Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association syndicale libre (ASL) Les Vignes de l'Ecluse et la société à responsabilité limitée (SARL) Citya Cogesim ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 4 avril 2019 par lequel le maire de Montpellier s'est opposé à la déclaration préalable présentée par ladite société pour la mise en place d'un portail, d'un portillon et d'une clôture, ainsi que la décision du 19 juin 2019 par laquelle la même autorité a rejeté leur recours gracieux introduit le 23 mai 2019 contre cet arrêté.
Par un jugement n° 1904430 du 24 juin 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande et a mis à leur charge une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 24 août 2021 sous le n° 21MA03652 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le n° 21TL03652 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, l'association syndicale libre Les Vignes de l'Ecluse et la société à responsabilité limitée Citya Cogesim, représentées par Me Avallone, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 24 juin 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 4 avril 2019 et la décision du 19 juin 2019 ;
3°) d'enjoindre au maire de Montpellier d'accorder l'autorisation d'urbanisme sollicitée par la société Citya Cogesim dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer la déclaration préalable dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Montpellier une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- le tribunal administratif de Montpellier a commis des erreurs de droit en écartant les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de l'arrêté en litige et de l'exception d'illégalité de l'emplacement réservé C 210 institué par le plan local d'urbanisme ;
- l'arrêté en litige est insuffisamment motivé ;
- l'institution de l'emplacement réservé C 210 est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation en ce que la voie ne présente pas la largeur imposée par l'article 3 du règlement du plan local d'urbanisme applicable en zone 2U2 ;
- l'emplacement réservé C 210 est dénué de toute utilité dès lors qu'il existe déjà une liaison permettant de joindre les deux voies publiques concernées ;
- les pièces du plan local d'urbanisme ne permettent pas de connaître précisément la superficie et l'emprise de l'emplacement réservé susmentionné ;
- l'emplacement réservé en cause est devenu illégal en ce que la commune a renoncé à son projet de création d'une voie de liaison sur l'emprise considérée ;
- l'installation d'un portail n'interdit pas totalement la création de la voie projetée dès lors qu'il pourrait n'être fermé que pendant certaines plages horaires ;
- la prescription émise par le maire dans le permis de construire du 2 novembre 2015 ne leur est pas opposable et ne saurait donc constituer un motif de refus.
Par un mémoire en défense enregistré le 3 mai 2022, la commune de Montpellier, représentée par la SCP CGCB et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge solidaire des requérantes une somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 2 septembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 octobre 2022.
Les parties ont été informées le 14 novembre 2023, au titre des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour était susceptible de relever d'office le moyen tiré de ce que le maire de Montpellier a méconnu le champ d'application de la loi en s'opposant au projet en raison d'un emplacement réservé institué par le plan local d'urbanisme alors qu'une telle servitude n'est pas opposable à une clôture.
La commune de Montpellier, représentée par la SCP CGCB et associés, a présenté le 14 novembre 2023 ses observations en réponse à cette information.
L'association et la société requérantes, représentées par Me Avallone, ont présenté le 17 novembre 2023 leurs observations en réponse à cette information.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,
- les observations de Me Avallone, représentant les personnes morales requérantes, et de Me Arroudj, représentant la commune de Montpellier.
Une note en délibéré produite par la commune de Montpellier, représentée par la SCP CGCB et associés, a été enregistrée le 24 novembre 2023.
Considérant ce qui suit :
1. La société Citya Cogesim a déposé le 22 mars 2019, en sa qualité de mandataire de l'association syndicale libre Les Vignes de l'Ecluse, une déclaration préalable de travaux portant sur la mise en place d'un portail, d'un portillon et d'une clôture sur la parcelle cadastrée section DS n° 774, située avenue du Pont Trinquat, sur le territoire de la commune de Montpellier (Hérault). Par arrêté du 4 avril 2019, le maire de cette commune s'est opposé à cette déclaration préalable de travaux. La société pétitionnaire a présenté un recours gracieux contre cet arrêté le 23 mai 2019, lequel a été rejeté par le maire de Montpellier le 19 juin suivant. Par la présente requête, l'association syndicale libre Les Vignes de l'Ecluse et la société Citya Cogesim relèvent appel du jugement du 24 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande d'annulation de l'arrêté du 4 avril 2019 et de la décision du 19 juin 2019.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. D'une part aux termes de l'article L. 151-41 du code de l'urbanisme : " Le règlement peut délimiter des terrains sur lesquels sont institués : / 1° Des emplacements réservés aux voies et ouvrages publics dont il précise la localisation et les caractéristiques ; / (...) ".
3. D'autre part, selon l'article R. 151-41 du même code : " Afin d'assurer l'insertion de la construction dans ses abords, la qualité et la diversité architecturale, urbaine et paysagère des constructions ainsi que la conservation et la mise en valeur du patrimoine, le règlement peut : / (...) / 2° Prévoir des dispositions concernant les caractéristiques architecturales des façades et toitures des constructions ainsi que des clôtures ; / (...) ". Selon l'article R. 151-43 du même code : " Afin de contribuer à la qualité du cadre de vie, assurer un équilibre entre les espaces construits et les espaces libres et répondre aux enjeux environnementaux, le règlement peut : / (...) / 8° Imposer pour les clôtures des caractéristiques permettant de préserver ou remettre en état les continuités écologiques ou de faciliter l'écoulement des eaux. ".
4. Sont applicables aux clôtures, dont celles qui prennent la forme d'un mur, les seules prescriptions du règlement d'un plan local d'urbanisme édictées spécifiquement pour régir leur situation, sur le fondement des articles R. 151-41 et R. 151-43 précités du code de l'urbanisme. L'inscription d'une parcelle en emplacement réservé au titre de l'article L. 151-41 du même code ne peut, par elle-même, justifier légalement l'opposition à l'édification d'une clôture.
5. Il ressort des pièces du dossier et notamment des pièces produites par la société pétitionnaire à l'appui de sa déclaration préalable que les travaux en litige ont pour objet de mettre en place une clôture grillagée incluant un portail et un portillon le long de l'avenue du Pont Trinquat sur la limite nord de la parcelle cadastrée DS n° 774. Il ressort par ailleurs de la motivation de l'arrêté du 4 avril 2019 que, pour s'opposer aux travaux ainsi déclarés, le maire de Montpellier a, d'une part, relevé que la parcelle en cause était grevée d'un emplacement réservé numéroté C 210, institué par le plan local d'urbanisme de la commune pour la réalisation d'une voie de liaison entre l'avenue du Pont Trinquat et l'impasse de l'Etang de Vic, et, d'autre part, indiqué que la mise en place d'un portail avec portillon sur l'emplacement réservé en bordure de l'avenue n'était pas autorisée. Il résulte de ce qui a été exposé au point 4 du présent arrêt qu'en s'opposant ainsi à la réalisation d'une clôture en raison de la seule existence d'un emplacement réservé sur le terrain concerné, le maire a méconnu le champ d'application de la loi.
6. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de justice administrative, les moyens invoqués par l'association et la société requérantes ne sont pas de nature à justifier, en l'état du dossier, l'annulation de l'arrêté et de la décision du maire de Montpellier.
7. Il résulte de ce qui précède que l'association syndicale libre Les Vignes de l'Ecluse et la société Citya Cogesim sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Montpellier du 4 avril 2019 ainsi que de sa décision du 19 juin 2019.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. Lorsque le juge annule un refus d'autorisation ou une opposition à déclaration préalable après avoir censuré l'ensemble des motifs que l'autorité compétente a énoncés dans sa décision, ainsi que, le cas échéant, les motifs qu'elle a pu invoquer en cours d'instance, il doit, s'il est saisi de conclusions à fin d'injonction, ordonner à l'autorité compétente de délivrer l'autorisation ou une décision de non-opposition. Il n'en va autrement que s'il résulte de l'instruction soit que les dispositions en vigueur à la date de la décision annulée interdisent de l'accueillir pour un motif que l'administration n'aurait pas relevé, soit que, par suite d'un changement de circonstances, la situation de fait existant à la date de l'arrêt y fait obstacle.
9. Le présent arrêt censure l'unique motif opposé par le maire de Montpellier dans l'arrêté du 4 avril 2019 par lequel il s'est opposé à la déclaration préalable présentée par la société Citya Cogesim. La commune intimée n'a invoqué en cours d'instance aucun autre motif susceptible de justifier légalement une opposition aux travaux déclarés. Il ne résulte pas de l'instruction que les dispositions en vigueur le 4 avril 2019 ou les circonstances de fait existant à la date du présent arrêt feraient obstacle à la délivrance de l'autorisation sollicitée. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au maire de Montpellier de prendre une décision de non-opposition sur la déclaration préalable en litige dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt. En l'état de l'instruction, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que soit mise à la charge de l'association syndicale libre Les Vignes de l'Ecluse et de la société Citya Cogesim, qui n'ont pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la commune de Montpellier au titre des frais non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune intimée une somme globale de 1 500 euros à verser aux personnes morales requérantes à ce titre.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 24 juin 2021 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du maire de Montpellier du 4 avril 2019 et sa décision du 19 juin 2019 sont annulés.
Article 3 : Il est enjoint au maire de Montpellier de prendre une décision de non-opposition sur la déclaration préalable présentée par la société Citya Cogesim dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.
Article 4 : La commune de Montpellier versera une somme globale de 1 500 euros à l'association syndicale libre Les Vignes de l'Ecluse et à la société Citya Cogesim au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à l'association syndicale libre Les Vignes de l'Ecluse, à la société à responsabilité limitée Citya Cogesim et à la commune de Montpellier.
Délibéré après l'audience du 23 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Moutte, président,
M. Jazeron, premier conseiller,
Mme Lasserre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 décembre 2023.
Le rapporteur,
F. JazeronLe président,
J.F. Moutte
La greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 21TL03652