Vu le recours, enregistré le 5 janvier 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ; le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du 21 décembre 2006 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a, d'une part, suspendu la décision du 20 octobre 2006, par laquelle la demande de renouvellement de titre de séjour de M. Abdelkader A a été rejetée par le préfet de la Haute-Savoie, d'autre part, enjoint à ce dernier de délivrer à M. A, dans un délai de huit jours, une autorisation provisoire de séjour et de travail jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la demande au fond ;
2°) statuant comme juge des référés, de rejeter la demande de M. A ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Anne-Marie Artaud-Macari, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de M. A,
- les conclusions de Mme Emmanuelle Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que M. A, ressortissant tunisien, entré irrégulièrement en France en 1998, a bénéficié de mars 2003 à mars 2004 d'une carte de séjour temporaire sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en qualité de conjoint d'une ressortissante française, épousée en Tunisie en 2000 ; qu'il a ensuite bénéficié de récépissés de demande de titre pendant la durée d'instruction de sa demande de renouvellement de titre de séjour ; qu'un refus de renouvellement lui a été opposé le 20 octobre 2006 par le préfet de la Haute-Savoie pour rupture de la vie commune avec son épouse, en application du 2ème alinéa de l'article L. 313-12 du même code qui subordonne le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, au vu notamment, d'une part, de deux enquêtes de police faisant apparaître que l'épouse était repartie vivre dans le Nord chez sa mère alors que M. A demeurait à Cluses (Haute-Savoie) chez sa soeur, d'autre part, de l'ordonnance de non-conciliation en date du 5 septembre 2006 rendue par le tribunal d'Avesnes-sur-Helpe, faisant d'ailleurs suite à une première ordonnance de non-conciliation du 22 octobre 2002 qui, si elle avait été suivie d'une radiation le 28 mai 2003 faute de diligence des parties, avait alors ordonné la résidence séparée des époux ; que si le préfet de la Haute-Savoie a, en vertu de son pouvoir discrétionnaire, également examiné si la situation particulière de M. A pouvait justifier l'intervention d'une mesure gracieuse et dérogatoire en faveur de l'intéressé et qu'il a écarté cette éventualité par un motif surabondant, il n'a nullement entendu fonder sa décision sur l'appréciation des conséquences de la mesure sur la situation personnelle de l'intéressé, mais bien sur la seule circonstance que M. A ne remplissait plus la condition légale de vie commune avec son épouse française posée par les articles L. 313-11, 4°, et L. 313-12 ;
Considérant que le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a fait droit à la demande de suspension du refus de renouvellement du titre de séjour, en retenant comme de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision, le moyen tiré de l'appréciation manifestement erronée qu'aurait portée le préfet sur la situation personnelle du requérant, eu égard aux formations professionnelles suivies et à l'emploi stable occupé ; qu'en retenant ce motif, étranger au fondement légal de la décision, et en relevant cette seule circonstance, sans rapport avec la condition légale du renouvellement de titre de séjour, comme de nature à établir l'existence d'un moyen de nature à créer un doute sérieux sur sa légalité, sans s'interroger sur l'absence de vie commune entre les époux, le juge des référés a commis une erreur de droit ; que le ministre est, par suite, fondé à demander pour ce motif l'annulation de l'ordonnance du juge des référés du 21 décembre 2006 prononçant la suspension du refus de renouvellement, enjoignant au préfet de délivrer à M. A une autorisation provisoire de séjour et de travail dans un délai de 8 jours, et mettant à la charge de l'Etat une somme de 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de statuer au titre de la procédure de référés engagée ;
Considérant que ni le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée, ni celui tiré de ce que la procédure serait irrégulière faute de consultation de la commission du titre de séjour, ni ceux tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et de l'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de la mesure sur la situation personnelle de l'intéressé, ne sont de nature à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux sur la légalité de la décision ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est fondé à demander ni la suspension du refus de renouvellement de titre de séjour qui lui a été opposé le 20 octobre 2006 par le préfet de la Haute-Savoie, ni, par voie de conséquence, à ce qu'il soit fait injonction sous astreinte au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat tant la somme qu'il a demandée devant le juge des référés que celle qu'il demande devant le Conseil d'Etat en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Grenoble du 21 décembre 2006 est annulée.
Article 2 : La demande de M. A devant le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Abdelkader A et au MINISTRE DE L'IMMIGRATION, DE L'INTEGRATION, DE L'IDENTITE NATIONALE ET DU CODEVELOPPEMENT.