Vu la requête, enregistrée le 12 février 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) l'annulation du jugement du 23 octobre 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 21 février 2002 décidant la reconduite à la frontière de Mlle Y X... ;
2°) le rejet de la demande présentée par Mlle X... devant ce tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Denis-Linton, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêté (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle X..., de nationalité ivoirienne, s'est maintenue sur le territoire français après la notification, le 18 juillet 2001, de l'arrêté du 12 juillet 2001 du PREFET DE POLICE lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : 1° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire ;
Considérant que si Mlle X... allègue que l'affection oculaire évolutive dont elle souffre exige une surveillance régulière dans un milieu spécialisé et pour une durée indéterminée qui lui imposerait de rester en France, il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment du certificat médical du 22 août 2000 du médecin du centre hospitalier national des Quinze-Vingts qu'à la date de l'arrêté litigieux la perte d'acuité visuelle de l'intéressée due à des séquelles de toxoplasmose nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni qu'elle ne pouvait effectivement bénéficier d'un suivi médical approprié dans le pays de renvoi ; que dès lors c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de Mlle X... pour annuler l'arrêté du PREFET DE POLICE en date du 21 février 2002 ordonnant sa reconduite à la frontière ;
Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient Mlle X..., le médecin chef du service médical de la préfecture de police a pu émettre un avis sur son état de santé au seul vu de son dossier, sans la convoquer pour un examen, en l'absence de toute disposition législative et réglementaire contraire ; que, dès lors, le moyen tiré de l'illégalité de l'avis du médecin-chef par lequel le préfet ne s'est par ailleurs pas estimé lié pour prendre la décision de refus de séjour sur laquelle l'arrêté litigieux est fondé, doit être écarté ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, le PREFET DE POLICE n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur la situation personnelle de Mlle X... ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 21 février 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle X... ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que la présente décision qui rejette la demande de Mlle X... tendant à l'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressée tendant à ce qu'il soit enjoint au PREFET DE POLICE de lui délivrer un titre de séjour ne peuvent qu'être écartées ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 23 octobre 2002 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mlle X... devant le tribunal administratif de Paris et ses conclusions devant le Conseil d'Etat par la voie de l'appel incident sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE et à Mlle Y X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.