Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 septembre et 10 décembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. A...B..., demeurant ...; M. B...demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision n° 2013643 du 25 avril 2013 par laquelle l'Agence française de lutte contre le dopage a, d'une part, prononcé à son encontre la sanction de l'interdiction de participer pendant deux ans aux compétitions et manifestations sportives organisées ou autorisées par les fédérations sportives françaises, d'autre part, en application de l'article L. 232-23-2 du code du sport, demandé à la Fédération française de cyclisme d'annuler ses résultats individuels obtenus le 12 juillet 2012 lors de la sixième étape du Tour de Martinique, avec toutes les conséquences en découlant, y compris le retrait de médailles, points et prix ;
2°) à titre subsidiaire, de réformer la décision de l'Agence en réduisant la sanction prononcée ;
3°) de mettre à la charge de l'Agence française de lutte contre le dopage la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention internationale contre le dopage dans le sport ;
Vu le code de santé publique ;
Vu le code du sport ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Bénédicte Vassallo-Pasquet, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public,
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de M.B..., et à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, Poupot, avocat de l'Agence française de lutte contre le dopage ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. B...a participé le 12 juillet 2012 à la sixième étape du Tour de Martinique de cyclisme, au cours de laquelle il a été soumis à un contrôle antidopage inopiné ; que les résultats des analyses ont fait ressortir la présence d'érythropoïétine (EPO) dans ses urines ; qu'à raison de ces faits, l'Agence a infligé à M.B..., par une décision du 25 avril 2013, la sanction de l'interdiction de participer aux compétitions et manifestations sportives autorisées ou organisées par les fédérations sportives françaises pour une durée de deux ans, assortie de l'annulation des résultats sportifs obtenus le 12 juillet 2012, avec toutes les conséquences en résultant, y compris le retrait de médailles, points et prix ; que M. B...demande l'annulation de cette décision ;
Sur la compétence de l'Agence française de lutte contre le dopage :
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 232-22 du code du sport que l'Agence française de lutte contre le dopage est compétente pour infliger des sanctions disciplinaires à l'égard de personnes participant à des manifestations sportives, lorsque ces dernières ne sont pas licenciées par une fédération sportive française ; qu'en l'espèce, si le requérant soutient avoir été titulaire d'une licence sportive délivrée par la Fédération française de cyclisme en produisant copie d'un bordereau de demande collective de licences émanant du club de l'Union sportive foyalaise, il résulte de l'instruction qu'il a participé à l'épreuve au cours de laquelle il a été contrôlé sous couvert d'une licence russe et qu'il n'était pas titulaire d'une licence délivrée par la Fédération française de cyclisme à la date à laquelle l'Agence a statué ; que le moyen tiré de ce que l'Agence française de lutte contre le dopage n'aurait pas été compétente pour prononcer la sanction litigieuse ne peut, par suite, qu'être écarté ;
Sur la régularité des opérations de contrôle :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que M. B...s'est, le 12 juillet 2012, soumis au contrôle décidé et en a, à l'issue, signé le procès-verbal ; qu'ayant ainsi immédiatement déféré à la convocation qui lui a été signifiée, il ne peut utilement se prévaloir de ce qu'il n'en aurait pas reçu notification ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article R. 232-58 du code du sport que le sportif contrôlé peut faire mentionner sur le procès-verbal de contrôle antidopage s'il a récemment eu recours à une spécialité pharmaceutique, préciser s'il a suivi un traitement médical ou faire toute observation éventuelle sur les conditions de déroulement du contrôle ; que la mise en oeuvre de ces dispositions n'exige pas que soit mis un interprète à la disposition de tout sportif de langue étrangère soumis à un contrôle ; qu'il résulte en tout état de cause de l'instruction que le dirigeant de l'Union sportive foyalaise présent au moment du contrôle a pu assister M. B...et que le requérant a pu porter sur le procès-verbal du contrôle mention de ce qu'il avait pris un " Nasal spray " et du " Fer " ; qu'il appartenait à l'intéressé, s'il s'y croyait fondé, de faire état d'autres traitements suivis et de leur éventuelle justification thérapeutique ;
Considérant, en troisième lieu, que si M. B...soutient que les prélèvements n'ont pas été réalisés dans les conditions prévues par les articles R. 232-51 et suivants du code du sport, ce moyen n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Sur le respect du principe du caractère contradictoire de la procédure et des droits de la défense :
Considérant, qu'aux termes de l'article R. 232-92 du code du sport : " L'intéressé et son défenseur, accompagnés, le cas échéant, de la ou des personnes investies de l'autorité parentale ou du représentant légal, sont convoqués devant la formation disciplinaire de l'Agence française de lutte contre le dopage par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par lettre remise contre récépissé, quinze jours au moins avant la date de la séance au cours de laquelle l'agence est appelée à se prononcer " ; qu'il résulte de l'instruction que l'Agence a porté à la connaissance du requérant les griefs qui lui étaient reprochés, ainsi qu'une copie du rapport d'analyse établi par le département des analyses, lui a fait savoir qu'il pouvait solliciter une analyse de contrôle sur le second échantillon prélevé le 12 juillet 2012 et transmettre tout document permettant de s'assurer qu'il s'était conformé à la réglementation applicable en matière de dopage, au moyen d'une lettre recommandée avec avis de réception en date du 29 octobre 2012 envoyée à l'adresse qu'il avait indiquée sur le procès-verbal de contrôle du 12 juillet 2012 ; que M. B...a accusé réception de cette lettre le 15 novembre 2012 ; que l'Agence lui a ultérieurement adressé le 13 décembre 2012, à la même adresse, une deuxième lettre recommandée l'informant du déroulement de la procédure disciplinaire ; qu'après avoir été informée, par l'Union Cycliste internationale, que le requérant, à l'occasion d'un autre contrôle antidopage, avait déclaré une adresse à Samara (Russie), l'Agence a adressé au requérant, à cette nouvelle adresse, le 12 mars 2013 une nouvelle lettre recommandée avec avis de réception l'informant que le collège de l'Agence se réunirait le 25 avril 2013 pour examiner son dossier, ainsi que des droits et des moyens à sa disposition pour assurer sa défense devant elle ; que ce courrier a été retourné à l'Agence avec la mention, " non réclamé " ; qu'au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il n'aurait pas été dûment avisé de la procédure disciplinaire engagée à son encontre et qu'il aurait été privé de la possibilité de se défendre ;
Sur le bien-fondé et la proportionnalité de la sanction :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'analyse effectuée à la suite du contrôle auquel le requérant a été soumis a fait ressortir la présence d'EPO dans ses urines ; que M. B...ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que d'autres contrôles réalisés les 11, 12 et 14 juillet 2012 n'ont pas fait apparaître la présence de ce produit dès lors, en tout état de cause, que ces autres analyses n'ont pas eu pour finalité la recherche de ce produit ; que l'utilisation de cette substance interdite est de nature à justifier le prononcé d'une sanction disciplinaire sur le fondement des articles L. 232-9 et L. 232-22 du code du sport ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, eu égard à la nature de la substance prise, la sanction d'interdiction de participer pendant deux ans aux compétitions et manifestations sportives n'est pas disproportionnée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision attaquée ; que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à sa charge, à ce même titre, le versement d'une somme de 1 000 euros à verser à l'Agence française de lutte contre le dopage ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : M. B...versera à l'Agence française de lutte contre le dopage la somme de 1 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et à l'Agence française de lutte contre le dopage. Copie en sera adressée, pour information, à la ministre des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports.