Vu le pourvoi sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 15 décembre 2011 et 13 mars et 5 juillet 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. D... C..., demeurant... ; M. C... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 09PA02506-09PA02507 du 17 octobre 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté ses requêtes tendant, sous le n° 09PA02506, à la réformation du jugement n° 0604740 du 4 mars 2009 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation du décompte de liquidation de pension établi le 16 janvier 2006 par la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, à l'annulation de ce décompte et à ce qu'il soit enjoint à la Caisse des dépôts et consignations de fixer au 1er mai 2004 la date de liquidation du décompte et, sous le n° 09PA02507, à la réformation du jugement n° 0601750 du 4 mars 2009 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a limité à 275,40 euros l'indemnisation mise à la charge de la ville de Paris en réparation des préjudices subis du fait de la détermination de sa date d'admission à la retraite et à la condamnation de la ville à lui verser la somme de 44 665 euros à ce titre, augmentée des intérêts légaux courant à compter de sa demande préalable ;
2°) de mettre à la charge de la ville de Paris et de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 65-773 du 9 septembre 1965 ;
Vu le décret n° 94-415 du 24 mai 1994 ;
Vu le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. François Lelièvre, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Blanc, Rousseau, avocat de Mme A...C..., de Mme B...C...et de M. E...C..., à la SCP Odent, Poulet, avocat de la Caisse des dépôts et consignations et à Me Foussard, avocat de la ville de Paris ;
1. Considérant que par une première requête, enregistrée le 1er février 2006, M. C... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner la ville de Paris à lui verser une somme de 53 472 euros en réparation du préjudice subi du fait de la décision le mettant à la retraite à compter du 31 décembre 2003 au lieu du 1er mai 2004 ; que le tribunal administratif n'a fait que partiellement droit à cette demande, en condamnant la ville de Paris à lui verser la somme de 275,40 euros, par le jugement n° 0601750 du 4 mars 2009 ; que par une seconde requête, enregistrée le 24 mars 2006, M. C...a demandé au même tribunal administratif d'annuler le décompte de liquidation de sa pension de retraite établi le 16 janvier 2006 par la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales en tant que ce décompte retenait pour la liquidation de sa pension la date du 31 décembre 2003 et un taux d'invalidité limité à 10 % et d'enjoindre à cet établissement de porter ce taux à 15 % ; que le tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande par le jugement n° 0604740 du 4 mars 2009 ; que M. C...a introduit un recours contre ces deux jugements par deux requêtes enregistrées devant la cour administrative d'appel de Paris et que celle-ci, après les avoir jointes, les a rejetées par un arrêt du 17 octobre 2011 ; que M. D...C...a demandé l'annulation de cet arrêt ; qu'après le décès de M. D...C..., ses héritiers ont déclaré reprendre l'instance pendante devant le Conseil d'Etat ;
Sur les conclusions des consorts C...dirigées contre l'arrêt du 17 octobre 2011 en tant qu'il rejette la requête de M. D...C...contre le jugement n° 0604740 du 4 mars 2009 :
2. Considérant qu'il résulte des dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, combinées avec celles de l'article R. 222-13 du même code, que le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort dans les litiges en matière de pensions, sauf pour les recours comportant des conclusions tendant au versement ou à la décharge de sommes d'un montant supérieur au montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 de ce code ; que la seconde requête de M. D...C...soulevait un litige en matière de pensions et ne comportait pas de conclusions tendant au versement ou à la décharge d'une somme d'argent ; que le recours de M. D...C...contre le jugement rejetant cette requête ne relevait dès lors pas de la voie de l'appel, ouverte devant la cour administrative d'appel de Paris, mais de celle de la cassation, ouverte devant le Conseil d'Etat ;
3. Considérant que l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 17 octobre 2011 doit être, pour ce motif, annulé en tant qu'il rejette les conclusions de M. D... C... dirigées contre le jugement n° 0604740 du 4 mars 2009 du tribunal administratif de Paris, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens du pourvoi des consorts C...contestant cette partie de l'arrêt attaqué ; qu'il appartient au Conseil d'Etat statuant comme juge de cassation de statuer sur les conclusions des consorts C...dirigées contre ce jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. D...C...tendant à l'annulation du décompte de liquidation établi le 16 janvier 2006 ;
4. Considérant, d'une part, que le tribunal administratif ayant répondu explicitement dans les motifs de son jugement aux moyens soulevés dans le mémoire produit le 6 février 2009 par M. D...C..., le moyen tiré de ce que le tribunal n'a pas visé ce mémoire est inopérant ; que, d'autre part, le moyen tiré de ce que M. D...C...n'aurait pas été régulièrement convoqué à l'audience manque en fait ;
5. Considérant que l'exception tirée de l'illégalité d'un acte administratif non réglementaire à l'appui d'un recours dirigé contre une décision administrative qui en procède est recevable tant que cet acte n'est pas devenu définitif ; que, par suite, en écartant le moyen tiré par M. D... C...de l'illégalité de l'arrêté du maire de Paris du 10 mars 2004 l'admettant à la retraite au motif qu'à la date du 16 janvier 2006 cet arrêté n'avait été ni annulé ni déclaré illégal par une décision juridictionnelle antérieure, le tribunal administratif de Paris a commis une erreur de droit ; que son jugement doit dès lors être annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de ce dernier tendant à l'annulation du décompte de liquidation établi le 16 janvier 2006 en ce que ce décompte a retenu la date du 31 décembre 2003 pour la liquidation de sa pension ;
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond, dans la limite de l'annulation ainsi prononcée, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'arrêté du 10 mars 2004 prononçant l'admission de M. D...C...à la retraite à compter du 31 décembre 2003 lui a été notifié le 24 mars 2004, ainsi qu'en atteste sa signature portée sur la copie de cet arrêté, en lui indiquant les voies et délais de recours ; que M. D...C...n'est par suite pas recevable à exciper, au-delà de l'expiration de ces délais, de l'illégalité de cette décision à l'appui de sa contestation du décompte de liquidation qui en tire les conséquences ; que ses conclusions tendant à l'annulation du décompte de liquidation établi le 16 janvier 2006 doivent par suite être rejetées, sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité, contestée par la Caisse des dépôts et consignations ;
Sur les conclusions des consorts C...dirigées contre l'arrêt du 17 octobre 2011 en tant qu'il rejette la requête de M. D...C...contre le jugement n° 0601750 du 4 mars 2009 :
8. Considérant que l'appréciation portée par la cour administrative d'appel de Paris sur l'existence du préjudice moral invoqué par M. D...C..., étant exempte de dénaturation, n'est pas susceptible d'être discutée en cassation ;
9. Considérant toutefois que la cour administrative d'appel de Paris ne s'est pas prononcée sur le bien-fondé du moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de ce que l'arrêté du 10 mars 2004 était illégal en tant qu'il admettait M. D...C...à la retraite à une date antérieure au lendemain, le 1er mai 2004, de la fin de son congé de maladie professionnelle et lui aurait ainsi causé un préjudice en le privant de la possibilité de bénéficier d'une pension de retraite de droit privé ; que, par suite, les consorts C...sont fondés à soutenir que l'arrêt attaqué n'est pas suffisamment motivé et à en demander l'annulation sur ce point ;
10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et dans cette mesure, de régler l'affaire au fond, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
11. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 24 du décret du 9 septembre 1965 relatif au régime de retraite des tributaires de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, reprises à l'article 30 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, applicables à compter du 1er janvier 2004, l'agent qui se trouve dans l'impossibilité définitive et absolue de continuer ses fonctions par suite de maladie, blessure ou infirmité grave dûment établie, peut être admis à la retraite soit d'office, soit sur sa demande ; que M. D...C...ayant demandé, le 18 juin 2003, à être admis à la retraite et n'ayant pas retiré cette demande, la ville de Paris pouvait légalement l'admettre à faire valoir ses droits à la retraite avant l'expiration de son congé de maladie ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. D...C... ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la ville de Paris et de la Caisse des dépôts et consignations, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, la somme que demande les consorts C...au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; que, de même, il n'y a pas lieu de faire droit à leurs conclusions présentées au titre de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas non plus lieu de mettre à la charge de ces derniers la somme que la ville de Paris demande au titre de frais de même nature ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 17 octobre 2011 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé, d'une part, en tant qu'il rejette la requête de M. D...C...tendant à l'annulation du jugement n° 0604740 du 4 mars 2009 du tribunal administratif de Paris et, d'autre part, en tant qu'il rejette les conclusions de la requête de M. D...C...tendant à l'annulation du jugement n° 0601750 du 4 mars 2009 du tribunal administratif de Paris en ce qu'il statue sur l'indemnisation du préjudice tenant à l'impossibilité de bénéficier d'une pension de retraite de droit privé.
Article 2 : Le jugement n° 0604740 du 4 mars 2009 du tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de la demande de M. D...C...tendant à l'annulation du décompte de liquidation en tant qu'il fixe la date de liquidation au 31 décembre 2003.
Article 3 : La demande présentée par M. D...C...devant le tribunal administratif de Paris est rejetée en tant qu'elle tend à l'annulation du décompte de liquidation en ce qu'il fixe la date de liquidation au 31 décembre 2003.
Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi des consorts C...et les conclusions de la requête d'appel de M. D...C...tendant à l'indemnisation du préjudice lié à l'impossibilité dans laquelle M. D...C...s'est trouvé de bénéficier d'une pension de retraite de droit privé sont rejetés.
Article 5 : Les conclusions de la ville de Paris tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à Mme A...C..., à Mme B...C..., à M. E... C..., à la ville de Paris et à la Caisse des dépôts et consignations.