Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 30 novembre 2007 et 15 février 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Philippe A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 27 septembre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a, d'une part, annulé le jugement du 5 octobre 2006 du tribunal administratif de Besançon annulant la décision du 3 juin 2004 du directeur du centre hospitalier universitaire de Besançon rejetant sa demande tendant au paiement de plages additionnelles de travail effectuées en 2003 et condamnant le centre hospitalier universitaire de Besançon à payer à l'intéressé une somme de 8125 euros augmentée des intérêts et a, d'autre part, rejeté sa demande présentée devant le tribunal administratif de Besançon ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du centre hospitalier universitaire de Besançon ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Besançon la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le décret n° 84-131 du 24 février 1984 et l'arrêté interministériel du 30 avril 2003 pris pour son application ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean de L'Hermite, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat M. A et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du centre hospitalier universitaire de Besançon,
- les conclusions de Mme Catherine de Salins, Rapporteur public,
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat M. A et à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du centre hospitalier universitaire de Besançon ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A, praticien hospitalier au centre hospitalier universitaire de Besançon, a saisi le directeur de cet établissement d'une demande tendant à ce que le montant des indemnités auxquelles il estimait avoir droit au titre des périodes de travail additionnelles à son temps de travail réglementaire et des périodes de travail effectuées la nuit, le samedi après-midi, le dimanche et les jours fériés soit réévalué et à ce qu'une somme de 8 125 euros lui soit versée à ce titre ; que par une décision du 3 juin 2004, le directeur du centre hospitalier a rejeté sa demande ; que M. A a demandé au tribunal administratif de Besançon l'annulation de cette décision ; que par un jugement du 5 octobre 2006, le tribunal a fait droit à la demande de M. A ; que par un arrêt du 27 septembre 2007, la cour administrative d'appel de Nancy, statuant sur l'appel du centre hospitalier universitaire de Besançon, a annulé ce jugement et rejeté la demande de M. A présentée devant le tribunal ; que M. A se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;
Considérant qu'aux termes de l'article 30 du décret du 24 février 1984 portant statut des praticiens hospitaliers, alors en vigueur : Le service hebdomadaire est fixé à dix demi-journées, sans que la durée de travail puisse excéder quarante-huit heures par semaine, cette durée étant calculée en moyenne sur une période de quatre mois. Lorsqu'il est effectué la nuit, celle-ci est comptée pour deux demi-journées / (...) Le praticien peut accomplir, sur la base du volontariat au-delà de ses obligations de service hebdomadaires, un temps de travail additionnel donnant lieu soit à récupération, soit à indemnisation, dans les conditions prévues aux articles 28 et 29 (...) ; qu'aux termes de l'article 29 : Afin d'assurer la continuité des soins, l'organisation du temps de présence médicale (...) établie en fonction des caractéristiques propres aux différents services ou départements est arrêtée annuellement par le directeur d'établissement après avis de la commission médicale d'établissement. Un tableau de service nominatif, établi sur cette base, est arrêté mensuellement par le directeur sur proposition du chef de service ou de département et qu'aux termes de l'article 28 : Les praticiens perçoivent après service fait : / (...) 2° Des indemnités de sujétion correspondant au temps de travail effectué, dans le cadre des obligations de service hebdomadaires, la nuit, le samedi après-midi, le dimanche et les jours fériés / 3° Des indemnités forfaitaires pour tout temps de travail additionnel accompli, sur la base du volontariat, au-delà des obligations de service hebdomadaires (...) / Les montants et modalités de versement des indemnités mentionnées aux 2°, 3° (...) sont fixés par arrêté des ministres chargés du budget, de la sécurité sociale et de la santé (...) et qu'aux termes de l'article 21 de l'arrêté interministériel du 30 avril 2003 : (...) Les montants dus au titre des indemnités de sujétion (...) sont versés mensuellement après constatation du nombre de nuits, samedis après-midi, dimanches et jours fériés travaillés. / Les montants dus au titre des indemnités pour temps de travail additionnel sont versés au terme de chaque quadrimestre, après déduction, le cas échéant, des indemnités de sujétion déjà versées pour les mêmes périodes de travail ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions d'une part que, lorsqu'un praticien hospitalier a effectué un travail la nuit, le samedi après-midi, le dimanche ou un jour férié, au-delà de ses obligations de service hebdomadaires, il a droit, non pas à l'indemnité de sujétion prévue par le 2° de l'article 28 du décret du 24 février 1984 mais à l'indemnité forfaitaire pour temps de travail additionnel prévue par le 3° de cet article et d'autre part, que, lorsque l'hôpital a rémunéré un tel travail par une indemnité de sujétion, il doit verser au praticien hospitalier la différence entre le montant de l'indemnité forfaitaire pour temps de travail additionnel et l'indemnité de sujétion, ces deux indemnités n'étant pas cumulables pour une même période de travail ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en jugeant que le centre hospitalier universitaire de Besançon n'avait pas méconnu ces dispositions en déterminant les modalités selon lesquelles ses périodes de travail seraient réparties entre le service hebdomadaire et le temps de travail additionnel et en prévoyant que, lorsque, à l'issue d'une période de quatre mois, il apparaîtrait que des périodes fixées comme du temps de travail additionnel effectué la nuit, le samedi après-midi, le dimanche ou les jours fériés avaient été rémunérées par des indemnités de sujétion, le praticien recevrait alors la différence entre le montant de l'indemnité forfaitaire pour temps de travail additionnel qui lui était due et celui de l'indemnité de sujétion qui lui avait déjà été versée, la cour administrative d'appel de Nancy n'a pas commis d'erreur de droit ;
Considérant toutefois qu'aux termes de l'article 30 du décret du 24 février 1984, alors en vigueur, les praticiens hospitaliers bénéficient d'un repos quotidien d'une durée minimale de onze heures consécutives par période de vingt-quatre heures ; que par dérogation à ces dispositions, le même article prévoit qu'ils peuvent accomplir une durée de travail continue maximale de vingt-quatre heures et que, dans ce cas, ils bénéficient, immédiatement à l'issue de cette période, d'un repos d'une durée équivalente ; qu'alors même que la méconnaissance de ces obligations réglementaires relatives au repos, au respect desquelles il incombe aux autorités hospitalières de veiller, constitue une irrégularité susceptible d'engager la responsabilité du service public hospitalier à raison des préjudices dont elle serait la cause, il n'en résulte pas moins que, lorsque le service a été organisé de telle manière qu'une garde puisse être immédiatement suivie d'un temps de travail additionnel, les praticiens placés dans cette situation tiennent des dispositions de l'article 4 de l'arrêté du 30 avril 2003 le droit de choisir entre l'indemnisation, la récupération ou l'inscription de la période de travail concernée au compte épargne-temps ; qu'ainsi, en jugeant que l'autorité administrative avait pu légalement décider que le travail au lendemain d'une garde ne donnerait pas lieu au paiement de l'indemnité additionnelle mais ferait toujours l'objet d'une récupération, la cour administrative d'appel a entaché son arrêt d'erreur de droit ; que par suite, M. A est fondé à en demander l'annulation en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à ce que le centre hospitalier universitaire de Besançon soit condamné à lui payer les sommes correspondant aux périodes travaillées dans ces conditions ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Besançon la somme que demande M. A au titre des frais exposés par lui devant le Conseil d'Etat ; qu'il n'y a pas lieu non plus de mettre à la charge de M. A, la somme que demande le centre hospitalier universitaire de Besançon au titre des frais exposés par lui devant le Conseil d'Etat ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy en date du 27 septembre 2007 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de la requête de M. A tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Besançon à rémunérer les périodes de travail effectuées au-delà des périodes maximales de travail continu de onze ou vingt-quatre heures prévues par les dispositions de l'article 30 du décret du 24 février 1984 portant statut des praticiens hospitaliers.
Article 2 : L'affaire est renvoyée dans cette mesure à la cour administrative d'appel de Nancy.
Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi de M. A et les conclusions du centre hospitalier universitaire de Besançon présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Philippe A et au centre hospitalier universitaire de Besançon.
Copie pour information en sera adressée au président de la cour administrative d'appel de Nancy et à la ministre de la santé et des sports.