Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 août et 5 décembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Hervé X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 22 novembre 2001 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 8 septembre 1998 par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 29 août 1994 par laquelle le jury du concours d'agent d'exploitation des travaux publics de l'Etat l'a radié de la liste complémentaire des candidats admis à ce concours ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 800 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 79-787 du 11 juillet 1979 ;
Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Pierre-Antoine Molina, Auditeur,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. X,
- les conclusions de Mme Anne-Françoise Roul, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'en application des dispositions de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 les décisions qui retirent ou abrogent des décisions créatrices de droits doivent être motivées ; qu'aux termes de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 applicable à la date de la décision attaquée : Sauf urgence ou circonstances exceptionnelles, sous réserve des nécessités de l'ordre public et de la conduite des relations internationales, et exception faite du cas où il est statué sur une demande présentée par l'intéressé lui-même, les décisions qui doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ne peuvent légalement intervenir qu'après que l'intéressé ait été mis à même de présenter ses observations écrites... ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le jury du concours d'agent d'exploitation des travaux publics de l'Etat ne pouvait, par sa décision du 29 juillet 1994, retirer la décision inscrivant M. X sur la liste complémentaire des candidats admis à ce concours, laquelle avait créé des droits au profit du requérant, sans mettre celui-ci à même de présenter des observations écrites ;
Considérant que, pour écarter le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 avaient été méconnues, la cour administrative d'appel de Bordeaux s'est bornée à relever que le requérant avait été invité à se présenter le 22 août 1994 dans les locaux de la direction départementale de l'équipement de la Martinique et que, ayant été informé par le directeur et le secrétaire général de cette direction départementale, respectivement président et membre du jury, qu'il était suspecté d'avoir fraudé à l'épreuve d'arithmétique, il avait refusé de refaire cette épreuve ; qu'ainsi, en ne recherchant ni si M. X avait été informé de la mesure que l'administration envisageait de prendre, ni s'il avait bénéficié d'un délai suffisant pour présenter des observations écrites, la cour administrative d'appel de Bordeaux a commis une erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à demander l'annulation de l'arrêt du 22 novembre 2001 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté son appel ;
Considérant que, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, l'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie que le Conseil d'Etat règle l'affaire au fond ;
Considérant que M. X qui, comme il a été dit ci-dessus, avait été informé le 22 août 1994 qu'il était suspecté d'avoir fraudé, ne pouvait ignorer que le jury lui retirerait le bénéfice de son admission sur la liste complémentaire s'il estimait la fraude établie ; qu'il a, en outre, dans les circonstances de l'espèce, bénéficié d'un délai suffisant pour présenter des observations écrites ; qu'ainsi les dispositions précitées de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 n'ont pas été méconnues ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la copie rédigée par le requérant pour l'épreuve d'arithmétique présentait avec celle de son frère, placé dans la même salle d'examen que lui, d'exactes similitudes dans l'énoncé des réponses, justes ou fausses ; que ces faits suffisent à établir l'existence d'une fraude dont le jury du concours a tiré les conséquences en retirant M. X de la liste des candidats admis sur la liste complémentaire ;
Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 8 septembre 1998, le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 29 août 1994, par laquelle le jury du concours d'agent des travaux publics de l'Etat l'a radié de la liste complémentaire des candidats admis à ce concours ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 2 800 euros au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 22 novembre 2001 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé.
Article 2 : La requête de M. X devant la cour administrative d'appel de Bordeaux et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Hervé X et au ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.