Vu le recours et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 avril et 15 juin 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler les articles 2 et 3 de l'arrêt du 24 février 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, faisant partiellement droit à l'appel de M. Robert A, a d'une part annulé le jugement du 21 novembre 2002 du tribunal administratif de Montpellier ayant rejeté la demande de l'intéressé tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1983 et 1984, d'autre part prononcé la décharge des impositions litigieuses ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. A ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Fabienne Lambolez, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Choucroy, Gadiou, Chevallier, avocat de M. Robert A,
- les conclusions de Mlle Célia Verot, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : « 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, (...) notamment : / (...)5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice et figurent au relevé des provisions prévu à l'article 54. (...) » ; qu'aux termes du 2 bis de l'article 38 du même code dans sa rédaction applicable aux années 1983 et 1984 : « (...) les produits correspondant à des créances sur la clientèle ou à des versements reçus à l'avance en paiement du prix sont rattachés à l'exercice au cours duquel intervient la livraison des biens pour les ventes ou opérations assimilées et l'achèvement des prestations pour les fournitures de services. / Toutefois, ces produits doivent être pris en compte : /- pour les prestations continues rémunérées notamment par des intérêts ou des loyers et pour les prestations discontinues mais à échéances successives échelonnées sur plusieurs exercices, au fur et à mesure de l'exécution ; (...) » ;
Considérant que les juges du fond n'ont pas dénaturé les pièces du dossier, notamment les lettres de la société Mutuelle parisienne de garantie à M. A en date des 21 octobre et 29 décembre 1981, en retenant que l'activité professionnelle de M. A, courtier spécialisé dans l'assurance des professionnels de la construction et du bâtiment, consistait non seulement à effectuer des prestations d'entremise, mais également à assurer, pour le compte et par délégation de la société Mutuelle parisienne de garantie, la gestion des dossiers de sinistres, y compris le règlement des indemnisations ;
Considérant que si la cour administrative d'appel de Marseille, après avoir cité les dispositions du 2 bis de l'article 38 du code général des impôts, s'est référée au 2 de l'article 38 du même code, cette erreur purement matérielle de numérotation est sans incidence sur la régularité de l'arrêt attaqué ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, dans l'exercice de l'activité de gestion des dossiers de sinistres, M. A était chargé non seulement de la tenue administrative des dossiers des assurés victimes de sinistres mais aussi du règlement des indemnisations destinées à couvrir les dommages d'un montant inférieur à un plafond déterminé ; qu'à ce titre, il supportait lui-même la charge du règlement des indemnisations d'un montant inférieur à 30 000 francs ; que, si M. A percevait de la société Mutuelle parisienne de garantie puis des sociétés lui ayant succédé, en une seule fois, une rémunération commune à son activité d'entremise et à son activité de gestion des sinistres, il était tenu, à raison de la nature des contrats d'assurance souscrits dont il assurait le suivi, à une obligation contractuelle de longue durée envers la société Mutuelle parisienne de garantie puis les sociétés lui ayant succédé ; que, par suite, la cour n'a pas commis d'erreur dans la qualification juridique des faits en retenant que cette activité de gestion de sinistres constituait une prestation continue, nonobstant la circonstance que M. A n'était tenu à aucune obligation contractuelle envers les assurés eux-mêmes ; qu'elle a pu à bon droit en déduire, par une exacte application du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, que le contribuable pouvait, dès lors qu'il était probable qu'il aurait à supporter, au cours de la période restant à courir de la durée d'un contrat d'assurances, les charges de gestion d'un sinistre couvert par ce contrat, constituer à la clôture de chaque exercice une provision en vue de faire face à ces charges, dans la limite des produits leur correspondant comptabilisés à cette date dans des conditions non remises en cause par l'administration au regard du 2 bis de l'article 38 du code ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille en date du 24 février 2005 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le paiement à M. A de la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera la somme de 2 000 euros à M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE et à M. Robert A.