Vu la requête, enregistrée le 26 février 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 8 janvier 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 15 mai 2002 décidant la reconduite à la frontière de M. Rasathurai X en tant qu'il fixe le Sri-Lanka comme pays à destination duquel il doit être reconduit ;
2°) de rejeter les conclusions de la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Paris en tant qu'elles sont dirigées contre cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Burguburu, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Glaser, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par un jugement en date du 8 janvier 2003, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a, d'une part, rejeté les conclusions de M. X ressortissant sri-lankais, dirigées contre l'arrêté du 15 mai 2002 du PREFET DE POLICE ordonnant sa reconduite à la frontière, d'autre part, annulé la décision distincte contenue dans cet arrêté par laquelle ce préfet a fixé le Sri-Lanka comme pays de destination ; que le PREFET DE POLICE fait appel de ce jugement en tant qu'il annule la décision fixant le Sri-Lanka comme pays de destination de la reconduite de M. X ;
Considérant que le second alinéa de l'article 27 bis, ajouté à l'ordonnance du 2 novembre 1945 par la loi du 24 août 1993, dispose qu' un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; que ce dernier texte énonce que : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;
Considérant que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de prévenir un tel risque par une protection appropriée ;
Considérant que si M. X, d'origine tamoule, soutient qu'il serait exposé à des risques sérieux pour sa liberté, voire pour sa vie, en cas de retour au Sri-Lanka, pays dont il a la nationalité, en raison de ses liens familiaux avec des militants du mouvement de libération tamoul, et fait notamment valoir qu'un mandat d'arrêt aurait été lancé contre lui et que le mari de sa cousine, qui l'aurait hébergé à Colombo, aurait été arrêté, les pièces versées au dossier par l'intéressé, dont la demande d'admission au statut de réfugié a d'ailleurs été rejetée à deux reprises par l'office français de protection des réfugiés et apatrides et par la commission des recours des réfugiés, n'apportent pas d'éléments suffisamment précis à l'appui de ces allégations ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce motif pour annuler l'arrêté du PREFET DE POLICE du 15 mai 2002 en tant qu'il a désigné le Sri-Lanka comme pays de destination de la mesure de reconduite à la frontière prise à l'encontre de M. X ;
Considérant que M. X n'invoquait aucun autre moyen à l'encontre de la décision fixant le Sri-Lanka comme pays de destination ; que, dès lors, le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé cette décision ;
Sur les conclusions de M. X relatives aux frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. X demande au titre de ces dispositions ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 8 janvier 2003 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu'il a annulé l'arrêté du PREFET DE POLICE du 15 mai 2002 ordonnant la reconduite de M. X vers le Sri-Lanka ;
Article 2 : La demande de M. X présentée devant le tribunal administratif de Paris en ce qu'elle conteste la fixation du pays de destination de la mesure de reconduite à la frontière prise à son encontre est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Rasathurai X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.