Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 mars et 2 juin 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION NATIONALE DES ASSOCIATIONS TUTELAIRES, dont le siège est 94, rue Saint-Lazare à Paris (75009), l'UNAPEI, dont le siège est 15, rue Coysevox à Paris cedex 18 (75876), l'UNION NATIONALE DES ASSOCIATIONS FAMILIALES, dont le siège est 28, place Saint-Georges à Paris (75009) et l'UNION NATIONALE DES ASSOCIATIONS DE SAUVEGARDE DE L'ENFANCE, DE L'ADOLESCENCE ET DES ADULTES, dont le siège est 118, rue du Château des Rentiers à Paris (75013) ; la FEDERATION NATIONALE DES ASSOCIATIONS TUTELAIRES et autres demandent au Conseil d'Etat ;
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2008-1554 du 31 décembre 2008 relatif aux modalités de participation des personnes protégées au financement de leur mesure de protection ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de l'action sociale et des familles ;
Vu le décret n° 2008-153 du 31 décembre 2008 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laure Bédier, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la FEDERATION NATIONALE DES ASSOCIATIONS TUTELAIRES et autres et de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'association des gérants de tutelles privés de Paris, de la chambre des gérants de tutelles près la cour d'appel de Versailles, du groupement des gérants de tutelle indépendants et de la fédération nationale des mandataires judiciaires indépendants à la protection des majeurs,
- les conclusions de Mme Claire Landais, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la FEDERATION NATIONALE DES ASSOCIATIONS TUTELAIRES et autres et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'association des gérants de tutelles privés de Paris, de la chambre des gérants de tutelles près la cour d'appel de Versailles du groupement des gérants de tutelle indépendants et de la fédération nationale des mandataires judiciaires indépendants à la protection des majeurs ;
Sur les interventions de l'association des gérants de tutelles privés de Paris, de la chambre des gérants de tutelle près la cour d'appel de Versailles, du groupement des gérants de tutelle indépendants et de la fédération nationale des mandataires judiciaires indépendants à la protection des majeurs :
Considérant que ces associations ont intérêt au maintien du décret attaqué ; qu'ainsi, leur intervention est recevable ;
Sur le décret attaqué :
Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 419 du code civil : Si la mesure judiciaire de protection est exercée par un mandataire judiciaire à la protection des majeurs, son financement est à la charge totale ou partielle de la personne protégée en fonction de ses ressources et selon les modalités prévues par le code de l'action sociale et des familles ; qu'aux termes de l'article L. 471-5 du code de l'action sociale et des familles : Le coût des mesures exercées par les mandataires judiciaires à la protection des majeurs et ordonnées par l'autorité judiciaire au titre du mandat spécial auquel il peut être recouru dans le cadre de la sauvegarde de justice ou au titre de la curatelle, de la tutelle ou de la mesure d'accompagnement judiciaire est à la charge totale ou partielle de la personne protégée en fonction de ses ressources. Lorsqu'il n'est pas intégralement supporté par la personne protégée, il est pris en charge dans les conditions fixées par les articles L. 361-1, L. 472-3 et L. 472-9. / A titre exceptionnel, le juge peut, après avoir recueilli l'avis du procureur de la République, allouer au mandataire judiciaire à la protection des majeurs, pour l'accomplissement d'un acte ou d'une série d'actes requis par l'exercice de la mesure de protection et impliquant des diligences particulièrement longues ou complexes, une indemnité en complément des sommes perçues au titre du premier alinéa lorsqu'elles s'avèrent manifestement insuffisantes. Cette indemnité est à la charge de la personne et est fixée par le juge en application d'un barème national établi par décret ; qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires, que si les personnes bénéficiant d'une mesure de protection participent au financement de cette mesure, le montant de cette participation financière ne peut être supérieur au coût de la mesure ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 471-5-2 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction issue du décret attaqué : Le coût des mesures exercées par les mandataires judiciaires à la protection des majeurs et ordonnées par l'autorité judiciaire au titre du mandat spécial auquel il peut être recouru dans le cadre de la sauvegarde de justice ou au titre de la curatelle, de la tutelle ou de la mesure d'accompagnement judiciaire n'est pas à la charge de la personne protégée lorsque le montant des ressources qu'elle perçoit est inférieur ou égal au montant annuel de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée à l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale en vigueur au 1er janvier de l'année de perception des revenus. / Dans le cas contraire, un prélèvement est effectué à hauteur de : 7 % pour la tranche des revenus annuels soumis à prélèvement supérieure strictement au montant annuel de l'allocation aux adultes handicapés et inférieure ou égale au montant brut annuel du salaire minimum interprofessionnel de croissance en vigueur au 1er janvier de l'année de perception des revenus ; / 15 % pour la tranche des revenus annuels soumis à prélèvement supérieure strictement au montant brut annuel du salaire minimum interprofessionnel de croissance en vigueur au 1er janvier de l'année de perception des revenus et inférieure ou égale au même montant majoré de 150 % ; / 2 % pour la tranche des revenus annuels soumis à prélèvement supérieure strictement au montant brut annuel du salaire minimum interprofessionnel de croissance en vigueur au 1er janvier de l'année de perception majoré de 150 % et inférieure ou égale à 6 fois le montant brut annuel du salaire minimum interprofessionnel de croissance en vigueur au 1er janvier de l'année de perception. / Quel que soit le montant des ressources de la personne protégée, aucun prélèvement n'est effectué sur la tranche des revenus annuels inférieure ou égale au montant annuel de l'allocation aux adultes handicapés ; que la loi ayant prévu, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, une participation financière de la personne protégée qui ne saurait être supérieure au coût de la mesure dont elle bénéficie, tel qu'il résulte de l'application des articles L. 471-5, L. 472-3 et L. 361-1, les dispositions précitées de l'article R. 471-5-2, en tant qu'elles fixent le barème, en fonction du revenu des intéressés, du prélèvement destiné à couvrir tout ou partie du coût de la mesure de protection, ne peuvent être regardées que comme limitant à ce coût le montant effectif de ce prélèvement ; que d'ailleurs, d'une part, s'agissant des personnes physiques mandataires judiciaires à la protection des majeurs, l'article R. 472-8 du même code prévoit qu'elles sont rémunérées sur la base d'un tarif mensuel forfaitaire attribué pour toute mesure de protection et que le montant total des prélèvements opérés sur les ressources du majeur protégé vient en déduction de ce tarif, d'autre part, s'agissant des mandataires judiciaires personnes morales, l'article L. 361-1 du même code prévoit le versement d'une dotation globale de financement qui est calculée déduction faite de la participation financière du majeur protégé ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le décret attaqué aurait illégalement prévu, à l'article R. 471-5-2, un prélèvement sur les revenus de la personne protégée qui pourrait dans certains cas excéder le coût de la mesure dont elle bénéficie, doit être écarté ;
Considérant par ailleurs que si l'article L. 472-3 du code de l'action sociale et des familles prévoit que la rémunération des personnes physiques mandataires judiciaires à la protection des majeurs est déterminée en fonction d'indicateurs liés, en particulier, à la charge de travail résultant de l'exécution de la mesure de protection dont elles ont la charge , un décret en Conseil d'Etat devant définir ces indicateurs, le moyen tiré de ce que le décret attaqué méconnaîtrait les dispositions de cet article en ne fixant pas ces indicateurs ne peut qu'être écarté, dès lors que l'objet du décret attaqué est seulement de déterminer les modalités de participation des personnes protégées au financement de leur mesure de protection, et non les modalités de rémunération de ces mandataires, lesquelles ont été fixées par le décret n° 2008-1553 du 31 décembre 2008 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la FEDERATION NATIONALE DES ASSOCIATIONS TUTELAIRES et autres ne sont pas fondées à demander l'annulation du décret attaqué ; que leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les interventions de l'association des gérants de tutelle privés de Paris, de la chambre des gérants de tutelle près la cour d'appel de Versailles, du groupement des gérants de tutelle indépendants et de la fédération nationale des mandataires judiciaires indépendants à la protection des majeurs sont admises.
Article 2 : La requête de la FEDERATION NATIONALE DES ASSOCIATIONS TUTELAIRES, de l'UNAPEI, de l'UNION NATIONALE DES ASSOCIATIONS FAMILIALES et de l'UNION NATIONALE DES ASSOCIATIONS DE SAUVEGARDE DE L'ENFANCE, DE L'ADOLESCENCE ET DES ADULTES est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la FEDERATION NATIONALE DES ASSOCIATIONS TUTELAIRES, premier requérant dénommé, à l'association des gérants de tutelle privés de Paris, à l'association des mandataires judicaires à la protection des majeurs d'Ile-de-France, anciennement dénommée chambre des gérants de tutelle près la cour d'appel de Versailles, à l'association des mandataires judiciaires à la protection des majeurs de la Sarthe (AMJPM 72), anciennement dénommée groupement des gérants de tutelle indépendants, à la fédération nationale des mandataires judiciaires indépendants à la protection des majeurs, au ministre du travail, de l'emploi et de la santé et au Premier ministre.
Les autres requérants seront informés de la présente décision par la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d'Etat.