Vu la procédure suivante :
1° Sous le numéro 397305, par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et deux autres mémoires, enregistrés les 24 février et 23 mai 2016 et les 27 février et 19 octobre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société MK2 Quai de Seine, la société MK2 AetE, la société MK2 Vision, la société MK2 Tolbiac et la société MK2 Quai de Loire demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de la présidente du Centre national du cinéma et de l'image animée de rejet de leur demande tendant à l'abrogation, à titre principal, des dispositions des articles 231-9, 231-11, 231-18, 231-28, 231-29, 231-30, 231-31, 232-24, 232-33, et du 4° de l'article 231-22 du règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée, ou, à titre subsidiaire, du titre III du livre II du règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée, à l'exception des dispositions des articles 232-4 à 232-30 ;
2°) d'enjoindre à la présidente du Centre national du cinéma et de l'image animée d'abroger, à titre principal, les dispositions des articles 231-9, 231-11, 231-18, 231-28, 231-29, 231-30, 231-31, 232-24, 232-33, et du 4° de l'article 231-22 du règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée, ou, à titre subsidiaire, le titre III du livre II du règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée, à l'exception des dispositions des articles 232-4 à 232-30 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le numéro 397309, par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et deux autres mémoires, enregistrés les 24 février et 23 mai 2016 et les 27 février et 19 octobre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société MK2 Quai de Seine, la société MK2 AetE, la société MK2 Vision, la société MK2 Tolbiac et la société MK2 Quai de Loire demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite du Premier ministre de rejet de leur demande tendant à l'abrogation des articles D. 210-5, D. 212-90, D. 212-94, D. 212-95, D. 212-96, D. 212-97 du code du cinéma et de l'image animée ;
2°) d'enjoindre au Premier ministre d'abroger ces dispositions dans un délai de trois mois ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
....................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code du cinéma et de l'image animée ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Marie Gautier-Melleray, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Aurélie Bretonneau, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de la société Mk2 Quai de Seine, de la société Mk2 AetE, de la société Mk2 Vision, de la société Mk2 Tolbiac et de la société Mk2 Quai de Loire et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat du Centre national du cinéma et de l'image animée ;
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes visées ci-dessus présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer pour une seule décision.
Sur la requête n° 397309 :
En ce qui concerne la méconnaissance du principe d'impartialité :
2. Aux termes de l'article D. 212-90 du code du cinéma et de l'image animée : " Le classement des établissements de spectacles cinématographiques en tant qu'établissements d'art et d'essai est effectué chaque année, sur demande des exploitants, par le président du Centre national du cinéma et de l'image animée, après avis de la commission du cinéma d'art et d'essai prévue à l'article D. 212-94. / L'avis de la commission est émis eu égard à la proportion de séances composées d'oeuvres cinématographiques d'art et d'essai par rapport aux séances programmées au cours d'une période de référence définie par décision du président du Centre national du cinéma et de l'image animée. / Cet avis tient également compte : (...) / 4° Des politiques de fidélisation des publics ; / 5° Des conditions d'accueil et de confort. ".
3. D'une part, les dispositions de l'article D. 210-5 du code du cinéma et de l'image animée prévoient que " la liste des oeuvres cinématographiques d'art et d'essai est établie par décision du président du Centre national du cinéma et de l'image animée après consultation de professionnels du cinéma et de personnalités du secteur culturel ". Ces oeuvres doivent répondre à l'une des caractéristiques énumérées aux articles D. 210-3 et D. 210-4 de ce code. D'autre part, les dispositions de l'article D. 212-94 du même code détaillent la composition de la commission du cinéma d'art et d'essai, chargée de donner un avis sur le classement des établissements de spectacles cinématographiques en tant qu'établissements d'art et d'essai. Cette commission comprend notamment, en vertu des dispositions respectives du 2° et du 5° de cet article, huit membres représentant les professionnels du cinéma dont " a) Quatre représentants des exploitants d'établissements de spectacles cinématographiques ; / b) Un représentant des producteurs d'oeuvres cinématographiques ; / c) Deux représentants des distributeurs d'oeuvres cinématographiques ; / d) Un représentant des réalisateurs d'oeuvres cinématographiques ", ainsi que sept personnalités qualifiées. En outre, les dispositions de l'article D. 212-95 du code prévoient que ces membres sont nommés " pour une durée de trois années renouvelable " par le président du Centre national du cinéma et de l'image animée. Enfin, les articles D. 212-96 et D. 212-97 du code détaillent les modalités d'organisation de la commission du cinéma d'art et d'essai.
4. En premier lieu, les dispositions citées au point précédent n'impliquent pas, par elles-mêmes, que les professionnels du cinéma et les personnalités du secteur culturel consultés par le président du Centre national du cinéma et de l'image animée sur le fondement de l'article D. 210-5 du code du cinéma et de l'image animée, ni que les membres composant la commission du cinéma d'art et d'essai, notamment les professionnels du cinéma et les personnalités qualifiées, quels que puissent être leurs intérêts professionnels, méconnaissent, dans les décisions auxquelles ils prennent part, au demeurant à titre consultatif, le principe d'impartialité. Au surplus, ils sont soumis aux règles de déontologie prévues, pour les membres des commissions consultatives, aux articles 122-6 à 122-13 du règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée, lesquelles prévoient notamment que " les membres des commissions sont soumis à une obligation d'impartialité " et que " les membres des commissions ne peuvent prendre part aux délibérations lorsqu'ils ont un intérêt personnel à l'affaire qui en est l'objet ".
5. En deuxième lieu, les circonstances selon lesquelles, d'une part, le mandat des membres de la commission du cinéma d'art et d'essai est renouvelable, d'autre part, une même personne peut siéger successivement en des qualités diverses au sein de la commission du cinéma d'art et d'essai, ne sont pas, en elles-mêmes, de nature à méconnaître le principe d'impartialité.
6. En troisième lieu, les dispositions citées au point 3 n'ont en tout état de cause pas pour objet, ni par elles-mêmes pour effet, de prévoir que les professionnels du cinéma et les personnalités du secteur culturel consultés en application de l'article D. 210-5 du code du cinéma et de l'image animée doivent être également membres de la commission du cinéma d'art et d'essai. Il suit de là qu'elles ne peuvent davantage être regardées comme méconnaissant, pour ce motif, le principe d'impartialité.
7. Dans ces conditions et alors qu'il sera loisible, le cas échéant, aux sociétés requérantes de se prévaloir d'une méconnaissance du principe d'impartialité à l'appui d'un recours formé contre une décision de classement qui leur serait défavorable, en invoquant l'existence d'intérêts personnels disqualifiant un ou plusieurs membres de la commission du cinéma d'art et d'essai, le moyen tiré de ce que les dispositions, que le Premier ministre a refusé d'abroger, des articles D. 210-5 et D. 212-94 à D. 212-97 du code du cinéma et de l'image animée méconnaîtraient par elles-mêmes ce principe doit être écarté.
En ce qui concerne les critères prévus à l'article D. 212-90 du code du cinéma et de l'image animée :
8. L'article D. 212-90 du code du cinéma et de l'image animée, cité au point 2, prévoit que l'avis de la commission du cinéma d'art et d'essai, lorsqu'elle se prononce sur le classement d'un établissement de spectacles cinématographiques en tant qu'établissement d'art et d'essai, tient également compte " des politiques de fidélisation des publics " et des " conditions d'accueil et de confort ". Contrairement à ce qui est soutenu, ces éléments, qui permettent d'apprécier l'attractivité des établissements de spectacles cinématographiques et, partant, leur capacité à mettre en valeur des oeuvres d'art et essai et qui, par ailleurs, ne présentent qu'un caractère secondaire permettant de pondérer le critère principal tenant à la proportion de séances consacrées à des oeuvres cinématographiques d'art et d'essai dans les séances programmées, ne sont pas dépourvus de lien avec l'objet de l'aide en cause.
9. Il résulte de tout ce qui précède que, sous le numéro 397309, les requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation du refus d'abroger qu'elles attaquent. Leur requête doit être rejetée, y compris leurs conclusions à fin d'injonction ainsi que celles qu'elles présentent au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge des sociétés requérantes la somme de 1 000 euros à verser à l'Etat, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur la requête n° 397305 les conclusions :
En ce qui concerne la méconnaissance du principe d'impartialité :
10. D'une part, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été énoncés aux points 2 à 7 de la présente décision, le moyen tiré de ce que les dispositions des articles 231-28 et 231-29 du règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée, qui se bornent à reprendre les dispositions des articles D. 212-94 et D. 212-95 du code du cinéma et de l'image animée, méconnaîtraient le principe d'impartialité ne peut qu'être écarté.
11. D'autre part, les dispositions de l'article 231-30 de ce règlement prévoient que la commission d'art et d'essai rend ses avis en tenant compte des recommandations formulées par des groupes de travail interrégionaux, lesquels, outre de représentants du Centre national du cinéma et de l'image animée, sont notamment composés de : " 1° Trois représentants désignés par la Fédération nationale des cinémas français (FNCF) et par le Syndicat des cinémas d'art, de répertoire et d'essai (SCARE) ; / 2° Deux représentants désignés par l'association dénommée " Association française des cinémas d'art et d'essai " (AFCAE) ; (...) ". L'article 231-18 précise que " la décision d'attribution du classement, d'un label et d'une aide est prise après avis de la commission du cinéma d'art et d'essai ". Par ailleurs, aux termes de l'article 231-31 de ce règlement, le comité de pilotage de la commission du cinéma d'art et d'essai est notamment composé " 2° Du président de l'association dénommée " Association française des cinémas d'art et d'essai " (AFCAE) " et " 4° Du président du Syndicat des cinémas d'art, de répertoire et d'essai (SCARE) ". Sur le fondement de l'article 231-11 de ce règlement, ce comité peut proposer des ajustements annuels des modalités de calcul de l'aide à l'art et essai.
12. Les sociétés requérantes soutiennent que les représentants désignés par le SCARE et l'AFCAE au sein des groupes de travail interrégionaux ainsi que les présidents de ces entités, qui siègent au comité de pilotage de la commission du cinéma d'art et d'essai, sont, parallèlement, susceptibles d'être consultés par le président du Centre national du cinéma et de l'image animée lorsqu'il établit la liste des oeuvres cinématographiques d'art et d'essai conformément aux dispositions de l'article D. 210-5 du code du cinéma et de l'image animée et en déduisent que les dispositions citées au point précédent méconnaissent le principe d'impartialité, dans la mesure où ces personnalités pourraient exercer une influence sur la constitution de la liste des oeuvres cinématographiques d'art et d'essai en vue de favoriser les choix de programmation opérés par certains établissements, puisque la proportion de telles oeuvres dans le total des séances programmées constitue le critère principal au regard duquel la commission du cinéma d'art et d'essai émet son avis sur le classement d'un établissement en tant qu'établissement d'art et d'essai.
13. Les dispositions citées au point 11 n'impliquent pas, par elles-mêmes, que les personnalités désignées pour siéger au sein des groupes de travail interrégionaux ou du comité de pilotage de la commission du cinéma d'art et d'essai, alors même qu'elles seraient consultées par le président du Centre national du cinéma et de l'image animée lorsqu'il établit la liste des oeuvres cinématographiques d'art et d'essai conformément aux dispositions de l'article D. 210-5 du code du cinéma et de l'image animée, méconnaissent le principe d'impartialité. Dans ces conditions et alors qu'il sera loisible, le cas échéant, aux sociétés requérantes de se prévaloir d'une méconnaissance de ce principe à l'appui d'un recours formé contre une décision établissant la liste des oeuvres cinématographiques d'art et d'essai, le moyen tiré de ce que ces dispositions méconnaîtraient le principe d'impartialité doit être écarté.
En ce qui concerne les aides prévues aux articles 231-22, 232-24 et 232-33 du règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée :
14. Aux termes de l'article 231-22 du règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée : " Pour être admis au bénéfice des aides à la programmation difficile, les exploitants d'établissements de spectacles cinématographiques répondent aux conditions suivantes : (...) 4° Ne pas être propriétaires ou assurer l'exploitation de plus de cinquante salles de spectacles cinématographiques dans les conditions prévues à l'article 232-9 ". De la même manière, en vertu de l'article 232-33 de ce règlement, les aides pour la création et la modernisation des établissements de spectacles cinématographiques implantés dans des zones géographiques dont les agglomérations sont insuffisamment équipées ou dans des agglomérations insuffisamment équipées en établissements de spectacles cinématographiques classés d'art et d'essai ne sont pas attribuées aux personnes qui sont propriétaires ou assurent l'exploitation, dans les conditions prévues à l'article 232-9, de plus de cinquante salles de spectacles cinématographiques. Cette condition est également reprise au second alinéa de l'article 232-24 du même règlement, relatif à la majoration des plafonds des avances qui peuvent être accordées, pour les aides financières automatiques, " dans le cas de travaux substantiels de restructuration ou de rénovation d'établissements ainsi que dans le cas de création ". Les requérants soutiennent que ces dispositions, en ce qu'elles comportent une telle condition restrictive, méconnaissent le principe d'égalité, les règles de concurrence, la liberté d'entreprendre et la liberté du commerce et de l'industrie et qu'elles constituent une discrimination prohibée par les stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er de son premier protocole additionnel.
15. Le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier.
16. D'une part, ainsi qu'il a été rappelé au point 14, l'aide prévue à l'article 231-22 du règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée a pour objet de soutenir la programmation difficile et celle que définit l'article 232-33 vise à encourager la diffusion du cinéma d'art et d'essai sur tout le territoire national, en soutenant les établissements implantés dans des zones insuffisamment équipées. Le fait d'exclure du bénéfice de ces aides les personnes qui sont propriétaires ou assurent l'exploitation, dans les conditions prévues à l'article 232-9, de plus de cinquante salles de spectacles cinématographiques constitue une différence de traitement qui est sans rapport direct avec l'objet des normes en cause.
17. D'autre part, l'objet des dispositions prévues à l'article 232-24 est d'octroyer un avantage de trésorerie aux établissements qui entreprennent des travaux substantiels de rénovation, de restructuration ou de création, en majorant le plafond des avances auxquelles ils peuvent prétendre sur les aides financières automatiques qui leur sont versées. Le fait d'exclure du bénéfice de ce dispositif les personnes qui sont propriétaires ou assurent l'exploitation, dans les conditions prévues à l'article 232-9, de plus de cinquante salles de spectacles cinématographiques n'a pas pour effet de priver ces personnes d'une aide, mais est seulement susceptible de conduire à une diminution des avances consenties. Dans ces conditions, dès lors que ces personnes sont moins susceptibles d'être exposées à des difficultés de trésorerie que les exploitants plus modestes, la différence de traitement apparaît en rapport direct avec l'objet du mécanisme en cause et n'est pas manifestement disproportionnée au regard de l'objectif d'utilité publique poursuivi. Il suit de là que ces dispositions, qui ne revêtent pas un caractère arbitraire, ne méconnaissent pas le principe d'égalité et ne constituent pas davantage une discrimination prohibée par les stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er de son premier protocole additionnel. Elles ne portent pas davantage atteinte, par elles-mêmes, aux règles de concurrence, à la liberté d'entreprendre et à la liberté du commerce et de l'industrie.
18. Il résulte de ce qui précède que les sociétés requérantes sont seulement fondées à demander l'annulation du refus d'abroger qu'elles attaquent en tant qu'il concerne le 4° de l'article 231-22 et l'article 232-33 du règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée.
En ce qui concerne les déterminants du coefficient minorateur prévu à l'article 231-9 du règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée :
19. Les dispositions de l'article 231-9 du règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée prévoient que les aides financières sélectives à l'art et essai peuvent être affectées d'un coefficient minorateur, qui " résulte de l'appréciation des conditions d'accueil et de confort dans la ou les salles des établissements, de la diversité des oeuvres cinématographiques d'art et d'essai programmées, ainsi que du nombre de semaines et de séances, hors période de travaux, durant lesquelles sont représentées ces oeuvres ". Elles précisent également les éléments à prendre en compte à cet effet, notamment : " 5° La qualité des informations fournies sur la situation économique et financière des établissements, conformément à la grille prévue à l'annexe 35 du présent livre ; " et " 9° L'existence de conditions financières pour la diffusion des bandes-annonces indiquées dans la demande ".
20. En premier lieu, ces critères, suffisamment précis, ne sont pas arbitraires et valent pour tous les exploitants qui demandent à bénéficier de l'aide à l'art et essai. Dès lors, ils ne sauraient, en eux-mêmes, porter atteinte au principe d'égalité ni constituer une discrimination au sens des stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention.
21. En deuxième lieu, dans la mesure où, ainsi qu'il a été rappelé au point précédent, ces critères s'appliquent à l'ensemble des établissements de spectacles cinématographiques et qu'ils contribuent à ajuster le montant de l'aide attribuée à ces établissements en fonction de leurs caractéristiques propres, objectivement appréciées, ils n'ont pas davantage pour objet, ni en eux-mêmes pour effet, de porter atteinte aux règles de concurrence, à la liberté d'entreprendre et à la liberté de commerce et de l'industrie.
22. En troisième lieu, le critère mentionné au 5° de l'article 213-9 précité, qui n'est mobilisé qu'à titre secondaire pour pondérer à la baisse l'aide à l'art et essai accordée aux exploitants, permet de pénaliser ceux d'entre eux qui fourniraient des informations incohérentes ou trop succinctes sur leur situation économique et financière et vise ainsi à moduler l'aide financière sélective attribuée aux exploitants selon un critère en rapport avec son objet.
23. En revanche, en prévoyant que la seule existence de conditions financières pour la diffusion de bandes annonces, au surplus indifférenciées, permet de moduler à la baisse l'aide financière sélective attribuée aux exploitants, le 9° de l'article 231-9 du règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée retient un critère qui, ainsi défini, est sans rapport avec la promotion des oeuvres cinématographiques d'art et d'essai.
24. Il résulte de tout ce qui précède que, sous le numéro 397305, les sociétés requérantes sont seulement fondées à demander l'annulation de la décision par laquelle le président du Centre du cinéma et de l'image animée a refusé d'abroger le 4° de l'article 231-22, l'article 232-33 et le 9° de l'article 231-9 du règlement général des aides financières du Centre du cinéma et de l'image animée et à ce qu'il soit enjoint au Centre national du cinéma et de l'image animée de procéder à cette abrogation dans un délai de trois mois à compter de la présente décision. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CNC la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Le refus de la présidente du Centre national du cinéma et de l'image animée d'abroger le 4° de l'article 231-22, l'article 232-33 et le 9° de l'article 231-9 du règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée est annulé.
Article 2 : Il est enjoint au Centre national du cinéma et de l'image animée d'abroger le 4° de l'article 231-22, l'article 232-33 et le 9° de l'article 231-9 du règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée, dans un délai de trois mois à compter de la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête n° 397305 est rejeté.
Article 4 : La requête n° 397309 est rejetée.
Article 5 : Sous le numéro 397305, le Centre national du cinéma et de l'image animée versera une somme totale de 1 000 euros à la société MK2 Quai de Seine, à la société MK2 AetE, à la société MK2 Vision, à la société MK2 Tolbiac et à la société MK2 Quai de Loire au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Sous le numéro 397309, la société MK2 Quai de Seine, la société MK2 AetE, la société MK2 Vision, la société MK2 Tolbiac et la société MK2 Quai de Loire verseront une somme totale de 1 000 euros à l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 7 : La présente décision sera notifiée à la société MK2 Quai de Seine, première requérante dénommée, au Centre national du cinéma et de l'image animée et au Premier ministre. Les autres requérantes seront informées de la présente décision par la SCP Spinosi et Sureau, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d'Etat.