Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 septembre 2006 et 25 septembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SCI BLAISE PASCAL, dont le siège est 31, rue du Bocage à Bordeaux (33200) et M. Maxime B, demeurant Le Clos d'Alvaux avenue E. Mehul à Montpellier (34070) ; la SCI BLAISE PASCAL et M. B demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du 21 août 2006 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 7 juillet 2006 par lequel le maire de Bordeaux les a mis en demeure de cesser immédiatement les travaux effectués au 7, rue Blaise Pascal ;
2°) statuant au titre de la procédure de référé engagée, de suspendre l'arrêté du 7 juillet 2006 du maire de Bordeaux ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi n° 2000-321du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, et notamment son article 24 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Stéphane Hoynck, Auditeur,
- les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de la SCI BLAISE PASCAL et de M. B et de Me Odent, avocat de la commune de Bordeaux,
- les conclusions de M. Yann Aguila, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requérants se pourvoient contre l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux rejetant leur requête tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté en date du 7 juillet 2006, par lequel le maire de Bordeaux leur a prescrit d'interrompre des travaux effectués en méconnaissance du permis de construire qui leur avait été délivré le 31 mai 2005 ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) » ;
Considérant en premier lieu, qu'en application de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, il appartient au maire, avant d'ordonner une interruption de travaux sur le fondement de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme, de mettre les intéressés à même de présenter préalablement leurs observations écrites et, le cas échéant, sur leur demande, des observations orales ; qu'il ressort des pièces du dossier que le maire avait transmis par lettre, remise aux requérants le 23 juin 2006, le procès-verbal d'infraction à la législation sur le permis de construire ; que les requérants ont fait part de leurs observations par lettres en date des 25 et 29 juin, qu'ils ont été reçus par l'adjoint au maire délégué à l'urbanisme le 4 juillet, que l'arrêté prescrivant l'interruption des travaux a été signé le 7 juillet 2006 ; qu'en estimant, dans ces conditions, que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 n'était pas de nature à créer un doute sérieux, le juge des référés s'est livré a une appréciation souveraine des circonstances de l'espèce exempte d'erreur de droit et de dénaturation ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le permis de construire accordé par le maire autorisait un changement de destination d'un immeuble, la création d'un plancher et la construction d'une piscine ; que le procès-verbal d'infraction en date du 15 juin 2006 qui, comme le prévoit l'article L. 480-1, « fait foi jusqu'à preuve du contraire », a relevé le début de construction « d'un immeuble en parpaings (...) après démolition sans autorisation (...) et sans avoir obtenu le permis de construire correspondant » ; que si les requérants allèguent que les travaux entrepris avaient vocation à réparer et à réhabiliter l'existant et étaient conformes au permis de construire, le juge des référés n'a pas entaché son ordonnance de dénaturation en estimant, notamment au vu des photographies figurant au dossier, que ce moyen n'était pas de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de l'arrêté litigieux ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme : « Les infractions aux dispositions des titres 1er, II, III, IV et VI du présent livre sont constatées par tous officiers ou agents de police judiciaire ainsi que par tous les fonctionnaires et agents de l'Etat et des collectivités publiques commissionnés à cet effet par le maire ou le ministre chargé de l'urbanisme (...) » ; que l'article L. 480-4 dispose : « L'exécution de travaux ou l'utilisation du sol en méconnaissance des obligations imposées par les titres 1er, II, IV et VI du présent livre (...) est punie d'une amende (...) » ; que le troisième alinéa de l'article L. 480-2 est ainsi rédigé : « Dès qu'un procès-verbal relevant l'une des infractions prévues à l'article L. 480-4 a été dressé, le maire peut également, si l'autorité judiciaire ne s'est pas encore prononcée, ordonner par arrêté motivé l'interruption des travaux. Copie de cet arrêté est transmise sans délai au ministère public » ; que s'il résulte de la combinaison de ces dispositions que les infractions au permis de démolir, dont le régime est régi par le titre III du livre IV du code de l'urbanisme, ne sont pas au nombre de celles qui fondent le pouvoir du maire d'ordonner l'interruption des travaux, il ressort en l'espèce des pièces du dossier soumis au juge des référés que l'arrêté du maire en date du 7 juillet 2006 s'est fondé sur le constat d'une infraction à la législation sur le permis de construire pour prescrire l'interruption des travaux et non sur le constat d'une infraction à la législation sur le permis de démolir ; qu'ainsi le juge des référés n'a pas entaché son ordonnance d'erreur de droit en estimant que n'était pas de nature à créer un doute sérieux le moyen tiré de ce que le maire se serait fondé à tort sur l'absence d'un permis de démolir pour prendre l'arrêté litigieux en application de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme ;
Considérant en dernier lieu, qu'en estimant que n'était pas de nature à créer un doute sérieux le moyen tiré de ce que, le permis de construire du 31 mais 2005 étant illégal dès lors que le projet nécessitait une démolition, le maire aurait commis un détournement de pouvoir en prenant l'arrêté d'interruption litigieux, le juge des référés n'a pas commis d'erreur de droit ni dénaturé les pièces qui lui étaient soumises ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCI BLAISE PASCAL et M. B ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux en date du 21 août 2006 ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demandent la SCI BLAISE PASCAL et M. B ; que l'arrêté objet du litige a été pris par le maire de Bordeaux agisssant au nom de l'Etat ; qu'ainsi, et alors même qu'elle a présenté des observations dans le cadre du présent pourvoi, la ville de Bordeaux n'est pas partie à l'instance au sens de l'article L. 761-1 ; que ses conclusions tendant à l'application de ces dispositions ne peuvent en conséquence qu'être rejetées.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la SCI BLAISE PASCAL et de M. B est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la ville de Bordeaux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SCI BLAISE PASCAL, à M. Maxime B, à la ville de Bordeaux et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.