Vu la procédure suivante :
M. B...D...a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner La Poste à lui verser une somme correspondant à l'indemnité de congés payés due au titre de 172 jours de congés annuels non pris ; après le décès de M.D..., Mme A...C..., sa soeur et unique héritière a repris l'instance. Par un jugement n° 1003657 du 25 octobre 2012, le tribunal administratif a condamné La Poste à verser à la succession de M. D...une somme correspondant à 112,5 jours de congés annuels non pris par ce dernier au titre des années 2004 à 2008.
Par un arrêt n° 12NT03377 du 19 septembre 2014, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel de La Poste contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 novembre 2014 et 19 février 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, La Poste demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de Mme C...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 ensemble l'arrêt C-350/06 et C-520/06 du 20 janvier 2009 de la Cour de justice des Communautés européennes ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;
- le décret n° 84-972 du 26 octobre 1984 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Tristan Aureau, auditeur,
- les conclusions de M. Xavier Domino, rapporteur public,
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Haas, avocat de La Poste ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 relative à certains aspects de l'aménagement du temps de travail : " Congé annuel 1. Les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d'un congé annuel payé d'au moins quatre semaines, conformément aux conditions d'obtention et d'octroi prévues par les législations et/ou pratiques nationales. 2. La période minimale de congé annuel payé ne peut être remplacée par une indemnité financière, sauf en cas de fin de relation de travail " ; qu'en application de la partie B de l'annexe I de cette directive, le délai de transposition de l'article 7 était fixé au 23 mars 2005 ; qu'aux termes de l'article 5 du décret du 26 octobre 1984 relatif aux congés annuels des fonctionnaires de l'Etat : " Le congé dû pour une année de service accompli ne peut se reporter sur l'année suivante, sauf autorisation exceptionnelle donnée par le chef de service. Un congé non pris ne donne lieu à aucune indemnité compensatrice. " ;
2. Considérant qu'il résulte des dispositions du paragraphe 1 de l'article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, telles qu'interprétées par la Cour de justice des Communautés européennes dans son arrêt C-350/06 et C-520/06 du 20 janvier 2009, qu'elles font obstacle à l'extinction du droit au congé annuel à l'expiration d'une certaine période lorsque le travailleur a été en congé de maladie durant tout ou partie de cette période ; que, par suite, les dispositions de l'article 5 du décret du 26 octobre 1984, qui ne prévoient le report des congés non pris au cours d'une année de service qu'à titre exceptionnel, sans réserver le cas des agents qui ont été dans l'impossibilité de prendre leurs congés annuels en raison d'un congé de maladie, et s'opposent à l'indemnisation de ces congés lorsqu'il est mis fin à la relation de travail, sont incompatibles dans cette mesure avec les dispositions de l'article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 ;
3. Considérant toutefois que la cour a jugé que La Poste n'était pas fondée à soutenir que le tribunal administratif de Rennes l'avait à tort condamnée à verser à la succession de M. D...une somme correspondant à l'indemnité de congés payés due au titre des 112,5 jours de congés annuels non pris par l'intéressé au cours des années 2004 à 2008 ; qu'en statuant ainsi alors que le délai de transposition de la directive du 4 novembre 2003 expirait le 23 mars 2005, la cour a commis une erreur de droit ; que par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé ;
4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C...la somme de 1 000 à verser à La Poste, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative de Nantes en date du 19 septembre 2014 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative de Nantes.
Article 3 : Mme C...versera à La Poste une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à La Poste et à Mme A...C....