Vu le recours, présenté par le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE, enregistré le 26 novembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 23 septembre 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement en date du 11 juin 2003 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne annulant, à la demande de Mme Maria-Pia B, d'une part, l'arrêté du recteur de l'académie de Reims du 26 août 2002 prononçant la suspension de ses fonctions de professeur certifié de documentation à compter du 1er septembre 2002 et d'autre part, l'arrêté du recteur de l'académie de Reims du 31 décembre 2002 prononçant la suspension de ses fonctions de professeur certifié de documentation avec demi-traitement à compter du 1er janvier 2003 et a mis à la charge de l'Etat le versement à Mme B d'une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée ;
Vu le décret n° 72-581 du 4 juillet 1972 modifié notamment par le décret n° 99-101 du 11 février 1999 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Cyrille Pouplin, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Laurent Vallée, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que le recteur de l'académie de Reims a prononcé la suspension de Mme B, professeur certifié, par arrêté du 26 août 2002 à compter du 1er septembre 2002 puis par arrêté du 31 décembre 2002 avec demi-traitement à compter du 1er janvier 2003 ; que le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE se pourvoit en cassation contre l'arrêt en date du 23 septembre 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement en date du 11 juin 2003 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne annulant, à la demande de Mme B, ces deux arrêtés et a mis à la charge de l'Etat le versement à Mme B d'une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du recours ;
Considérant qu'aux termes de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit, sans délai, le conseil de discipline. / Le fonctionnaire suspendu conserve son traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement et les prestations familiales obligatoires. Sa situation doit être définitivement réglée dans le délai de quatre mois (...) ; qu'aux termes de l'article 67 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination (...). / (...) Le pouvoir de prononcer les sanctions du premier et du deuxième groupe peut être délégué indépendamment du pouvoir de nomination (...) et qu'aux termes de l'article 37 du décret du 4 juillet 1972 susvisé, dans sa rédaction applicable à la date des arrêtés prononçant la suspension de Mme B : Pour les professeurs certifiés affectés dans des établissements ou services placés sous l'autorité du recteur d'académie, les sanctions disciplinaires définies à l'article 66 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 sont prononcées, après consultation de la commission administrative paritaire académique siégeant en conseil de discipline, dans les conditions prévues à l'article 19 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 : / - par le recteur, s'agissant des sanctions des premier et deuxième groupes ; / - par le ministre chargé de l'éducation, s'agissant des sanctions des troisième et quatrième groupes (...) ;
Considérant que, si les dispositions de l'article 67 de la loi du 11 janvier 1984 prévoient la possibilité d'une délégation du pouvoir de prononcer les sanctions des premier et deuxième groupes, il ressort des termes de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 que cette délégation d'une partie du pouvoir disciplinaire entraîne nécessairement qu'aussi bien l'autorité délégataire que l'autorité délégante détiennent le pouvoir de suspendre les agents concernés ; que, par suite, les dispositions du décret du 4 juillet 1972 susvisé autorisent aussi bien les recteurs d'académie que le ministre chargé de l'éducation nationale à prononcer la suspension des membres du corps des professeurs certifiés ; que, dès lors, la cour administrative d'appel de Nancy a commis une erreur de droit en estimant que les arrêtés des 26 août et 31 décembre 2002 par lesquels le recteur de l'académie de Reims a prononcé la suspension de Mme B, professeur certifié, a été pris par une autorité incompétente ; que par suite, le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE est fondé à demander, dans la limite de ses conclusions, l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne s'est fondé sur l'incompétence de leur auteur pour annuler les arrêtés litigieux ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par Mme B ;
Considérant que la mesure de suspension est une mesure conservatoire prise dans l'intérêt du service et ne constitue pas une sanction disciplinaire ; qu'elle n'est ainsi pas au nombre des décisions qui doivent être motivées par application de l'article premier de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 susvisée n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier la portée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé les arrêtés des 26 août et 31 décembre 2002 ;
Sur les conclusions présentées par Mme B et tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à Mme B la somme qu'elle demande en appel au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt en date du 23 septembre 2004 de la cour administrative d'appel de Nancy est annulé en tant qu'il a rejeté l'appel du MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à Mme B sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 2 : Le jugement en date du 11 juin 2003 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est annulé.
Article 3 : Les demandes présentées par Mme B devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions de Mme B tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE et à Mme Maria-Pia B.