Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 mars et 8 juin 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE ARTECOM, dont le siège est ..., représentée par son président-directeur général en exercice ; le SOCIETE ARTECOM demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 4 décembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté son appel formé contre le jugement du 11 juin 2002 du tribunal administratif de Dijon la déboutant de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution complémentaire de 10 % auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1995, 1996 et 1997 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Paul Marie Falcone, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la SOCIETE ARTECOM,
- les conclusions de M. Laurent Vallée, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SOCIETE ARTECOM a souscrit une déclaration d'existence le 8 novembre 1993 ; qu'à cette date, son capital était détenu pour moitié par un de ses associés, M. X..., qui était également gérant de la SARL Siam ; que M. X... a cédé la totalité de ses parts le 30 décembre 1993 ; que cette société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période courant du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1997, à l'issue de laquelle le vérificateur lui a refusé le bénéfice du régime de faveur prévu par l'article 44 sexies du code général des impôts et sous lequel la société avait entendu se placer, au motif qu'elle ne satisfaisait pas à la condition fixée au II de cet article relative à l'absence de détention indirecte pour plus de 50 % du capital par une société tierce ; que la SOCIETE ARTECOM se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 14 décembre 2003 de la cour administrative d'appel de Lyon rejetant son appel dirigé contre le jugement du 11 juin 2002 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution complémentaire de 10 % auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1995, 1996 et 1997 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 44 sexies du code général des impôts dans sa rédaction en l'espèce applicable : I. Les entreprises créées à compter du 1er octobre 1988 soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition de leurs résultats et qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale au sens de l'article 34 sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés jusqu'au terme du vingt-troisième mois suivant celui de leur création (...).Les bénéfices ne sont soumis à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés que pour le quart, la moitié ou les trois quarts de leur montant selon qu'ils sont réalisés respectivement au cours de la première, de la seconde ou de la troisième période de douze mois suivant cette période d'exonération (...) II. Le capital des sociétés nouvelles ne doit pas être détenu, directement ou indirectement pour plus de 50 % par d'autres sociétés. / Pour l'application de l'alinéa précédent, le capital d'une société nouvelle est détenu indirectement par une autre société lorsque l'une au mois des conditions suivantes est remplie : - un associé exerce en droit ou en fait la fonction de gérant ou de président, directeur général, président du conseil de surveillance ou membre du directoire d'une autre société ; - un associé détient avec les membres de son foyer fiscal 25 % au moins des droits sociaux dans une autre entreprise ; - un associé exerce des fonctions dans une entreprise dont l'activité est similaire ou complémentaire à celle de l'entreprise nouvelle. III. Les entreprises créées dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activités préexistantes ou qui reprennent de telles activités ne peuvent pas bénéficier du régime défini au paragraphe I ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 44 sexies du code général des impôts que la condition prévue au II de cet article doit être remplie dès la création de l'entreprise ; que la date à laquelle une entreprise a été créée s'entend de celle à laquelle elle a effectivement commencé à exercer son activité ; qu'il suit de là qu'en estimant que la date de création de la SOCIETE ARTECOM s'entendait de celle à laquelle la société avait été constituée, sans égard à celle du début effectif de son activité, et en en déduisant que la société ne remplissait pas la condition fixée au II de l'article 44 sexies précité du code général des impôts, la cour administrative d'appel a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; que celui-ci doit, dès lors, être annulé ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu pour le Conseil d'Etat de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SOCIETE ARTECOM a eu recours avant le 30 décembre 1993, et dans l'attente de l'achèvement du bâtiment destiné à abriter sa production, à des sous-traitants pour satisfaire les premières commandes qu'elle avait reçues, et qu'elle a facturées avant cette date ; qu'en outre, elle a procédé à l'embauche de plusieurs salariés ; que dans ces conditions, elle doit être regardée comme ayant commencé à exercer son activité avant le 30 décembre 1993, date à laquelle M. X..., demeuré gérant de la SARL Siam, a cédé les parts qu'il détenait à hauteur de 50 % dans son capital ; que par suite, elle ne remplissait pas à la date à laquelle elle a effectivement commencé son activité la condition fixée au II de l'article 44 sexies du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE ARTECOM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 11 juin 2002, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande en décharge des impositions litigieuses ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la SOCIETE ARTECOM demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon en date du 4 décembre 2003 est annulé.
Article 2 : La requête présentée par la SOCIETE ARTECOM devant la cour administrative d'appel de Lyon est rejetée, ensemble ses conclusions devant le Conseil d'Etat tendant à ce que les frais exposés par elle et non compris dans les dépens soient mis à la charge de l'Etat.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE ARTECOM et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.