Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 septembre et 4 décembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES, dont le siège est 92 avenue de Paris à Versailles (78014 Cedex) ; la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 4 juillet 2007 par laquelle la section des assurances sociales du Conseil national de l'ordre des pharmaciens a annulé, sur appel de Mme K... A-B, la décision du 10 avril 2006 de la section des assurances sociales du conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'Ile-de-France prononçant à son encontre la sanction d'interdiction de servir des prestations aux assurés sociaux pour une durée de 20 ans et a relaxé Mme A-B des fins de poursuite ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de Mme A-B ;
3°) de mettre à la charge de Mme A-B la somme de 3 050 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique, modifié notamment par l'ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996 ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Philippe Ranquet, Auditeur,
- les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES, de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat du Conseil national de l'ordre des pharmaciens et de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de Mme A-B,
- les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat du Conseil national de l'ordre des pharmaciens et à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de Mme A-B ;
Considérant que la section des assurances sociales du conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'Ile-de-France, saisie d'une plainte de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES et statuant sur le fondement des dispositions des articles R. 145-1 et suivants du code de la sécurité sociale relatives au contentieux du contrôle technique des pharmaciens, a prononcé à l'encontre de Mme A-B, le 10 avril 2006, la sanction d'interdiction de servir des prestations aux assurés sociaux pour une durée de 20 ans ; que par la décision du 4 juillet 2007 contre laquelle la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES se pourvoit en cassation, la section des assurances sociales du Conseil national de l'ordre des pharmaciens a annulé la décision de la section des assurances sociales du conseil régional de l'ordre et relaxé Mme A-B des fins de la poursuite ; que cette dernière s'est par ailleurs vu infliger, à raison des mêmes faits, la sanction de l'interdiction définitive d'exercer la pharmacie, prononcée le 27 février 2006 par la chambre de discipline du conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'Ile-de-France et confirmée par une décision du 19 novembre 2006 de la chambre de discipline du Conseil national ; qu'elle a formé à l'encontre de cette dernière décision un pourvoi en cassation dont l'admission a été refusée le 17 octobre 2008 par le Conseil d'Etat statuant au contentieux ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens du pourvoi ;
Considérant que, dans sa partie législative, le chapitre V du titre IV du livre Ier du code de la sécurité sociale fixe les règles relatives au contentieux du contrôle technique en ce qui concerne les médecins, chirurgiens-dentistes et sages-femmes ; que l'article L. 145-4 du même code prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles les dispositions du présent chapitre sont étendues et adaptées aux difficultés nées de l'exécution du contrôle des services techniques en ce qui concerne les pharmaciens et les auxiliaires médicaux (...) ;
Considérant que l'ordonnance du 24 avril 1996 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins a ajouté à l'article L. 145-2 du code de la sécurité sociale, qui détermine les sanctions susceptibles d'être prononcées par les sections des assurances sociales des ordres des médecins, chirurgiens-dentistes et sages-femmes, un neuvième alinéa aux termes duquel : Les sanctions prévues au présent article ne sont pas cumulables avec les peines prévues à l'article L. 4124-6 du code de la santé publique lorsqu'elles ont été prononcées à l'occasion des mêmes faits. Si les juridictions compétentes prononcent des sanctions différentes, la sanction la plus forte peut être seule mise à exécution ; que le pouvoir réglementaire n'a pas modifié l'article R. 145-2 du code de la sécurité sociale, relatif aux sanctions susceptibles d'être prononcées par les sections des assurances sociales de l'ordre des pharmaciens, pour leur étendre la règle de la confusion avec les sanctions disciplinaires prononcées à raison des mêmes faits ;
Considérant que l'article L. 145-4 précité du code de la sécurité sociale prévoit que les règles applicables au contentieux du contrôle technique des pharmaciens, définies par décret en Conseil d'Etat, résultent de l'extension des normes que le législateur fixe dans cette matière pour les médecins, chirurgiens-dentistes et sages-femmes, sous réserve des adaptations rendues nécessaires par d'éventuelles difficultés nées de l'exécution du contrôle des services techniques ; que le Gouvernement ne pouvait, sans méconnaître ces prescriptions, laisser subsister au-delà d'un délai raisonnable à l'article R. 145-2, après la modification de l'article L. 145-2 par l'ordonnance du 24 avril 1996, des dispositions dont le maintien ne peut être justifié par des difficultés propres aux pharmaciens dans l'exécution du contrôle des services techniques et qui, permettant le cumul des sanctions prononcées à ce titre et des sanctions disciplinaires, sont plus rigoureuses que celles que la loi prévoit désormais pour les professions médicales ; qu'eu égard à la nature de la carence du pouvoir réglementaire et à la circonstance que les obligations pesant sur lui sont définies avec précision par la loi, il appartient aux juridictions compétentes d'étendre aux pharmaciens la règle énoncée au neuvième alinéa de l'article L. 145-2 et de tirer toutes conséquences de ce que les sanctions prononcées à leur encontre au titre du contrôle technique se confondent avec celles prononcées pour les mêmes faits sur le fondement de l'article L. 4234-6 du code de la santé publique ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, Mme A-B s'est vu infliger, par une décision de la chambre de discipline du conseil régional de l'ordre des pharmaciens d'Ile-de-France, confirmée par une décision devenue définitive de la chambre de discipline du Conseil national, la sanction de l'interdiction définitive d'exercer la pharmacie, sanction maximale prévue par l'article L. 4234-6 du code de la santé publique, à raison des mêmes faits que ceux retenus par la section des assurances sociales du même conseil régional pour lui infliger la sanction de l'interdiction de servir des prestations aux assurés sociaux pour une durée de 20 ans ; que l'appel que Mme A-B a seule formé dans le délai légal contre la décision de la section des assurances sociales du conseil régional de l'ordre d'Ile-de-France ne pouvant conduire au prononcé d'une sanction plus lourde et notamment à la mise à sa charge du remboursement d'un trop-perçu, aucune sanction dont elle pourrait rester affectée au terme d'un nouvel examen de cet appel n'est susceptible de recevoir exécution ; qu'il en irait ainsi même dans l'hypothèse où l'intéressée obtiendrait, par application de l'article L. 4234-9 du code de la santé publique, le relèvement de la sanction de l'interdiction définitive d'exercer la pharmacie, le régime de confusion des peines prévu par le neuvième alinéa de l'article L. 145-2 du code de la sécurité sociale impliquant que le relèvement s'applique à la sanction unique résultant de la confusion ; qu'une éventuelle amnistie des faits reprochés aurait également pour conséquence de la faire échapper à toute sanction ; que, dans ces conditions, les conclusions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES tendant à l'annulation de la décision de la section des assurances sociales du Conseil national de l'ordre prononçant la relaxe de Mme A-B ont perdu leur objet ; qu'il n'y a plus lieu d'y statuer ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A-B la somme que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES demande en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que le Conseil national de l'ordre des pharmaciens n'étant pas partie à la présente instance, les mêmes dispositions font obstacle tant à ce que cette somme soit mise à sa charge qu'à ce que les frais exposés par lui et non compris dans les dépens soient mis à la charge de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES ;
D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES tendant à l'annulation de la décision du 4 juillet 2007 de la section des assurances sociales du Conseil national de l'ordre des pharmaciens.
Article 2 : Les conclusions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES et du Conseil national de l'ordre des pharmaciens tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES et à Mme K... A-B.
Copie pour information en sera adressée au Conseil national de l'ordre des pharmaciens et à la ministre de la santé et des sports.