Vu la requête, enregistrée le 11 octobre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Michel X..., ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler sans renvoi l'ordonnance du 26 septembre 2001 par laquelle le magistrat délégué par le président de la cour administrative d'appel de Paris a annulé l'ordonnance du 11 juillet 2001 par laquelle le vice-président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'allocation d'une provision d'un montant de 943 327,95 F liée au refus du département des Yvelines de lui accorder la protection juridique prévue par les dispositions de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et a rejeté sa demande de provision ;
2°) de condamner le département des Yvelines à prendre en charge la protection juridique qui lui est due et, en conséquence, à lui verser une provision de 120 000 F sous astreinte de 1 000 F par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;
3°) de condamner le département des Yvelines à payer la somme de 30 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Robineau-Israël, Auditeur ;
- les observations de la SCP Tiffreau, avocat de M. X... et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du département des Yvelines,
- les conclusions de M. Austry, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que M. X..., directeur du bâtiment et du patrimoine du département des Yvelines, a été mis en examen en 1995 pour recel d'abus de biens sociaux, corruption passive, trafic d'influence et favoritisme, dans une affaire concernant des marchés publics conclus par le département ; qu'il a été placé pour ces faits en détention provisoire puis sous contrôle judiciaire jusqu'en 1999 ; que le conseil de discipline, saisi par le président du conseil général d'une proposition de révocation de l'intéressé, a décidé de surseoir à statuer en attendant l'issue de la procédure pénale, ce qui a conduit le président du conseil général à maintenir la suspension de M. X... prononcée en application de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 ; que, par une ordonnance en date du 11 juillet 2001, le vice-président du tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de M. X... tendant à l'allocation, au titre de la procédure de référé, d'une provision d'un montant de 943 327,95 F en attendant la réparation du préjudice lié, d'une part, aux pertes de rémunération subies par l'intéressé du fait de sa suspension qu'il estimait illégale et, d'autre part, au refus du département des Yvelines de lui accorder la protection juridique prévue par les dispositions de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 ; que, saisi d'un appel portant sur le rejet de la demande de provision en tant qu'elle concernait ce deuxième chef de préjudice, le magistrat délégué par le président de la cour administrative d'appel de Paris, après avoir annulé pour irrégularité l'ordonnance du 11 juillet 2001, a rejeté par une ordonnance du 26 septembre 2001 la demande de provision ; que M. X... se pourvoit en cassation contre cette ordonnance ;
Considérant qu'après avoir annulé, pour irrégularité, l'ordonnance du vice-président du tribunal administratif de Versailles, le magistrat délégué par le président de la cour administrative d'appel de Paris, évoquant l'affaire, a pu statuer sur l'ensemble des conclusions présentées au premier juge par M. X... dès lors qu'aucune de ces conclusions n'avait été expressément abandonnée par le requérant ; que le moyen tiré de ce qu'il aurait statué au-delà des conclusions dont il était saisi doit donc être écarté ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : "Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie" ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 relative aux droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction issue de la loi du 16 décembre 1996 : "La collectivité publique est tenue d'accorder sa protection au fonctionnaire ou à l'ancien fonctionnaire dans le cas où il a fait l'objet de poursuites pénales à l'occasion de faits qui n'ont pas le caractère d'une faute personnelle" ;
Considérant que, pour estimer que la condition énoncée par l'article R. 541-1 du code de justice administrative, qui impose l'existence d'une obligation non sérieusement contestable, n'était pas remplie, le magistrat délégué par le président de la cour administrative d'appel de Paris s'est fondé, d'une part, sur la gravité des faits à l'origine de la mise en examen de l'intéressé et de sa détention provisoire et, d'autre part, sur ce qu'il n'était pas établi que les fautes reprochées à M. X..., qui ont conduit le département des Yvelines à se porter partie civile devant le juge pénal, n'avaient aucun caractère personnel ;
Considérant que, pour rejeter la demande d'un fonctionnaire qui sollicite le bénéfice des dispositions de l'article 11 précité, l'autorité administrative peut, sous le contrôle du juge, exciper du caractère personnel de la ou des fautes qui ont conduit à l'engagement de la procédure pénale, sans attendre l'issue de cette dernière ou de la procédure disciplinaire ; qu'elle se prononce au vu des éléments dont elle dispose à la date de sa décision en se fondant, le cas échéant, sur ceux recueillis dans le cadre de la procédure pénale ; que, dès lors, le juge d'appel, qui n'a pas entendu faire irrégulièrement supporter la charge de la preuve de l'absence de faute personnelle à M. X..., n'a commis aucune erreur de droit en faisant référence à l'existence de fautes personnelles qui auraient pu être commises par l'intéressé, alors même que la matérialité des faits en cause n'avait pas été définitivement établie par le juge pénal et que, par ailleurs, la procédure disciplinaire avait été suspendue ;
Considérant qu'en déduisant des faits rappelés ci-dessus, qu'il a souverainement caractérisés sans les dénaturer, que la provision demandée par l'intéressé ne pouvait être regardée comme fondée sur une obligation non sérieusement contestable, le magistrat délégué par le président de la cour administrative d'appel de Paris n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée, qui n'avait pas à répondre au moyen, inopérant, tiré de ce que la décision administrative refusant la protection juridique sollicitée par l'intéressé serait entachée d'illégalité externe faute d'avoir été suffisamment motivée ;
Sur les conclusions aux fins d'astreinte :
Considérant que la présente décision n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions aux fins d'astreinte ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que le département des Yvelines, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Michel X..., au département des Yvelines et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.