Vu la requête, enregistrée le 6 août 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'ISERE ; le PREFET DE L'ISERE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 13 juillet 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé ses arrêtés du 10 juillet 2001 décidant la reconduite à la frontière de M. Redha X..., fixant l'Algérie comme pays de destination, et plaçant l'intéressé en rétention administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Larrivé, Auditeur,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité de l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ... 2°) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire au delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation de visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... s'est maintenu dans de telles conditions sur le territoire et entre ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;
Considérant que M. X... est entré en France le 30 mars 2001 muni d'un visa de court séjour ; qu' à la suite de son interpellation par les services de police le 9 juillet 2001 il a fait l'objet le 10 juillet 2001 d'un arrêté de reconduite à la frontière ; que ce n'est que le lendemain 11 juillet qu'il a saisi par télécopie le PREFET DE L'ISERE d'une demande d'asile politique ;
Considérant que si M. X... soutient qu'il avait dès le début du mois de juillet 2001 entrepris des démarches pour solliciter une demande d'asile, qu'il a informé les services de police de cette intention le 10 juillet 2001, qu'il a retiré un dossier de demande d'asile auprès des services de la préfecture et qu'il produit une attestation établie par le collectif de soutien aux réfugiés politiques algériens indiquant qu'il était en instance de déposer une demande d'asile, ces circonstances ne permettaient pas de lui reconnaître la qualité de demandeur d'asile avant qu'il n'ait effectivement saisi le préfet de cette demande ; que, par suite, c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble s'est fondé, pour annuler l'arrêté attaqué, sur ce que M. X... avait, à la date de l'arrêté attaqué, la qualité de demandeur d'asile et devait être autorisé à séjourner en France jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés devant le Conseil d'Etat ;
Considérant que par un arrêté du 10 août 2000, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département, le PREFET DE L'ISERE a donné à M. Claude Y..., secrétaire général de la préfecture de l'Isère, délégation pour signer tout arrêté de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière, toute décision fixant le pays de renvoi et toute décision de rétention administrative ; que dès lors le moyen tiré de ce que les décisions attaquées auraient été signées par une autorité incompétente manque en fait ;
Considérant que les décisions attaquées énoncent les considérations de droit et de fait sur lesquelles elles se fondent ; qu'elles sont, par suite, suffisamment motivées ;
Considérant que la seule circonstance, à la supposer établie, que le préfet ait été informé du souhait de M. X... de déposer une demande d'asile ne suffit pas à établir qu'il n'aurait pas procédé à un examen suffisant de la situation de l'intéressé ;
Considérant que si M. X... soutient que le PREFET DE L'ISERE aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ordonnant sa reconduite à la frontière, il n'apporte pas, à l'appui de ses allégations, les éléments de droit et de fait permettant d'en apprécier la portée ;
Sur la légalité de la décision fixant l'Algérie comme pays de destination :
Considérant que si M. X... soutient qu'il sera exposé en cas de retour en Algérie à des traitements inhumains ou dégradants, il n'apporte, à l'appui de ses allégations, aucun élément de nature à établir la réalité des risques que comporterait pour lui son retour dans son pays d'origine ; qu'il n'est donc pas fondé à soutenir que la décision attaquée serait contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde et des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Isère est fondé à demander l'annulation du jugement du 13 juillet 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 10 juillet 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... et de la décision du même jour fixant l'Algérie comme pays de destination ;
Sur la légalité de l'arrêté décidant la rétention administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée :"Peut être maintenu, s'il y a nécessité, par décision écrite motivée du représentant de l'Etat dans le département, dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pendant le temps strictement nécessaire à son départ, l'étranger qui (.)3°(.) devant être reconduit à la frontière, ne peut quitter immédiatement le territoire français (.)" ; que pour annuler l'arrêté du 10 juillet 2001 plaçant M. X... en rétention administrative le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a considéré que l'arrêté attaqué ne précisait pas en quoi cette mesure était nécessaire au regard de la situation personnelle du requérant ; qu'il résulte cependant tant des motifs que du dispositif de la décision attaquée que LE PREFET DE L'ISERE a justifié la mesure par l'impossibilité de faire procéder sans délai à l'éloignement de M. X... en raison de l'absence de moyen de transports immédiatement disponible ; qu'il suit de là qu'en retenant ce motif pour justifier la mesure de rétention administrative de M. X..., le préfet de l'Isère a suffisamment motivé sa décision ;
Considérant qu'il résulte de qui précède que le PREFET DE L'ISERE est fondé à demander l'annulation du jugement du 13 juillet 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 10 juillet 2001 ordonnant le placement en rétention administrative de M. X... ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 13 juillet 2001 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Grenoble par M. X... est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE L'ISERE, à M. Redha X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.