Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Beverly X... épouse Y..., ; Mme X... épouse Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 14 mai 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 janvier 2002 du préfet de police décidant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Devys, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, dans sa rédaction en vigueur le 18 janvier 2002, date de l'arrêté du préfet de police décidant la reconduite à la frontière de Mme Y... : " Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière : 3° si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ... s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Y..., ressortissante de la République des Philippines, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après le 17 octobre 2001, date à laquelle elle a reçu notification de la décision du préfet de police du même jour lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; qu'ainsi, elle relevait du cas prévu par les dispositions précitées dans lequel le préfet de police peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant, en premier lieu, qu'au soutien de ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 18 janvier 2002, Mme Y... se prévaut de l'illégalité de la décision du 17 octobre 2001 ;
Considérant, d'une part, que la circulaire du ministre de l'intérieur du 24 juin 1997 relative au réexamen de la situation de certaines catégories d'étrangers en situation irrégulière ne présente pas un caractère réglementaire ; que, par suite, Mme Y... ne saurait utilement se prévaloir de ce que la décision du 17 octobre 2001 aurait été prise en méconnaissance de cette circulaire ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : à 7° A l'étranger ... qui n'entre pas dans les catégories ... qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ; que, si Mme Y... fait valoir qu'elle est entrée sur le territoire français en 1997 pour rejoindre son mari, également de nationalité philippine, entré en France la même année, que sa première fille, née en 1994, est scolarisée en France et que sa seconde fille est née en France en 2001, il ressort des pièces du dossier que M. Y... est lui-même en situation irrégulière ; que, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment de la durée et des conditions du séjour en France de l'intéressée, et alors que celle-ci n'établit pas être dans l'impossibilité de quitter la France avec son mari et ses enfants, le préfet de police, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a prononcé ce refus ; qu'ainsi, Mme Y... n'était pas en droit de bénéficier d'une carte de séjour temporaire en application des dispositions législatives précitées ;
Considérant qu'il suit de là que Mme Y... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision du 17 octobre 2001 ;
Considérant, en second lieu, que, comme il a été dit ci-dessus, l'arrêté décidant la reconduite à la frontière de Mme Y... ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale ; qu'ainsi, le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme Y... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet de police en date du 18 janvier 2002 ;
Article 1er : La requête de Mme Y... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Beverly X... épouse Y..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.