Vu la requête, enregistrée le 26 mars 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 30 janvier 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 14 mai 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Fethi X ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Courrèges, Auditeur,
- les conclusions de M. Devys, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité tunisienne, s'est maintenu dans de telles conditions sur le territoire français ; qu'il se trouvait ainsi dans un des cas où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que si, à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X fait valoir qu'il séjourne en France depuis novembre 1996 avec son épouse et qu'il est le père de deux enfants nés en juillet 1998 et juin 2001 sur le territoire, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est entré en France à l'âge de 28 ans, qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où résident ses parents et ses frères et soeurs, et que son épouse est elle-même en situation irrégulière et fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière ; que, dans ces conditions, et en l'absence de toute circonstance mettant les époux dans l'impossibilité d'emmener leurs enfants avec eux, l'arrêté du PREFET DE POLICE en date du 14 mai 2002 n'a pas porté au droit de M. X au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que c'est, dès lors, à tort que, pour annuler l'arrêté attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce motif ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le tribunal administratif de Paris et devant le Conseil d'Etat ;
Considérant, en premier lieu, que M. Jean-Pierre , sous-directeur de l'administration des étrangers de la direction de la police générale de la préfecture de police, qui a signé l'arrêté de reconduite contesté, bénéficiait d'une délégation du PREFET DE POLICE en date du 25 mars 2002 régulièrement publiée au bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 2 avril 2002 pour signer notamment les arrêtés de reconduite à la frontière en application de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que M. n'aurait pas été compétent pour signer l'arrêté de reconduite attaqué ne peut qu'être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins (...) ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que les enfants de M. X, nés en France, soient de nationalité française ; que, par suite, M X n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué serait contraire aux dispositions précitées ;
Considérant que si M. X fait valoir qu'il est bien intégré, cette seule circonstance ne suffit pas à établir qu'en prononçant sa reconduite à la frontière, le PREFET DE POLICE aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement du 30 janvier 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 14 mai 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que la présente décision, qui rejette la demande de M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement en date du 30 janvier 2003 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Paris et ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Fethi X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.