Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 décembre 2009 et 15 mars 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES, dont le siège est quartier Fourchon B.P 80195 à Arles (13637) ; le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement n° 0600550-0601201-0601206 du 15 octobre 2009 par lequel le tribunal administratif de Marseille a, d'une part, annulé la décision du 2 décembre 2005 par laquelle le directeur du centre hospitalier a imposé à Mlle Maud A, à la suite de sa démission, le reversement d'une prime d'engagement s'élevant à 10 000 euros, ainsi que le bulletin de recettes du 15 décembre 2005 et le titre exécutoire émis le 27 décembre 2005, d'autre part, déchargé Mlle A de l'obligation de payer la somme mentionnée sur l'avis avant poursuites du 7 février 2006, l'a renvoyée devant le centre hospitalier pour la liquidation et le paiement des rémunérations qui lui restaient dues au moment de sa démission et enjoint à celui-ci d'établir un bulletin de salaire relatif aux rémunérations restant dues à la date d'effet de sa démission ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande présentée par Mlle A devant le tribunal administratif de Marseille ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le décret n° 87-788 du 28 septembre 1987 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. François Vareille, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat du CENTRE HOSPITALIER D'ARLES et de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de Mlle A ;
- les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, rapporteur public ;
- La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat du CENTRE HOSPITALIER D'ARLES et à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de Mlle A ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le 12 novembre 2002, le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES a renouvelé, pour une période de 4 ans à compter du 1er décembre 2002, le contrat de Mlle Maud A, assistant des hôpitaux depuis le 8 janvier 2002, et a versé à cette dernière en application de l'article R. 6152-516 du code de la santé publique une prime de 10 000 euros ; qu'après avoir été reçue au concours de praticien hospitalier, Mlle A a démissionné de son poste d'assistant et a été nommée au centre hospitalier de Bagnols-sur-Cèze par arrêtés préfectoraux des 25 janvier et 12 avril 2006, praticien hospitalier à temps partiel à titre provisoire pour une période probatoire d'un an ; que par une décision du 2 décembre 2005, le directeur du CENTRE HOSPITALIER D'ARLES a exigé le reversement de la prime de 10 000 euros perçue par Mlle A ; qu'il a en outre prévu que ce reversement serait pris en compte dans son traitement du mois de décembre 2005 et que le montant des indemnités de gardes, astreintes et temps additionnel auxquelles elle pourrait prétendre viendrait en déduction de cette somme ; que Mlle A a saisi le tribunal administratif de Marseille de trois requêtes distinctes dans lesquelles elle a demandé, dans l'une, l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 2 décembre 2005 et, dans les deux autres, la décharge du remboursement de la prime, la condamnation du centre hospitalier à lui verser diverses sommes au titre du travail effectué ainsi que la somme de 4 000 euros au titre de dommages intérêts ; que par un jugement du 15 octobre 2009, le tribunal, après avoir joint les trois requêtes a annulé la décision du 2 décembre 2005 du directeur du CENTRE HOSPITALIER D'ARLES imposant le reversement de la prime et l'a renvoyée devant le centre hospitalier pour la liquidation et le paiement des rémunérations qui lui restaient dues ; que le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES se pourvoit en cassation contre ce jugement ;
Sur la compétence du Conseil d'Etat :
Considérant qu'il résulte des dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, combinées avec celles du 2° alinéa de l'article R. 222-13 du même code, que le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort dans les litiges relatifs à la situation individuelle des agents publics, à l'exception de ceux concernant l'entrée au service, la discipline ou la sortie du service, sauf pour les recours comportant des conclusions tendant au versement ou à la décharge de sommes d'un montant supérieur au montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 de ce code ; que l'article R. 222-14 fixe ce montant à 10 000 euros ; que, l'article R. 222-15 précise que ce montant est déterminé par la valeur totale des sommes demandées dans la requête introductive d'instance, compte non tenu des demandes d'intérêts et de celles présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'est sans incidence sur la détermination des voies de recours la circonstance que le premier juge a estimé devoir statuer par un seul jugement sur des conclusions présentées dans des requêtes distinctes ; qu'enfin, des demandes distinctes relevant de voies de recours différents ne sauraient présenter entre elles un lien de connexité ;
Considérant, d'une part, que la première demande de Mlle A, qui soulevait un litige relatif à la situation individuelle d'un agent public étranger à l'entrée au service, à la discipline ou à la sortie du service, ne comportait aucune conclusion tendant au versement ou à la décharge de sommes ; que le jugement rendu sur cette demande l'a par suite été en premier et dernier ressort ;
Considérant, d'autre part, que la deuxième et la troisième demandes de Mlle A tendaient, l'une et l'autre, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, à ce qu'elle soit déchargée de l'obligation de remboursement de la prime de 10 000 euros et à ce que le centre hospitalier soit condamné à lui verser 4 000 euros de dommages intérêts ; que si ces dernières conclusions, qui avaient un caractère indemnitaire au sens du 7° de l'article R. 222-13 du code de justice administrative, n'excédaient pas 10 000 euros, la valeur totale des sommes à prendre en considération pour déterminer si, en application du deuxième alinéa de l'article R. 811-1 du même code le tribunal a statué en dernier ressort, excédait ce montant ; qu'ainsi le jugement du tribunal administratif de Marseille du 15 octobre 2009 est susceptible d'appel en tant qu'il statue sur les demandes enregistrées à son greffe sous les numéros 0601201 et 0601206 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède et alors même que les demandes de Mlle A ont été jointes par le tribunal administratif pour y statuer par une seule décision, qu'il y a lieu d'attribuer à la cour administrative d'appel de Marseille le jugement des conclusions du centre hospitalier d'Arles en tant qu'il a statué sur les demandes de l'intéressée enregistrées à son greffe sous les numéros 0601201 et 0601206 ; que les conclusions du centre hospitalier dirigées contre le même jugement en tant qu'il a fait droit à la demande de Mlle A enregistrée sous le numéro 0600550 ont, en revanche, le caractère d'un pourvoi en cassation qui relève de la compétence du Conseil d'Etat ;
Sur le pourvoi en cassation :
Considérant qu'aux termes de l'article 11-2 du décret n° 87-788 du 28 septembre 1987 relatif aux assistants des hôpitaux et au contrat d'engagement d'exercice dans un établissement public de santé, créé par le décret n° 2002-1116 du 30 août 2002 et désormais codifié à l'article R. 6152-516 du code de la santé publique : Une prime est versée à l'occasion du recrutement initial ou du renouvellement du contrat de l'assistant qui s'engage à exercer à temps plein dans un établissement public de santé pour une période soit de deux ans, soit de quatre ans (...) En cas de cessation de fonctions de l'assistant, le bénéfice de la prime obéit aux règles suivantes : (...)/ 4° Elle reste acquise à son bénéficiaire si ce dernier est nommé praticien hospitalier avant le terme de son engagement. Toutefois, en cas de cessation définitive des fonctions de praticien hospitalier avant le terme de l'engagement souscrit en qualité d'assistant, il est procédé au recouvrement de la prime versée. ; qu'il résulte de ces dispositions que la prime reste acquise à l'assistant nommé praticien hospitalier dans le cours de l'exécution de son contrat à la seule condition qu'il exerce ses fonctions de praticien jusqu'au terme du contrat qu'il avait souscrit en qualité d'assistant ; que, par suite, le tribunal administratif de Marseille en jugeant, par une décision suffisamment motivée, que ces dispositions n'exigeaient pas que les fonctions de praticien hospitalier soient exercées à temps plein et à titre définitif pour que la prime reste acquise, que le centre hospitalier ne pouvait utilement se prévaloir des dispositions d'une circulaire ministérielle du 28 novembre 2002 laquelle n'avait pu légalement ajouter de conditions supplémentaires à celles fixées par l'article R. 6152-516 du code de la santé publique et que par suite Mlle A qui avait exercé de façon successive et continue les fonctions d'assistant puis de praticien hospitalier, devait être regardée alors même qu'elle exerçait comme praticien à temps partiel et n'avait pas été recrutée en cette qualité à titre définitif, comme remplissant la condition posée par le 4° de l'article R. 6152-516 pour conserver le bénéfice de la prime, n'a pas entaché sa décision d'erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a annulé la décision du 2 décembre 2005 relative au reversement de la prime perçue par Mlle A ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du CENTRE HOSPITALIER D'ARLES une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par Mlle A et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement des conclusions du CENTRE HOSPITALIER D'ARLES dirigées contre le jugement du 15 octobre 2009 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a fait droit aux requêtes de Mlle A enregistrées sous les numéros 0601201 et 0601206 est attribué à la cour administrative d'appel de Marseille.
Article 2 : Les conclusions du pourvoi du CENTRE HOSPITALIER D'ARLES dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 15 octobre 2009 en tant qu'il a fait droit à la requête de Mlle A enregistrée sous le numéro 0600550 sont rejetées.
Article 3 : Le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES versera à Mlle A la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au CENTRE HOSPITALIER D'ARLES et à Mlle Maud A.
Copie pour information en sera adressée au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.