Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 avril et 7 juillet 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme B...A..., demeurant... ; Mme A... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement n° 0802491-0804611 du 9 février 2011 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté :
- d'une part, sa demande du 4 avril 2008 tendant en premier lieu à l'annulation de la décision du directeur général adjoint des services de la ville de Marseille du 8 juin 2007 refusant de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident du 16 mars 2007 et la décision du même directeur du 1er février 2008 traitant son arrêt de travail en congé de maladie ordinaire et la déclarant apte à la reprise du travail et, en second lieu, à ce qu'il soit enjoint au maire de Marseille de prendre une nouvelle décision relative à l'imputabilité au service de l'accident du 16 mars 2007 et de la rétablir dans ses droits à traitement à compter de la date à laquelle elle a été placée en congé maladie ordinaire ;
- d'autre part, sa demande du 1er juillet 2008 tendant, en premier lieu, à l'annulation de la décision du directeur général adjoint des services de la ville de Marseille du 5 mai 2008 la plaçant d'office en position de disponibilité pour maladie à compter du 17 mars 2008 et de la décision implicite de rejet née de l'absence de réponse à sa demande de réintégration du 26 mars 2008 et, en second lieu, à ce qu'il soit enjoint au maire de Marseille, dans un délai de deux mois, de la réintégrer dans son ancien poste ou dans un poste équivalent, de la rétablir dans ses droits à traitement et de lui communiquer son dossier médical et administratif ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de la ville de Marseille la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 ;
Vu le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Christian Fournier, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée avant et après les conclusions à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de Mme A...et à la SCP Peignot, Garreau, Bauer-Violas, avocat de la commune de Marseille ;
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, le 16 mars 2007, Mme B...A..., adjointe technique principale de deuxième classe exerçant les fonctions de chef de l'équipe de surveillants du muséum d'histoire naturelle de Marseille, a été victime d'une chute sur son lieu de travail, ayant occasionné, selon le certificat médical initial établi le jour même, une " contraction musculaire paravertébrale lombaire ", à la suite de laquelle elle a été placée en congé de maladie ; que, par un arrêté du 19 mars 2007, le directeur général adjoint des services de la ville de Marseille l'a affectée sur un poste d'agent de nettoyage à la direction de l'entretien ; que, le 8 juin 2007, suivant l'avis de la commission départementale de réforme du 10 mai 2007 faisant état de l'absence de la lésion décrite dans le certificat médical initial, le directeur général adjoint des services a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident ; que, le 24 octobre 2007, Mme A... a demandé au maire de Marseille d'être affectée à son ancien poste au muséum d'histoire naturelle ou à un poste équivalent, correspondant à son aptitude physique ; que, le 1er février 2008, suivant l'avis du comité médical départemental du 11 janvier 2008, le directeur général adjoint des services a décidé que l'arrêt de travail de Mme A... devait être traité comme un congé de maladie ordinaire et l'a déclarée apte à la reprise du travail ; que, le 26 mars 2008, Mme A... a à nouveau demandé au maire de Marseille d'être affectée à un poste correspondant à son aptitude physique ; que, par arrêté du 5 mai 2008, le directeur général adjoint des services l'a placée d'office en position de disponibilité pour maladie à compter du 17 mars 2008 ; que, par un jugement du 9 février 2011 contre lequel Mme A... se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Marseille a rejeté, d'une part, sa demande du 4 avril 2008 tendant à l'annulation des décisions des 8 juin 2007 et 1er février 2008 et à ce qu'il soit enjoint au maire de Marseille de prendre une nouvelle décision relative à l'imputabilité au service de l'accident du 16 mars 2007 et de la rétablir dans ses droits à traitement à compter de la date à laquelle elle a été placée en congé maladie ordinaire et, d'autre part, sa demande du 1er juillet 2008 tendant à l'annulation de la décision du 5 mai 2008 et de la décision implicite de rejet née de l'absence de réponse à sa demande du 26 mars 2008 et à ce qu'il soit enjoint au maire de Marseille, dans un délai de deux mois, de la réintégrer dans son ancien poste ou dans un poste équivalent, de la rétablir dans ses droits à traitement et de lui communiquer son dossier médical et administratif ;
Sur les conclusions dirigées contre le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande du 4 avril 2008 de Mme A... tendant à l'annulation de la décision du 8 juin 2007 refusant de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident qu'elle a subi :
2. Considérant que, pour écarter les conclusions de la demande de Mme A... du 4 avril 2008 tendant à l'annulation de la décision du 8 juin 2007 au motif, soulevé d'office, qu'elles étaient irrecevables pour cause de tardiveté, le tribunal s'est borné à juger qu'il ressortait des pièces du dossier que la décision avait été notifiée à Mme A... " peu de temps après " le 8 juin 2007 et qu'elle mentionnait les voies et délais de recours ; qu'en ne précisant pas les éléments sur lesquels il s'est fondé pour juger que Mme A... avait ainsi reçu notification de la décision du 8 juin 2007, le tribunal n'a pas mis le juge de cassation en mesure d'exercer son contrôle et n'a pas suffisamment motivé son jugement ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi relatif à la décision du 8 juin 2007, Mme A... est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande du 4 avril 2008 tendant à l'annulation de la décision du 8 juin 2007 ;
Sur les conclusions dirigées contre le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande du 4 avril 2008 de Mme A... tendant à l'annulation de la décision du 1er février 2008 traitant son arrêt de travail comme un congé de maladie ordinaire et la déclarant apte à la reprise du travail :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : / [...] 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. [...] / Toutefois, si la maladie provient [...] d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. " ; que la décision du directeur général adjoint des services de la ville de Marseille du 1er février 2008 de traiter l'arrêt de travail de Mme A... comme un congé de maladie ordinaire, et non comme un congé de maladie pour accident de service, doit être regardée comme " refusant un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ", au sens de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ; qu'elle est ainsi au nombre des décisions qui, en application de cet article, doivent être motivées ;
4. Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la décision du 1er février 2008 qui se fonde sur des considérations tenant à l'état de santé de l'intéressée, comporte la mention : " Arrêt à traiter en congé maladie ordinaire. Apte à la reprise du travail à temps complet, dès notification, sur emploi statutaire après avis du médecin du travail " reprenant les termes de l'avis du comité médical départemental du 11 janvier 2008, qui était lui-même conforme aux conclusions du rapport que le docteur Baffert, médecin expert, avait établi le 30 octobre 2007 après avoir examiné Mme A... à la demande du médecin contrôleur de la ville de Marseille et dont Mme A... avait été informée qu'elle pouvait en avoir communication ; que, dès lors, le tribunal administratif a pu sans entacher son jugement d'erreur de droit, juger que la décision du 1er février 2008 en se référant à l'avis émis par le comité médical départemental était suffisamment motivée ;
5. Considérant, en second lieu, qu'il résulte des pièces du dossier soumis aux juges du fond que si Mme A... avait effectivement été déclarée définitivement inapte à un poste d'agent d'entretien par une décision du 2 novembre 1999, le docteur Baffert a conclu, dans son rapport du 30 octobre 2007, qu'elle était " apte au poste d'agent d'entretien à la direction de l'entretien sous réserve de l'exemption du port de charges lourdes pendant une période de trois mois " ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le tribunal aurait dénaturé les pièces du dossier en jugeant que Mme A... n'était pas fondée à soutenir que la décision du 1er février 2008 la déclarant apte à occuper le poste d'agent de nettoyage auquel elle avait été affectée avait été entachée d'erreur manifeste d'appréciation ne peut qu'être écarté ;
Sur les conclusions dirigées contre le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande du 1er juillet 2008 tendant à l'annulation de la décision du 5 mai 2008 plaçant d'office Mme A... en position de disponibilité pour maladie à compter du 17 mars 2008 :
6. Considérant qu'aux termes de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984 : " La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son administration ou service d'origine, cesse de bénéficier, dans cette position, de ses droits à l'avancement et à la retraite. / La disponibilité est prononcée, soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux 2°, 3° et 4° de l'article 57. [...] " ; qu'aux termes de l'article 4 du décret du 30 juillet 1987 relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux : " Le comité médical départemental [...] est consulté obligatoirement pour : / [...] f/ La mise en disponibilité d'office pour raison de santé et son renouvellement ; [...] " ; qu'aux termes de l'article 38 du même décret : " La mise en disponibilité [...] est prononcée après avis du comité médical [...] sur l'inaptitude du fonctionnaire à reprendre ses fonctions. [...] " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un fonctionnaire territorial ne peut être placé d'office en position de disponibilité pour maladie qu'après que l'avis du comité médical départemental sur son inaptitude à reprendre ses fonctions a été recueilli ;
7. Considérant qu'en jugeant que Mme A... n'était pas fondée à soutenir que la décision du 5 mai 2008 la plaçant d'office en position de disponibilité à compter du 17 mars 2008 était illégale, alors qu'elle soutenait que cette décision avait été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors qu'elle n'avait été précédée d'aucune consultation du comité médical départemental sur son inaptitude à reprendre ses fonctions, le tribunal administratif a méconnu la portée des dispositions de l'article 4 du décret du 30 juillet 1987 et, par suite, commis une erreur de droit ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi relatif à la décision du 5 mai 2008, Mme A... est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande du 1er juillet 2008 tendant à l'annulation de la décision du 5 mai 2008 ;
Sur les conclusions dirigées contre le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande du 1er juillet 2008 tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née de l'absence de réponse à la demande de Mme A... du 26 mars 2008 d'être affectée à un poste correspondant à son aptitude physique :
8. Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984 : " Le fonctionnaire mis en disponibilité, soit d'office à l'expiration des congés institués par les 2°, 3° et 4° de l'article 57 de la présente loi, soit de droit, sur demande, pour raisons familiales, est réintégré à l'expiration de sa période de disponibilité [...]. " ; qu'aux termes de l'article 26 du décret du 13 janvier 1986 relatif aux positions de détachement, hors cadres, de disponibilité et de congé parental des fonctionnaires territoriaux : " Sauf dans le cas où la période de mise en disponibilité n'excède pas trois mois, le fonctionnaire mis en disponibilité sur sa demande fait connaître à son administration d'origine sa décision de solliciter le renouvellement de la disponibilité ou de réintégrer son cadre d'emplois d'origine trois mois au moins avant l'expiration de la disponibilité. / La réintégration est subordonnée à la vérification par un médecin agréé et, éventuellement, par le comité médical compétent, de l'aptitude physique du fonctionnaire à l'exercice des fonctions afférentes à son grade. " ;
9. Considérant qu'un fonctionnaire territorial placé d'office en position de disponibilité qui en fait la demande a le droit d'être réintégré ; qu'une décision de refus ne peut être fondée que sur des motifs tirés des dispositions précitées, notamment son inaptitude physique, vérifiée par un médecin agréé ou, éventuellement, par le comité médical compétent, ou de l'absence de poste vacant ; que, par suite, en jugeant qu'il ne pouvait en tout état de cause être fait droit à la demande de réintégration présentée par Mme A..., dès lors qu'elle avait été légalement placée d'office en position de disponibilité pour maladie, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ; qu'en conséquence, Mme A... est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande du 1er juillet 2008 tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née de l'absence de réponse à sa demande du 26 mars 2008 ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des décisions du directeur général adjoint des services de la ville de Marseille des 8 juin 2007 et 5 mai 2008 et de la décision implicite de rejet née de l'absence de réponse du maire de Marseille à sa demande de réintégration du 26 mars 2008 ;
Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la ville de Marseille la somme de 3 000 euros à verser à Mme A..., au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 9 février 2011 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions des demandes de Mme A... tendant à l'annulation des décisions du directeur général adjoint des services de la ville de Marseille des 8 juin 2007 et 5 mai 2008 et de la décision implicite de rejet née de l'absence de réponse du maire de Marseille à sa demande de réintégration du 26 mars 2008.
Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans la limite de l'annulation ainsi prononcée, au tribunal administratif de Marseille.
Article 3 : La commune de Marseille versera à Mme A... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi de Mme A... est rejeté.
Article 5 : Les conclusions de la ville de Marseille présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A...et à la ville de Marseille.