Vu l'ordonnance n° 1102436 du 12 octobre 2011, enregistrée le 21 octobre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président du tribunal administratif de Montpellier a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête présentée par la SOCIETE DISTRIBUTION CASINO FRANCE, dont le siège social est situé 1 Esplanade de France à Saint-Etienne (42100) ;
Vu la requête, enregistrée le 18 mai 2011 au greffe du tribunal administratif de Montpellier, présentée par la SOCIETE DISTRIBUTION CASINO FRANCE ; la SOCIETE DISTRIBUTION CASINO FRANCE demande au juge administratif :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 786T du 11 mai 2011 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a accordé à la SAS Bedesoline et à la SARL Entreprise Jalade l'autorisation préalable en vue de procéder à la création d'un ensemble commercial par création d'un hypermarché à l'enseigne Intermarché d'une surface de vente de 2 920 m2 à Canet-en-Roussillon (Pyrénées-Orientales) ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat, de la SAS Bedesoline et de la SARL Entreprise Jalade une somme de 2 000 euros chacun en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de commerce ;
Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 ;
Vu la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 ;
Vu la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 ;
Vu le décret n° 2008-1212 du 24 novembre 2008 ;
Vu le décret n° 2011-921 du 1er août 2011 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Marie Picard, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Rémi Keller, rapporteur public ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 750-1 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie : " Les implantations, extensions, transferts d'activités existantes et changements de secteur d'activité d'entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et de la qualité de l'urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu'au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. / Dans le cadre d'une concurrence loyale, ils doivent également contribuer à la modernisation des équipements commerciaux, à leur adaptation à l'évolution des modes de consommation et des techniques de commercialisation, au confort d'achat du consommateur et à l'amélioration des conditions de travail des salariés " ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 752-6 du même code, dans sa rédaction issue de la même loi du 4 août 2008 : " Lorsqu'elle statue sur l'autorisation d'exploitation commerciale visée à l'article L. 752-1, la commission départementale d'aménagement commercial se prononce sur les effets du projet en matière d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs. Les critères d'évaluation sont : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et de montagne ; / b) L'effet du projet sur les flux de transport ; / c) Les effets découlant des procédures prévues aux articles L. 303-1 du code de la construction et de l'habitation et L. 123-11 du code de l'urbanisme ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet ; / b) Son insertion dans les réseaux de transports collectifs. " ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions combinées que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi ; qu'il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce ; que, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 4 août 2008, la densité d'équipement commercial de la zone de chalandise concernée ne figure plus au nombre de ces critères ;
Considérant que si la SOCIETE DISTRIBUTION CASINO FRANCE soutient que certains pôles commerciaux existants, situés à l'est de la voie ferrée Perpignan-Cerbère, auraient dû être inclus dans la zone de chalandise, elle n'apporte aucune précision permettant d'établir en quoi cette omission aurait faussé l'appréciation de la commission nationale s'agissant des effets du projet autorisé au regard des objectifs et critères fixés par le législateur ; que le moyen tiré d'une définition erronée de la zone de chalandise ne peut donc qu'être écarté ;
Considérant que si la SOCIETE DISTRIBUTION CASINO FRANCE soutient que le projet ne participe pas à l'aménagement commercial du fait qu'il est situé entre Canet et Canet Plage, il ressort des pièces du dossier que le projet réhabilite une friche industrielle située à proximité du centre-ville, qui fait actuellement l'objet d'un aménagement par la commune, incluant des commerces et des habitats collectifs ; que la commission nationale a donc pu estimer, sans méconnaître les dispositions précitées, que le projet participait à l'animation de la vie de la commune et au confort d'achat des consommateurs ;
Considérant que si la requérante allègue du fait que la réalisation de ce projet va saturer le point d'accès unique à la station balnéaire de Canet-en-Roussillon, il ressort des pièces du dossier que le projet dispose d'au moins deux points d'accès différents, et que l'estimation du trafic induit par le projet est fondée sur la fréquentation en période estivale et sur l'évolution à terme du quartier ; qu'en estimant que l'accroissement des flux de circulation provoqué par l'exploitation de cet ensemble commercial sera facilement absorbé par les infrastructures routières existantes, la commission nationale n'a pas commis d'erreur d'appréciation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commission nationale n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées du code de commerce en accordant l'autorisation litigieuse ; que la requête doit, par suite, être rejetée, y compris les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SOCIETE DISTRIBUTION CASINO FRANCE une somme de 1 500 euros à verser à chacune des sociétés SAS Bedesoline et SARL Jalade en application des mêmes dispositions ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la SOCIETE DISTRIBUTION CASINO FRANCE est rejetée.
Article 2 : La SOCIETE DISTRIBUTION CASINO FRANCE versera 1 500 euros à la SAS Bedesoline et 1 500 euros à la SARL Entreprise Jalade en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE DISTRIBUTION CASINO FRANCE, à la SAS Bedesoline, à la SARL Entreprise Jalade et à la Commission nationale d'aménagement commercial.
Copie en sera adressée pour information au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.