Vu, 1°) sous le numéro 311820, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 décembre 2007 et 19 mars 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Christophe A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 18 octobre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a annulé le jugement du 22 juin 2006 du tribunal administratif de Lille annulant la décision du 23 octobre 2003 du préfet du Pas-de-Calais autorisant M. Bertrand C à exploiter une superficie supplémentaire de 3 hectares 66 ares de terres sises à Laventie et à la Gorgue ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête de M. C devant la cour administrative d'appel de Douai ;
3°) de mettre à la charge de M. C la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu, 2°), sous le numéro 311821, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 décembre 2007 et 19 mars 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Christophe A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 18 octobre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a annulé le jugement du 22 juin 2006 du tribunal administratif de Lille annulant la décision du 23 octobre 2003 du préfet du Pas-de-Calais autorisant l'EARL SYS Laurent à exploiter une superficie supplémentaire de 2 hectares 61 ares de terres sises à Laventie ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête de l'EARL SYS Laurent devant la cour administrative d'appel de Douai ;
3°) de mettre à la charge de l'EARL SYS Laurent la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code rural ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean de L'Hermite, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. A et de la SCP Peignot, Garreau, avocat de M. C et de la EARL SYS Laurent,
- les conclusions de Mme Catherine de Salins, rapporteur public,
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. A et à la SCP Peignot, Garreau, avocat de M. C et de la EARL SYS Laurent ;
Considérant que les pourvois susvisés présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. C et l'EARL SYS Laurent ont déposé chacun une demande d'autorisation d'exploiter des terres agricoles portant sur les mêmes parcelles situées à Laventie (Pas-de-Calais) ; que, trois jours avant la date prévue pour l'examen de ces demandes par la commission départementale d'aménagement foncier, M. A, exploitant agricole à Laventie, associé avec des membres de sa famille au sein du groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) de l'Epinette, a informé le préfet que le groupement souhaitait également exploiter ces parcelles ; que, par deux décisions du 23 octobre 2003, le préfet du Pas-de-Calais a fait droit aux demandes de M. C et de l'EARL SYS Laurent ; que M. A a contesté ces décisions devant le tribunal administratif de Lille qui en a prononcé l'annulation par deux jugements en date du 22 juin 2006 ; que par deux arrêts du 18 octobre 2007, la cour administrative d'appel de Douai a fait droit à l'appel de M. C et de l'EARL SYS Laurent, annulé ces jugements et rejeté les demandes présentées par M. A devant le tribunal administratif de Lille ; que M. A se pourvoit en cassation contre ces arrêts ;
Considérant que la circonstance qu'à la suite de l'annulation par le tribunal administratif des autorisations délivrées le 23 octobre 2003, le préfet du Pas-de-Calais, statuant sur de nouvelles demandes de M. C et de l'EARL SYS Laurent, leur a accordé de nouvelles autorisations d'exploiter, qui, d'ailleurs ne sont pas devenues définitives, ne prive, en tout état de cause, pas d'objet le pourvoi de M. A ;
Considérant que M. A, qui se prévalait de sa qualité d'associé du GAEC de l'Epinette, appelé à participer à la mise en valeur des terres litigieuses si elles étaient reprises par ce groupement, justifiait à ce titre d'un intérêt personnel lui donnant qualité pour déférer au juge de l'excès de pouvoir les autorisations délivrées à d'autres exploitants ; qu'en jugeant que ses recours étaient irrecevables, faute d'intérêt pour agir, dès lors que le préfet avait été saisi d'une demande d'autorisation présentée par le GAEC et non par M. A en son nom propre, la cour administrative d'appel de Douai a entaché ses arrêts d'une erreur de qualification juridique qui en justifie l'annulation ;
Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond et de statuer sur les requêtes de M. C et de l'EARL SYS Laurent devant la cour administrative d'appel de Douai ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la fin de non-recevoir soulevée par M. C et l'EARL SYS Laurent et tirée de ce que M. A ne justifierait pas d'un intérêt personnel, lui donnant qualité pour agir à l'encontre des décisions qu'il attaque, doit être écartée ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-3 du code rural, dans sa rédaction applicable à la date des décisions litigieuses : " L'autorité administrative, après avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture, se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment : 1º Observer l'ordre des priorités établi par le schéma départemental ... " ; qu'aux termes de l'article R. 331-5 du même code, dans sa rédaction applicable à la même date : " Le préfet dispose de quatre mois, à compter de la date d'enregistrement du dossier, pour consulter la commission départementale d'orientation de l'agriculture et statuer sur la demande. Toutefois, il peut, par décision motivée, prolonger ce délai jusqu'à six mois, à compter de la même date, si cela est nécessaire pour s'assurer que toutes les possibilités d'installation ont été considérées, que les candidatures prioritaires éventuelles ont pu être recensées et en cas de consultation du préfet d'un autre département. Il en avise les intéressés dans les trois mois de l'enregistrement de leur dossier " ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que le préfet du Pas-de-Calais, qui avait été saisi le 21 octobre 2003 d'une demande d'autorisation d'exploiter émanant du GAEC de l'Epinette, a refusé d'en tenir compte lors de l'examen des demandes présentées par M. C et l'EARL SYS Laurent, en raison de son caractère incomplet et de la circonstance qu'elle n'avait été présentée que trois jours avant la date à laquelle la commission départementale d'orientation de l'agriculture était appelée à examiner ces demandes ;
Considérant, toutefois, que les demandes de M. C et de l'EARL SYS Laurent avaient été enregistrées le 11 septembre 2003 par les services de la préfecture du Pas-de-Calais ; qu'en application des dispositions précitées de l'article R. 331-5 du code rural, le délai dont disposait le préfet pour statuer sur ces demandes courait normalement jusqu'au 11 janvier 2004 et pouvait être prolongé jusqu'au 11 mars 2004 si cela s'avérait nécessaire pour s'assurer que toutes les possibilités d'installation avaient été considérées et que les candidatures prioritaires éventuelles avaient pu être recensées ; que dans ces conditions, le préfet n'a pu, sans méconnaître les dispositions précitées, se fonder sur la date à laquelle la demande du GAEC de l'Epinette lui était parvenue et sur le fait qu'elle n'était pas accompagnée de toutes les pièces requises pour refuser d'en tenir compte afin de déterminer si les demandes de M. C et de l'EARL SYS Laurent pouvaient être satisfaites au regard de l'ordre des priorités prévu par le schéma directeur des structures agricoles ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C et l'EARL SYS Laurent ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé les décisions du préfet du Pas-de-Calais en date du 23 octobre 2003 faisant droit à leur demande d'autorisation d'exploiter des terres agricoles et rejetant les demandes concurrentes présentées par le GAEC de l'Epinette ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. C et de l'EARL SYS Laurent la somme de 1 500 euros chacun au titre des frais exposés par M. A devant le Conseil d'Etat et la cour administrative d'appel de Douai ; que ces dispositions font obstacle à ce que soient mises à la charge de M. A, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que demandent M. C et l'EARL SYS Laurent au titre des frais exposés par eux devant le Conseil d'Etat et la cour administrative d'appel de Douai et la somme que demande le ministre de l'agriculture au titre des frais exposés par l'Etat devant la cour administrative d'appel de Douai ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les arrêts n° DA01264 et DA01265 de la cour administrative d'appel de Douai en date du 18 octobre 2007 sont annulés.
Article 2 : Les requêtes présentées par M. C et de l'EARL SYS-Laurent devant la cour administrative d'appel de Douai et leurs conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions du ministre de l'agriculture et de la pêche présentées devant la cour administrative de Douai et tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : L'EARL SYS Laurent et M. C verseront chacun la somme de 1 500 euros à M. A en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Christophe A, à M. Bertrand C, à l'EARL SYS Laurent et au ministre de l'agriculture et de la pêche.