Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 décembre 2012 et 11 mars 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...A..., demeurant ... David Street, à Frémont (94538), Californie (Etats-Unis); M. A...demande au Conseil d'Etat :
1° d'annuler l'arrêt n° 10PA04564 du 10 mai 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0810322/7-1 du 29 avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation pour excès de pouvoir de la décision de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) du 21 mai 2008 rejetant son recours gracieux dirigé contre la décision du 29 janvier 2008 refusant l'attribution de bourses scolaires à ses fils Maurice et Marc, d'autre part, à l'annulation de cette décision ;
2° réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros à verser à la SCP Lyon-Caen et Thiriez, son avocat, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu l'arrêt attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2013, présenté pour l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, qui conclut au rejet du pourvoi et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que les moyens du pourvoi ne sont pas fondés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'éducation ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 90-588 du 6 juillet 1990 ;
Vu le décret n° 91-833 du 30 août 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. David Moreau, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. A...et à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 452-2 du code de l'éducation, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision contestée, l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger a pour objet " d'accorder des bourses aux enfants de nationalité française scolarisés dans les écoles et les établissements d'enseignement français à l'étranger dont la liste est fixée par arrêté conjoint du ministre chargé de l'éducation, du ministre chargé des affaires étrangères et du ministre chargé de la coopération " ; que l'article 1er du décret du 30 août 1991 alors en vigueur dispose que cette agence " peut apporter aux enfants des familles françaises résidant à l'étranger une aide à la scolarisation sous forme de bourses " ; que l'article 2 de ce même décret prévoit que, pour bénéficier d'une telle bourse scolaire, l'enfant doit être de nationalité française, fréquenter un établissement inscrit sur la liste établie chaque année par arrêté conjoint et résider avec sa famille dans le pays où est situé l'établissement scolaire fréquenté ; qu'en vertu de l'article 3 du même décret, des commissions locales de l'agence examinent les demandes de bourses scolaires et " répartissent entre les bénéficiaires les crédits délégués par l'agence, dans le respect des critères généraux définis par des instructions spécifiques " ;
2. Considérant, en premier lieu, que la cour administrative d'appel de Paris a relevé que la décision litigieuse du directeur de l'agence refusant d'accorder aux deux fils de M. A... des bourses au titre de l'année scolaire 2007-2008 était fondée sur le fait que M. A... n'avait pas produit les pièces nécessaires à la justification de sa situation financière et patrimoniale alors que le point 2.8.2 de l'instruction générale sur les bourses scolaires au bénéfice des enfants français résidant à l'étranger de l'année 2007 édictée par l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) prévoyait que " Les familles concernées doivent obligatoirement produire l'acte d'achat des biens immobiliers et les tableaux d'amortissement des prêts (si elles ont eu recours à l'emprunt). A défaut, la demande de bourse présentée devra être rejetée " ;
3. Considérant que M. A...soutient que la cour a commis une erreur de droit en ne soulevant pas d'office, d'une part, l'incompétence négative dont serait entaché le décret du 30 août 1991, faute pour celui-ci de définir lui-même les critères d'attribution des bourses, d'autre part, l'incompétence de l'AEFE pour fixer elle-même ces critères par voie réglementaire ;
4. Considérant, toutefois, d'une part, que la loi n'a pas prévu de droit aux bourses scolaires pour les enfants français scolarisés à l'étranger qui rempliraient certaines conditions ; que, dans ces conditions, le gouvernement n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence en s'abstenant de fixer par décret les critères d'attribution de ces bourses ;
5. Considérant, d'autre part, que l'article 3 du décret du 30 août 1991 n'a pas conféré à l'AEFE le pouvoir de déterminer les conditions d'attribution des bourses scolaires pour les enfants français scolarisés à l'étranger, mais a seulement prévu qu'elle édicte des instructions fixant des lignes directrices auxquelles il appartient aux commissions locales de l'agence de se référer, tout en pouvant y déroger lors de l'examen individuel de chaque demande si des considérations d'intérêt général ou les circonstances propres à chaque situation particulière le justifient ; qu'ainsi, le point 2.8.2 de l'instruction en cause, relatif à la prise en compte du patrimoine, indique qu'en principe les familles doivent produire l'acte d'achat des biens immobiliers mais précise ensuite que " toute dérogation à cette règle devra être argumentée dans le procès-verbal de la commission locale " ; que, de même, si ce point prévoit que tout patrimoine immobilier dont la valeur acquise est supérieure à 200 000 euros place la famille hors barème, il précise que cette consigne ne vaut que " sauf situation spécifique [de la famille] " ; que, dans ces conditions, l'instruction en cause a énoncé, à l'intention des commissions locales, des lignes directrices, sans fixer, contrairement à ce que soutient le requérant, de norme à caractère général qui se serait imposée de manière impérative à ces commissions ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la cour administrative d'appel de Paris, même si elle n'a pas cité l'intégralité du point 2.8.2 de l'instruction, n'a pas commis l'erreur de droit alléguée ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 doivent, notamment, être motivées les décisions administratives individuelles qui refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; que ni l'article L. 452-2 du code de l'éducation, ni le décret du 30 août 1991, ni l'instruction prise par l'agence, qui, ainsi qu'il vient d'être dit, ne présente pas de caractère réglementaire, n'ont créé un droit aux bourses scolaires pour les enfants français scolarisés à l'étranger qui rempliraient certaines conditions ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient le requérant, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la décision refusant une telle bourse n'a pas à être motivée au regard de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ;
8. Considérant, en troisième lieu, qu'elle n'a pas non plus entaché son arrêt de contradiction de motifs ni dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en estimant que l'octroi d'une bourse n'était soumis à aucun seuil de ressources, dès lors que l'instruction de l'AEFE n'a déterminé aucun seuil en dessous duquel l'attribution de la bourse constituerait un droit ;
9. Considérant, en quatrième lieu, que la cour a relevé, d'une part, que M. A... n'avait pas produit l'acte d'achat du bien immobilier qu'il possédait et, d'autre part, que les documents qu'il avait fournis n'établissaient pas de façon certaine le montant payé lors de l'acquisition de ce bien ; qu'ainsi, elle ne s'est pas bornée, comme le soutient M.A..., à constater qu'il n'avait pas produit l'acte d'achat du bien immobilier auquel se référait l'instruction de l'agence mais a également examiné, conformément aux orientations définies par l'instruction, les autres documents fournis par le requérant pour établir la valeur de son bien ;
10. Considérant, en dernier lieu, que si M. A...fait valoir qu'il a produit devant la cour un échéancier de remboursement d'emprunt et l'avis de la taxe immobilière acquittée sur son bien au titre de l'année d'acquisition, la cour n'a pas dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en estimant que le requérant n'avait pas ainsi justifié de la valeur d'achat de son bien immobilier ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; que ses conclusions présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A...la somme que demande l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de M. A...est rejeté.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger.
Copie en sera adressée pour information au ministre des affaires étrangères et du développement international.