Vu la requête, enregistrée le 5 août 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SOCIETE CANAL 9, dont le siège est ... ; la SOCIETE CANAL 9 demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision en date du 4 mars 2003 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel a rejeté sa candidature en vue de l'exploitation d'un service de radiodiffusion sonore par voie hertzienne terrestre, dénommé Chante France, dans les zones de Meaux, Compiègne et Fontainebleau ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Carine Moreau-Soulay, Auditeur,
- les conclusions de M. Terry Olson, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que par une décision du 5 février 2002, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a procédé à un appel à candidatures partiel pour l'exploitation de services de radiodiffusion sonore par voie hertzienne terrestre en modulation de fréquence dans les zones de Chantilly, Compiègne, Meaux et Fontainebleau ; que par une décision du 4 mars 2003, il a rejeté la candidature présentée par la SOCIETE CANAL 9 pour les zones de Meaux, Compiègne et Fontainebleau ;
Sur la légalité externe de la décision attaquée :
Considérant qu'aux termes de l'article 32 de la loi du 30 septembre 1986 : (...) Les refus d'autorisation sont motivés et sont notifiés aux candidats dans un délai d'un mois après la publication prévue à l'alinéa précédent ; qu'il ressort des pièces du dossier que la lettre du président du Conseil supérieur de l'audiovisuel en date du 20 juin 2003 notifiant à la société requérante le rejet de sa candidature comporte en annexe des fiches énonçant, pour chacune des trois zones concernées, celui ou ceux des critères fixés à l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 dont il a été fait application, ainsi que les motifs de fait pour lesquels le Conseil supérieur de l'audiovisuel a préféré d'autres candidatures à celles de la SOCIETE CANAL 9 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le Conseil supérieur de l'audiovisuel, qui n'était pas tenu de se prononcer dans sa décision sur chacun des critères fixés par l'article 29 de la loi, se serait abstenu d'examiner la demande de la société requérante et d'apprécier chacune des candidatures qui lui étaient soumises au regard de l'ensemble de ces critères ; qu'ainsi le Conseil supérieur de l'audiovisuel a donné à sa décision une motivation suffisante au regard des exigences posées par l'article 32 de la loi du 30 septembre 1986 ;
Sur la légalité interne :
Considérant qu'aux termes des alinéas 8 et 9 de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 dans sa rédaction alors en vigueur : Le Conseil accorde les autorisations en appréciant l'intérêt de chaque projet pour le public, au regard des impératifs prioritaires que sont la sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socio-culturels, la diversification des opérateurs, et la nécessité d'éviter les abus de position dominante ainsi que les pratiques entravant le libre exercice de la concurrence./ Il tient également compte : (...) 2° du financement et des perspectives d'exploitation du service notamment en fonction des possibilités de partage des ressources publicitaires entre les entreprises de presse écrite et les services de communication audiovisuelle ;
Sur la zone de Compiègne :
Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'au nombre des motifs sur le fondement desquels le Conseil supérieur de l'audiovisuel accorde les autorisations d'usage de fréquences, figure le financement et les perspectives d'exploitation du service notamment en fonction des possibilités de partage des ressources publicitaires entre les entreprises de presse écrite et les services de communication audiovisuelle ; qu'ainsi en se fondant, pour écarter la candidature de la société requérante et retenir celle de Fun Radio, sur le critère des perspectives d'exploitation du service au regard des possibilités de partage des ressources publicitaires dans la zone de Compiègne entre les entreprises de presse écrite et les services de communication audiovisuelle, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a légalement fondé sa décision, alors même qu'un tel motif n'est pas au nombre de ceux qui sont regardés comme des impératifs prioritaires par l'article 29 précité ; que la SOCIETE CANAL 9 ne peut utilement soutenir devant le juge administratif que ce critère, qui figure dans la loi du 30 septembre 1986, méconnaîtrait la liberté de communication audiovisuelle garantie par la Constitution ; que si la SOCIETE CANAL 9 soutient que les radios de catégorie B et C émettant leur programme dans la zone de Compiègne ne diffusent pas de publicité locale et s'adressent à des annonceurs dont la clientèle dépasse largement la zone de Compiègne, celle-ci n'apporte au soutien de ses allégations aucune précision susceptible d'en justifier le bien-fondé ; qu'en motivant sa décision par le fait que la présence dans cette zone d'un cinquième service commercial local risquerait de compromettre la viabilité des opérateurs déjà présents qui ont accès aux ressources publicitaires locales, le Conseil supérieur de l'audiovisuel n'a pas entaché sa décision d'erreur d'appréciation ni méconnu les dispositions ci-dessus rappelées de la loi du 30 septembre 1986 ;
Sur la zone de Meaux :
Considérant qu'en ce qui concerne la zone de Meaux, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a écarté la candidature de la SOCIETE CANAL 9 éditant le programme Chante France au profit de celle de 77 FM, en se fondant sur les critères de sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socioculturels et de diversification des opérateurs prévus par l'article 29 précité de la loi du 30 septembre 1986 ; qu'en relevant que deux radios, dont les programmes sont principalement musicaux au même titre que celui proposé par le service Chante France, étaient déjà présentes à Meaux et qu'il n'existait en revanche ni radio associative, ni radio réalisant des programmes propres à cette zone, et en en déduisant que le service 77 FM , radio associative qui entend remplir une mission de communication sociale de proximité, répondait mieux à l'objectif de diversité des programmes et des opérateurs que celui proposé par Chante France, le Conseil supérieur de l'audiovisuel n'a pas fait une inexacte application de l'article 29 précité en privilégiant la présence d'un programme inédit dans la zone, ni entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;
Sur la zone de Fontainebleau :
Considérant qu'en ce qui concerne la zone de Fontainebleau, le Conseil supérieur de l'audiovisuel s'est fondé sur le critère de diversification des opérateurs, pour retenir la candidature d'Europe 1, radio généraliste, plutôt que celle de la SOCIETE CANAL 9, dont le programme est exclusivement consacré aux chansons francophones, au motif qu'aucun service généraliste n'était diffusé dans cette zone alors que les trois radios déjà présentes diffusaient des programmes principalement musicaux ; qu'en retenant un service dont le format n'était pas représenté dans la zone, il n'a entaché sa décision ni d'erreur de droit ni d'erreur d'appréciation, et n'a pas méconnu les dispositions de la loi du 30 septembre 1986 ; que compte tenu de la présence de trois autres services radiophoniques privés dans cette zone, le moyen tiré de ce que l'autorisation délivrée au service Europe 1, seule radio privée dans cette zone, serait contraire au principe de pluralisme de l'information, manque en fait ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE CANAL 9 n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 4 mars 2003 du Conseil supérieur de l'audiovisuel en tant qu'elle a rejeté sa candidature pour l'exploitation d'un service de radiodiffusion sonore par voie hertzienne terrestre dans les zones de Meaux, Compiègne et Fontainebleau ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : La requête de la SOCIETE CANAL 9 est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE CANAL 9, au Conseil supérieur de l'audiovisuel, au Premier ministre et au ministre de la culture et de la communication.