Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 janvier et 20 avril 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Paul B, demeurant ... ; M. B demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 22 novembre 2005 par laquelle la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins a réformé la décision du 15 novembre 2003 du conseil régional de l'ordre des médecins du Rhône-Alpes en lui infligeant la peine de l'interdiction d'exercice de la médecine durant trois mois, ainsi que la décision du 15 novembre 2003 ;
2°) statuant au fond, de rejeter la plainte adressée par les consorts C au conseil départemental de l'ordre des médecins du Rhône ;
3°) de mettre à la charge du conseil départemental de l'ordre des médecins du Rhône la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le décret n° 48-1671 du 26 octobre 1948 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Philippe Barbat, Auditeur,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. B, de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins et de la SCP Defrenois, Levis, avocat de M. C et autres,
- les conclusions de M. Yves Struillou, Commissaire du gouvernement ;
Sur l'intervention des consorts C :
Considérant que les consorts C sont à l'origine de la plainte déposée par le conseil départemental de l'ordre des médecins du Rhône devant le conseil régional de l'ordre des médecins de Rhône-Alpes ; que, s'ils n'ont pas, à ce titre, la qualité de partie aux instances disciplinaires de l'ordre des médecins, ils sont toutefois recevables à présenter une intervention en défense dès lors qu'ils ont intérêt au maintien de la sanction prononcée par la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins à l'encontre de M. B ; que le mémoire en défense qu'ils ont présenté devant le Conseil d'Etat doit être regardé comme une intervention ; que celle-ci est recevable ;
Sur les conclusions de la requête et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de celle-ci :
Considérant qu'aux termes de l'article 52 du code de déontologie médicale : Le médecin qui aura traité une personne pendant la maladie dont elle est décédée ne pourra profiter des dispositions entre vifs et testamentaires faites par celle-ci en sa faveur pendant le cours de cette maladie que dans les cas et conditions prévus par la loi. ; que la méconnaissance de cette disposition ne peut être reprochée à un médecin que si la cause du décès de la personne traitée est certaine ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en jugeant que M. B devait être sanctionné, sur le fondement de ces dispositions, pour avoir accepté d'être le légataire universel de Mlle Henriette G., alors même qu'il existait une incertitude sur la cause exacte du décès de celle-ci, la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins a commis une erreur de droit ; qu'ainsi, M. B est fondé à demander l'annulation de la décision attaquée ;
Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 821-2 du code de justice administrative : Lorsque l'affaire fait l'objet d'un second pourvoi en cassation, le Conseil d'Etat statue définitivement sur cette affaire ; qu'il y a lieu, pour le Conseil d'Etat, de statuer définitivement sur les conclusions de l'appel formé par M. B contre la décision du 15 novembre 2003 du conseil régional de l'ordre des médecins de Rhône-Alpes lui infligeant la sanction d'interdiction d'exercer la médecine pendant un an ;
Considérant que la cause du décès de Mlle Henriette G., qui, par acte notarié du 5 février 1997, a constitué M. B comme son légataire universel, ne résulte pas, de façon certaine, de l'instruction ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par M. B sur la plainte du conseil départemental de l'ordre des médecins du Rhône déposée à son encontre, que M. B est fondé à soutenir que c'est à tort que, par sa décision du 15 novembre 2003, le conseil régional de l'ordre des médecins de Rhône-Alpes, faisant droit à la plainte du conseil départemental de l'ordre des médecins du Rhône, lui a infligé la peine d'interdiction d'exercer la médecine pendant un an, pour méconnaissance de l'article 52 du code de déontologie médicale ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du conseil départemental de l'ordre des médecins du Rhône la somme de 3 500 euros que demande M. B au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant que les consorts C n'ont pas la qualité de partie dans la présente instance ; que, par suite, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'intervention des consorts C est admise.
Article 2 : La décision du 22 novembre 2005 de la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins et la décision du 15 novembre 2003 du conseil régional de l'ordre des médecins de Rhône-Alpes sont annulées.
Article 3 : La plainte du conseil départemental de l'ordre des médecins du Rhône contre M. B est rejetée.
Article 4 : Le conseil départemental de l'ordre des médecins du Rhône versera à M. B la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions des consorts C tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Paul B et au conseil départemental de l'ordre des médecins du Rhône.
Copie en sera adressée pour information au conseil national de l'ordre des médecins, à M. André C, à M. Georges C et à M. Roger C et au ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.