Vu la requête, enregistrée le 1er décembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Fadila X... épouse Y, demeurant ... ; Mme X... épouse Y demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 28 octobre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 17 octobre 2003 du préfet de la Seine-Saint-Denis ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°)' de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. Francis Lamy, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (....) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (....) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X... épouse Y, de nationalité algérienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 7 avril 2003, de la décision du 3 avril 2003 du préfet de la Seine-Saint-Denis lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X... épouse Y était enceinte de son dernier enfant à la date de l'arrêté attaqué et que deux certificats médicaux attestent de ce que son état la plaçait dans l'impossibilité de voyager ; qu'ainsi, compte tenu des circonstances particulières de l'espèce, en ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X... épouse Y, le préfet de la Seine-Saint-Denis a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de l'intéressée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X... épouse Y est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 17 octobre 2003 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a ordonné sa reconduite à la frontière ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros sur les 1 000 euros que Mme X... épouse Y demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du 28 octobre 2003 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise et l'arrêté du 17 octobre 2003 du préfet de la Seine-Saint-Denis ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X... épouse Y sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à Mme X... épouse Y la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Fadila X... épouse Y, au préfet de la Seine-Saint-Denis et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.