Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 août et 9 novembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE CASTRES, représentée par son maire ; la COMMUNE DE CASTRES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 06BX01135-09BX00894 du 9 juin 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a ramené de 479 162,24 euros HT à 273 052,77 euros HT la somme que par le jugement n° 040012-040013-043443 du 6 février 2009 le tribunal administratif de Toulouse a condamné la commune à verser à la société Lyonnaise des eaux France au titre des biens de reprise du service public de l'eau et du service public de l'assainissement délégués à la société par deux conventions du 21 septembre 1990 déclarées nulles par le jugement du 9 mars 2006, et, rejetant le surplus de ses conclusions, l'a également condamnée à verser à cette société, sur le fondement de l'enrichissement sans cause, une somme de 27 726 930 euros, majorée d'intérêts au taux légal à compter du 1er octobre 2004, avec capitalisation des intérêts le 1er octobre 2005 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date, et a mis les frais de l'expertise ordonnée par son arrêt avant dire droit du 30 décembre 2008 à la charge des parties en parts égales ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d'appel et de rejeter celles de la société Lyonnaise des eaux France, ainsi que les demandes de première instance de cette société ;
3°) de mettre à la charge de la société Lyonnaise des eaux France la somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Nicolas Polge, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la COMMUNE DE CASTRES,
- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la COMMUNE DE CASTRES ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux " ;
Considérant que pour demander l'annulation de l'arrêt attaqué, la COMMUNE DE CASTRES soutient que la cour administrative d'appel de Bordeaux a commis une erreur de droit en jugeant que ses conclusions tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif du 9 mars 2006 en tant qu'il a constaté la nullité des conventions conclues le 21 septembre 1990 étaient devenues sans objet du fait du caractère définitif de l'arrêt du 30 décembre 2008 par lequel elle a elle-même jugé que cette déclaration de nullité était passée en force de chose jugée et que les conventions n'étaient pas validées par la loi du 30 décembre 2006, alors que la commune n'avait, ni en première instance, ni en appel dans le cadre de l'instruction précédant l'arrêt du 30 décembre 2008, ni en cassation, invoqué l'impossibilité, pour un contractant de l'administration, de se retrancher derrière une irrégularité formelle, principe consacré postérieurement ; qu'en ne se prononçant pas sur le moyen opérant tiré de cette impossibilité, la cour administrative d'appel de Bordeaux n'a pas suffisamment motivé son arrêt ; que pour condamner la commune à indemniser la société des dépenses utiles à la commune, elle a commis une deuxième erreur de droit en faisant reposer sur la commune la charge de la preuve de l'inutilité de ces dépenses ; qu'elle a commis une troisième erreur de droit et une erreur de qualification juridique des faits en estimant que la société pouvait obtenir le remboursement des dépenses utiles sans tenir compte des fautes particulièrement graves qu'elle avait commises, lesquelles révélaient un manquement au principe de loyauté ; qu'en estimant implicitement mais nécessairement que le consentement de la commune n'avait pas été vicié, la cour administrative d'appel de Bordeaux a commis une quatrième erreur de droit ; qu'en estimant que l'affectation au budget général de la commune des sommes versées par la société ne faisait pas obstacle à ce que la trésorerie ainsi apportée soit regardée comme utile à la commune, alors que l'utilité de la dépense doit être appréciée par rapport au service concerné, elle a commis une cinquième erreur de droit ; qu'elle a commis une sixième erreur de droit en jugeant que le montant des frais financiers engagés par la société pour l'exécution des contrats devait être indemnisé au titre de l'enrichissement sans cause ; qu'en estimant que la société s'était appauvrie du fait des frais financiers supportés, la cour administrative d'appel de Bordeaux a dénaturé les pièces du dossier ; qu'elle a commis une septième erreur de droit en jugeant que les frais financiers devaient être intégralement pris en charge par la commune, alors que seule leur valeur non amortie pouvait être indemnisée ;
Considérant qu'eu égard aux moyens soulevés, il y a lieu d'admettre les conclusions du pourvoi dirigées contre l'arrêt en tant qu'il a pris en compte les frais financiers pour l'évaluation des dépenses utiles exposées par la société Lyonnaise des eaux France ; qu'en revanche, s'agissant des autres conclusions du pourvoi, aucun de ces moyens n'est de nature à permettre leur admission ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les conclusions du pourvoi de la COMMUNE DE CASTRES dirigées contre l'arrêt en tant qu'il a pris en compte les frais financiers pour l'évaluation des dépenses utiles exposées par la société Lyonnaise des eaux France sont admises.
Article 2 : Le surplus des conclusions du pourvoi de la COMMUNE DE CASTRES n'est pas admis.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE CASTRES.
Copie en sera adressée pour information à la société Lyonnaise des eaux France.