Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 avril et 12 juillet 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la Société Le Nickel (SLN), dont le siège est situé 2, rue Desjardins, BP E5, à Nouméa (98848) ; la SLN demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 10PA01357 du 20 janvier 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'ordonnance n° 1040 du 3 mars 2010 du président du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a refusé d'inviter le gouvernement à retirer ou à abroger diverses dispositions du code minier ;
2°) de mettre à la charge du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, notamment modifiée par la loi organique n° 2009-969 du 3 août 2009 ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
Vu le décret n° 2000-1115 du 22 novembre 2000 ;
Vu le décret n° 2001-492 du 6 juin 2001 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Isabelle Lemesle, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Delphine Hedary, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Odent, Poulet, avocat de la Société Le Nickel (SLN) et à la SCP Meier-Bourdeau, Lecuyer, avocat du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ;
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis à la cour administrative d'appel de Paris que, pour rejeter sa requête tendant à l'annulation de l'ordonnance du 3 mars 2010 par laquelle le président du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande d'annulation de la décision implicite du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie refusant d'inviter le gouvernement à retirer ou à abroger diverses dispositions du code minier, la cour a jugé que, la société Le Nickel ayant saisi le 7 septembre 2009 le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie d'une demande tendant à ce qu'il invite le gouvernement à retirer ou à abroger les articles R. 131-3, R. 131-3-1 et R. 131-3-2 du code minier, le silence gardé pendant plus de deux mois par cette autorité avait fait naître une décision implicite de rejet le 7 novembre 2009 et qu'ainsi la demande tendant à l'annulation de cette décision, dont la société Le Nickel avait saisi le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie le 22 février 2010, soit après l'expiration du délai de deux mois résultant des dispositions de l'article R. 421-2 du code de justice administrative, dans sa rédaction issue du décret visé ci-dessus du 22 novembre 2000, était tardive ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 6-2 de la loi organique du 19 mars 1999 : " Dans les matières qui relèvent de la compétence de l'Etat, (...)sont applicables de plein droit en Nouvelle-Calédonie, sans préjudice des dispositions les adaptant à son organisation particulière, les dispositions législatives et réglementaires qui sont relatives : (...)/ 6° A la procédure administrative contentieuse ;/ 7° Aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations de l'Etat et de ses établissements publics ou avec celles des communes et de leurs établissements publics (...) " ;
3. Considérant que les règles de procédure administrative contentieuse sont, sans préjudice d'éventuelles dispositions d'adaptation, applicables de plein droit aux requêtes présentées devant les juridictions administratives en Nouvelle-Calédonie ; qu'aux termes de l'article R. 421-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, le silence gardé pendant plus de deux mois sur une réclamation par l'autorité compétente vaut décision de rejet./ Les intéressés disposent, pour se pourvoir contre cette décision implicite, d'un délai de deux mois à compter du jour de l'expiration de la période mentionnée au premier alinéa. Néanmoins, lorsqu'une décision explicite de rejet intervient dans ce délai de deux mois, elle fait à nouveau courir le délai du pourvoi (...) " ; que ces règles, qui ont pour objet de permettre la saisine du juge administratif en cas de silence de l'administration sur une réclamation, relèvent de la procédure administrative contentieuse et sont donc applicables de plein droit aux requêtes présentées devant le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ; qu'est à cet égard sans incidence la circonstance que les dispositions édictées par l'Etat relatives aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ne sont applicables de plein droit qu'aux administrations de l'Etat et de ses établissements publics et que l'article 41 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations n'a pas rendu applicables, pour le reste, en Nouvelle-Calédonie, les dispositions de la loi relatives aux décisions implicites ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en jugeant tardive la demande de la société requérante devant le tribunal administratif au motif que le silence gardé pendant plus de deux mois par le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie sur la réclamation dont il avait été saisi le 7 septembre 2009 avait donné lieu à une décision implicite de rejet le 7 novembre 2009 et que la demande d'annulation n'avait été enregistrée au greffe du tribunal administratif que le 22 février 2010, soit au-delà du délai de recours de trois mois, la cour n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit ; qu'en effet ce délai de recours est applicable, en vertu des dispositions de l'article R. 421-6 du code de justice administrative, en Nouvelle-Calédonie, où, en revanche, l'article 19 de la loi du 12 avril 2000, qui conditionne l'opposabilité des délais de recours à la transmission à l'auteur d'une demande d'un accusé de réception comportant les indications prévues par le décret visé ci-dessus du 6 juin 2001, n'est applicable que dans les limites prévues par l'article 41 de la loi ; qu'ainsi, le pourvoi de la Société Le Nickel doit être rejeté ;
5. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la Nouvelle-Calédonie qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Société Le Nickel la somme de 1 500 euros à verser à la Nouvelle-Calédonie, au titre de ces mêmes dispositions ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la Société Le Nickel est rejeté.
Article 2 : La Société Le Nickel versera à la Nouvelle-Calédonie une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la Société Le Nickel et au président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.
Copie en sera adressée pour information au ministre des outre-mer.