Vu le pourvoi, enregistré le 28 août 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES, DE LA FAMILLE ET DE LA SOLIDARITE ; le MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES, DE LA FAMILLE ET DE LA SOLIDARITE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 26 juin 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté la requête de la société Confection de Saint-Oradoux tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 22 juin 2006 du tribunal administratif de Limoges annulant, à la demande de Mme Zora A, la décision du 15 avril 2004 de l'inspecteur du travail de la Creuse autorisant son licenciement, et, d'autre part, au rejet de la demande de Mme A ;
2°) réglant l'affaire au fond de rejeter la demande de première instance de Mme A ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Gaëlle Dumortier, Maître des Requêtes ;
- les conclusions de M. Yves Struillou, rapporteur public ;
Considérant que, par décision en date du 15 avril 2004, l'inspecteur du travail de la Creuse a autorisé le licenciement par la société Confection de Saint-Oradoux de Mme A, salariée protégée ; que, saisi par cette dernière, le tribunal administratif de Limoges a annulé la décision de l'inspecteur du travail, par un jugement du 22 juin 2006, confirmé par la cour administrative d'appel de Bordeaux par un arrêt en date du 26 juin 2008, contre lequel le MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES, DE LA FAMILLE ET DE LA SOLIDARITE se pourvoit en cassation ;
Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives ou candidats à ces fonctions bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés de l'entreprise, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou visées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ou auquel il a postulé ; qu'à l'effet de concourir à la mise en oeuvre de la protection ainsi instituée, l'article R. 436-4 du code du travail dans sa rédaction applicable à l'espèce dispose que l'inspecteur du travail saisi d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat ;
Considérant que, si le caractère contradictoire de l'enquête, menée par l'inspecteur du travail conformément aux dispositions précitées de l'article R. 436-4, impose à l'autorité administrative d'informer le salarié concerné, de façon suffisamment circonstanciée, des agissements qui lui sont reprochés à l'appui de la demande d'autorisation de licenciement, et de le mettre à même de prendre connaissance de l'ensemble des pièces produites par l'employeur à l'appui de sa demande, notamment des témoignages et attestations, afin de lui permettre de répondre aux motifs et aux arguments avancés par l'employeur et ainsi d'assurer utilement sa défense, il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire ni d'aucun principe que, lorsque la convocation du salarié à l'enquête et notamment à l'audition personnelle et individuelle du salarié par l'inspecteur du travail est assurée par le moyen d'une lettre recommandée avec accusé de réception, celle-ci doive énoncer les griefs dont il fait l'objet et dont il a déjà pris connaissance au cours de l'entretien préalable avec l'employeur prévu par l'article L. 122-14 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES, DE LA FAMILLE ET DE LA SOLIDARITE est fondé à soutenir que la cour administrative d'appel de Bordeaux, en jugeant que l'absence, dans la lettre de convocation, de la mention des griefs retenus contre Mme A ne permettait pas à celle-ci de connaître de façon circonstanciée les agissements qui lui étaient reprochés et que, par suite, elle n'avait pu utilement présenter sa défense, a commis une erreur de droit et à demander, sur ce fondement, l'annulation de son arrêt ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 26 juin 2008 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Zora A, à la société Confection de Saint-Oradoux, au président de la cour administrative d'appel de Bordeaux et au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.