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08/02/2012 | FRANCE | N°336543

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 08 février 2012, 336543


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 février et 5 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE LE CHAVE, dont le siège est 38 rue Joël Recher à Marseille (13007), représentée par son gérant en exercice ; la SOCIETE LE CHAVE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 07MA01212 du 17 décembre 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, faisant droit au recours du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a, d'une part, annulé le jugement n° 0500648 du 15 j

anvier 2007 par lequel le tribunal administratif de Marseille lui a accor...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 février et 5 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE LE CHAVE, dont le siège est 38 rue Joël Recher à Marseille (13007), représentée par son gérant en exercice ; la SOCIETE LE CHAVE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 07MA01212 du 17 décembre 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, faisant droit au recours du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a, d'une part, annulé le jugement n° 0500648 du 15 janvier 2007 par lequel le tribunal administratif de Marseille lui a accordé la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle avait été assujettie au titre de l'année 1999 et, d'autre part, l'a rétablie au rôle de l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 1999 à raison de l'intégralité des droits et pénalités qui lui avaient été assignés ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter le recours du ministre ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu la loi n° 67-1253 du 30 décembre 1967 ;

Vu la loi n° 76-660 du 19 juillet 1976 ;

Vu la loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998 ;

Vu le décret n° 69-350 du 15 avril 1969 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alexandre Aïdara, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la SOCIETE LE CHAVE,

- les conclusions de M. Laurent Olléon, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la SOCIETE LE CHAVE ;

Considérant qu'aux termes de l'article 238 undecies du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur à la date des impositions en litige : Lorsque la cession d'un terrain non bâti ou d'un bien assimilé au sens du A de l'article 1594-0 G est rémunérée par la remise d'immeubles ou de fractions d'immeubles à édifier sur ce terrain, l'imposition de la plus-value dégagée à l'occasion de cette opération est, pour l'établissement de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, établie au titre de la cinquième année qui suit celle de l'achèvement des constructions. / Toutefois, en cas de cession des immeubles ou des fractions d'immeubles ou de décès du contribuable avant l'expiration de ce délai, l'imposition est établie au titre de l'année de la dernière cession des immeubles ou fractions d'immeubles ou du décès. (...)

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SOCIETE LE CHAVE, soumise à l'impôt sur les sociétés, a vendu en 1994 un terrain à bâtir contre remise d'immeubles en dation de paiement ; qu'elle n'a pas été imposée en 1994 au titre de la plus-value dégagée par cette opération ; que l'administration lui a notifié un redressement au titre des bénéfices de l'année 1999 en réintégrant la plus-value dans l'assiette imposable, sur le fondement de l'article 238 undecies du code général des impôts ; que la société a contesté ce redressement en soutenant que cette disposition ne serait pas applicable aux personnes morales assujetties à l'impôt sur les sociétés et que, par suite, la créance fiscale résultant de la plus-value réalisée en 1994, imposable à l'impôt sur les sociétés au titre de cette année, était prescrite à la date du redressement ; que la société se pourvoit en cassation contre l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, faisant droit à l'appel du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a annulé le jugement du tribunal administratif de Marseille qui lui avait accordé la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1999 et l'a rétablie au rôle de l'impôt sur les sociétés au titre cette année, à raison de l'intégralité des droits et pénalités qui lui avaient été assignés ;

Considérant, d'une part, que l'article 238 undecies du code général des impôts est issu de l'article 83 de la loi du 30 décembre 1967 d'orientation foncière, aux termes duquel : Lorsque la cession d'un terrain non bâti ou d'un bien assimilé au sens de l'article 150 ter du code général des impôts est rémunérée par la remise d'immeubles ou de fractions d'immeubles à édifier sur ce terrain, l'imposition de la plus-value dégagée à l'occasion de cette opération est établie au titre de la cinquième année qui suit celle de l'achèvement des constructions. / Toutefois, en cas de cession des immeubles ou des fractions d'immeubles ou du décès du contribuable avant l'expiration de ce délai, l'imposition est établie au titre de l'année de la dernière cession des immeubles ou fraction d'immeubles ou du décès (...) ; que ces dispositions ne précisaient pas que l'imposition de la plus-value réalisée dans ces conditions était établie pour l'établissement de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés , précision qui a été apportée par le décret du 15 avril 1969, insérant les dispositions de l'article 83 de la loi du 30 décembre 1967 d'orientation foncière dans le code général des impôts ; qu'il résulte toutefois des dispositions de l'article 83 de cette loi, en particulier de la référence au décès du contribuable , éclairées par les travaux préparatoires de cette loi, que le législateur a entendu réserver le report d'imposition ainsi prévu aux plus-values réalisées par des personnes physiques soit personnellement, soit à raison de leurs droits dans des personnes morales dont les bénéfices sont imposables au nom de leurs associés ;

Considérant, d'autre part, qu'en substituant respectivement par le III de l'article 12 de la loi du 19 juillet 1976 portant imposition des plus-values et par l'article 39 de la loi du 30 décembre 1998 de finances pour 1999, le renvoi à l'article 691 puis à l'article 1594-0G du code général des impôts au renvoi initial à l'article 150 ter de ce code, le législateur n'a pas entendu étendre la portée de la version initiale de l'article 238 undecies aux personnes morales imposables à l'impôt sur les sociétés ;

Considérant que par suite, en jugeant que le III de l'article 12 de la loi du 19 juillet 1976 avait implicitement validé l'extension du champ d'application de l'article 238 undecies du code aux personnes morales soumises à l'impôt sur les sociétés, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ; que, par suite, la SOCIETE LE CHAVE est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que la plus-value réalisée en 1994 par la SOCIETE LE CHAVE n'entrait pas dans le champ d'application de l'article 238 undecies du code général des impôts, qu'elle était imposable au titre de cette même année et que, par conséquent, la prescription était acquise le 30 avril 2002, date de la notification du redressement ; que, par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 15 janvier 2007, le tribunal administratif de Marseille a accordé à cette société la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle avait été assujettie au titre de l'exercice clos en 1999 à raison de cette plus-value ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SOCIETE LE CHAVE de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 17 décembre 2009 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.

Article 2 : Le recours présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie devant la cour administrative d'appel de Marseille est rejeté.

Article 3 : L'Etat versera à la SOCIETE LE CHAVE la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE LE CHAVE et à la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.


Synthèse
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 336543
Date de la décision : 08/02/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 08 fév. 2012, n° 336543
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Jacques Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Alexandre Aïdara
Rapporteur public ?: M. Laurent Olléon
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:336543.20120208
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