi au nom de l'associé ou du gérant connu des tiers, au nom de la société CIDAL, seule connue des tiers ; qu'en écartant le moyen tiré par la requérante de l'existence entre elle et la SA Trois Suisses France d'une société de fait dès lors que l'administration était en droit de s'en tenir à l'apparence créée par le contribuable, la cour n'a entaché son arrêt d'aucune contradiction de motifs ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant... notamment : 1°) Les frais généraux de toute nature... ; que lorsque le contribuable demande la déduction d'une charge, il doit pouvoir justifier, dans son principe comme dans son montant, de l'exactitude de l'écriture comptable retraçant l'opération contestée ;
Considérant que pour juger que l'administration avait à bon droit réintégré dans les résultats de la société requérante les sommes prises en compte par elle à la clôture des exercices en cause au titre de la répartition des résultats de la société en participation constituée entre elle et la SA Trois Suisses France, la cour s'est fondée sur ce que la requérante ne fournissait aucune justification de la réalité et du contenu du service qu'aurait constitué la mise à sa disposition par la SA Trois Suisses France, pour l'exploitation de la société en participation, d'éléments incorporels tels que son fichier-clients et de son savoir-faire, ni aucune facture correspondant à cette prestation ; qu'elle a ainsi fait une exacte application des dispositions précitées de l'article 39-1-1° du code général des impôts ; qu'en écartant les arguments, tirés notamment par la requérante des énonciations d'un arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy en date du 17 décembre 1998, selon lesquelles la SOCIETE EN NOM COLLECTIF CIDAL avait poursuivi son activité au cours de certains des exercices en cause sans moyens propres, en utilisant ceux que lui fournissait la SA Trois Suisses France, la cour n'a, en se prononçant sur le défaut de justification probante des prestations reçues et des charges supportées par elle, entaché son arrêt, lequel est suffisamment motivé, d'aucune inexactitude matérielle ;
Sur les conclusions de la SOCIETE EN NOM COLLECTIF CIDAL tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la SOCIETE EN NOM COLLECTIF CIDAL la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la SOCIETE EN NOM COLLECTIF CIDAL est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE EN NOM COLLECTIF CIDAL et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.