Vu la requête, enregistrée le 17 décembre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 23 octobre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 20 juin 2001 décidant la reconduite à la frontière de Mme Ramata X ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Glaser, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Vallée, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, de nationalité ivoirienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 23 février 2001, de la décision du PREFET DE POLICE du même jour lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;
Considérant qu'à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, Mme X fait valoir qu'elle est en France depuis plus de dix ans et vit en concubinage avec M. Dable, ressortisant ivoirien en situation régulière, avec lequel elle a eu une fille née le 27 février 1999 ; que toutefois, si M. Dable a reconnu sa fille le 28 juin 1999, Mme X n'apporte aucun élément établissant la durée de son concubinage, l'existence d'une vie commune ou d'autres attaches familiales en France ; que, dans ces circonstances et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, cet arrêté n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que c'est, dès lors, à tort que, pour annuler l'arrêté attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce qu'il méconnaissait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par Mme X devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les documents produits par Mme X ne permettent pas de tenir pour établie sa présence en France depuis 1990 ; que notamment elle ne produit aucun document relatif aux années 1991 et 1993 à 1997 ; que, dès lors, en estimant que l'intéressée n'établissait pas sa présence habituelle en France depuis plus de dix ans, le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement du 23 octobre 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 20 juin 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement en date du 23 octobre 2001 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme X devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à Mme Ramata X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.