Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge, en droits, pénalités et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 à 2012.
Par un jugement n° 1904203 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 24 août 2021, M. A..., représenté par Me Mattei, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1904203 du tribunal administratif de Bordeaux du 15 juin 2021 ;
2°) de prononcer la décharge ou, à titre subsidiaire, la réduction en droits, pénalités et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 à 2012 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
En ce qui concerne la régularité du jugement :
- le tribunal a entaché sa décision d'erreurs de droit en ce qui concerne la fixation de son foyer fiscal en France et l'application de la loi fiscale nationale, la catégorie d'imposition au regard de sa qualité de salarié, l'absence de présentation d'éléments réels de l'exploitation, la méconnaissance des obligations et garanties résultant de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales et en inversant la charge de la preuve ;
- le jugement est entaché de dénaturation des faits et pièces du dossier et de contradictions de motifs ;
- les premiers juges ont omis de statuer sur la contre-évaluation chiffrée des recettes ainsi que sur les exemples concrets apportés quant à l'exagération des bases d'imposition au titre de la reconstitution des charges et frais déductibles ;
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
- en méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, ni la lettre du 23 mars 2015 de la société HLM Ciliopée Habitat, ni les comptes " caisse " et " banque " ainsi que la balance du fournisseur de la société Belotti, pas plus que les notes prises par le vérificateur à l'occasion de la vérification de comptabilité de cette société, ne lui ont été communiqués par le service ;
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
- l'administration ne démontre nullement qu'il aurait eu un établissement stable ainsi que son foyer fiscal en France au titre des années 2010, 2011 et 2012 ;
- il n'a jamais exercé une activité professionnelle indépendante en France mais uniquement en tant que salarié de la société Belotti, avec qui il existe un lien de subordination ; dès lors, les revenus qu'il a perçus ne pouvaient être imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ;
- la méthode de reconstitution des recettes est radicalement viciée dès lors que la prise en compte des sommes prétendument réglées par la société Belotti résulte uniquement de l'analyse des éléments comptables de cette société, qui ne lui ont jamais été communiqués ; de même, les relevés des comptes bancaires qu'il détient en Pologne n'ont pas été communiqués ;
- les déclarations de chiffre d'affaires qu'il a déposées en Pologne au titre des années litigieuses constituent des éléments réels d'exploitation dont le vérificateur aurait dû tenir compte lors de la reconstitution du chiffre d'affaires ;
- la méthode de reconstitution des charges est radicalement viciée dès lors qu'il n'a pas été tenu compte des éléments réels d'exploitation dont le vérificateur a pourtant fait état au cours des opérations de contrôle, tels l'existence de salariés ou de matériel ;
- la somme de 8 000 euros inscrite en crédit sur son relevé bancaire d'un compte détenu auprès de la CRCAM d'Aquitaine correspond à un chèque qui a été rejeté le 18 juin 2012 ;
- il convient d'appliquer une méthode alternative de reconstitution consistant, pour les recettes, à ne prendre en compte que les sommes inscrites au crédit de ses comptes bancaires détenus auprès de la CRCAM d'Aquitaine et, pour les charges, d'appliquer un coefficient de 80 %, correspondant aux rémunérations versées aux salariés de l'entreprise, augmentées des autres frais et charges ;
- l'imposition en France de ses bénéfices méconnaît les stipulations de la convention fiscale franco-polonaise du 20 juin 1975 tendant à éviter les doubles impositions dès lors qu'il a déjà été imposé en Pologne ;
En ce qui concerne le bien-fondé des majorations :
- eu égard aux irrégularités entachant la procédure d'imposition, il est fondé à demander, en application des dispositions de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales, la décharge des majorations qui lui ont été appliquées.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mars 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens soulevés par le requérant sont inopérants ou non fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention fiscale franco-polonaise du 20 juin 1975 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Michaël Kauffmann,
- et les conclusions de Mme Nathalie Gay, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. L'entreprise individuelle de M. A..., immatriculée en Pologne, qui exerce une activité de travaux de finition dans le domaine du bâtiment, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité de son établissement situé en France au titre de la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2013. A l'issue des opérations de contrôle, par proposition de rectification du 18 septembre 2015, des rehaussements lui ont été notifiés notamment dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux au titre des années 2010 à 2012, en conséquence de la vérification de comptabilité de son entreprise. M. A... relève appel du jugement du 15 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits, pénalités et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 à 2012.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée, dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. M. A... ne peut donc utilement soutenir que le tribunal a entaché sa décision d'erreurs de droit en ce qui concerne la fixation de son foyer fiscal en France et l'application de la loi fiscale nationale, la catégorie d'imposition au regard de sa qualité de salarié, l'absence de présentation d'éléments réels de l'exploitation, la méconnaissance des obligations et garanties résultant de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales et en inversant la charge de la preuve. Il en va de même des moyens tirés de la dénaturation des faits et pièces du dossier ou de la contradiction de motifs ayant entaché le jugement entrepris.
3. En deuxième lieu, la contre-évaluation chiffrée des recettes proposée par M. A... dans sa requête de première instance consistait, en définitive, à ne pas tenir compte, ainsi que l'a fait le vérificateur, des sommes réglées par la société Belotti et non retracées sur ses comptes bancaires français ainsi que des sommes directement virées par l'Office public de l'habitat de Lot-et-Garonne Habitalys et la société HLM Ciliopée Habitat sur les comptes bancaires ouverts à son nom en Pologne. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments de la demande, ont suffisamment motivé leur réponse à ce moyen, au point 15 du jugement attaqué. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait irrégulier pour ce motif.
4. En dernier lieu, il ressort du point 17 du jugement attaqué que, contrairement à ce que soutient M. A..., les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments de la demande, ont suffisamment motivé leur réponse au moyen tiré de ce que le coefficient de charges, compte tenu des dépenses de personnel réalisées en espèces, des retraits en espèces figurant sur ses relevés de compte et des autres frais de l'entreprise, peut être porté à 80 %. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait irrégulier pour ce motif.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ". Il résulte de ces dispositions qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des documents et renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour mettre à même l'intéressé d'y avoir accès avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. La méconnaissance, par l'administration, de l'obligation de communication prévue par ces dispositions affecte les impositions pour lesquelles elle a utilisé les renseignements et documents en cause, que ce soit pour conduire la procédure d'imposition ou pour déterminer le montant de l'impôt.
6. De première part, M. A... soutient que la lettre du 23 mars 2015 que la société HLM Ciliopée Habitat a envoyé au service en réponse à une demande d'information non contraignante qui lui a été adressée le 16 février 2015 ne lui a pas été communiquée. Il résulte toutefois de l'instruction et notamment des termes de la proposition de rectification du 18 septembre 2015 adressée à l'entreprise de M. A... que, pour constater que cette dernière dispose en France d'une installation matérielle permanente et autonome puis établir l'imposition contestée, l'administration ne s'est pas fondée sur les renseignements succincts fournis par la société Ciliopée Habitat dans son courrier du 23 mars 2015, dont il n'a d'ailleurs jamais été fait mention au cours de la procédure de contrôle, mais, notamment, sur la réponse de cette société du 6 mai 2015 à un droit de communication du 8 avril 2015 qui, à la demande du requérant, lui a été communiquée en annexe à la réponse aux observations du contribuable du 19 novembre 2015. Par suite, les renseignements en cause n'ayant pas effectivement été utilisés pour conduire la procédure d'imposition ou pour déterminer le principe ou le montant de l'impôt, le moyen doit être écarté.
7. De seconde part, l'obligation qui est faite à l'administration de tenir à la disposition du contribuable qui les demande ou de lui communiquer, avant la mise en recouvrement des impositions, les documents ou copies de documents contenant les renseignements qu'elle a utilisés pour procéder aux redressements ne peut porter que sur les documents effectivement détenus par les services fiscaux. Dans l'hypothèse où les documents que le contribuable demande à examiner sont détenus non par l'administration fiscale, qui les a seulement consultés à l'occasion d'une vérification de comptabilité concernant une autre société, mais par cette dernière, il appartient à l'administration fiscale, d'une part, d'en informer l'intéressé afin de le mettre en mesure d'en demander communication à ce tiers et, d'autre part, de porter à sa connaissance l'ensemble des renseignements fondant l'imposition recueillis à l'occasion de la vérification de comptabilité de cette autre société.
8. Dans la proposition de rectification du 18 septembre 2015 adressée à l'entreprise de M. A..., l'administration a indiqué que, pour évaluer le montant des règlements versés par la société Belotti à M. A..., le vérificateur s'est fondé sur son analyse des comptes " caisse " et " banque " ainsi que de la balance du fournisseur de la société, consultés à l'occasion de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet en 2012 et dont le détail a été repris dans la proposition de rectification. Dans ses observations en réponse, M. A... a demandé à l'administration fiscale de lui communiquer les éléments issus de la vérification de comptabilité de la société Belotti sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition litigieuse. Dans la réponse aux observations du contribuable du 19 novembre 2015, l'administration a indiqué qu'aucune copie de ces documents comptables n'avait été conservée et que les éléments mentionnés dans la proposition de rectification résultent de notes prises par le vérificateur à l'occasion du contrôle opéré à l'endroit de la société Belotti. Par suite, quand bien même l'administration n'a pas expressément renvoyé M. A... vers la société Belotti et n'a pas repris, dans sa réponse, le détail des éléments comptables d'ores et déjà mentionné dans la proposition de rectification, la garantie prévue par les dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales tenant à la communication des documents et renseignements obtenus de tiers doit être regardée, en l'espèce, comme ayant été respectée. Par ailleurs, les notes prises par le vérificateur à l'occasion de la vérification de comptabilité de la société Belotti ne constituant pas par elles-mêmes des documents obtenus de tiers au sens de ces dispositions, un défaut de communication de ces notes n'entraine aucune irrégularité.
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne le principe d'imposition :
9. En premier lieu, pour contester le principe même de son imposition en France et l'application de la loi fiscale nationale, M. A... reprend en appel le moyen tiré de ce que l'administration ne démontre pas qu'au cours de la période vérifiée, son entreprise aurait disposé d'un établissement stable sur le territoire et que lui-même aurait fixé son foyer fiscal en France. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
10. En second lieu, aux termes de l'article 34 du code général des impôts : " Sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par des personnes physiques et provenant de l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale. (...) ".
11. M. A..., qui s'est déclaré depuis le 20 avril 2009 comme exerçant une activité professionnelle sous la forme d'une entreprise individuelle, immatriculée en Pologne, soutient qu'il n'a jamais exercé une activité professionnelle indépendante en France mais uniquement en tant que salarié contremaître de la société Belotti, avec qui il existe un lien de subordination. Toutefois, l'intéressé ne produit aucun justificatif de nature à établir qu'il aurait été un salarié de la société Belotti, tels un contrat de travail, des fiches de paie ou des justificatifs de son affiliation obligatoire aux assurances sociales. Par ailleurs, il résulte de la réponse du 13 mars 2015 apportée au service par l'Office public de l'habitat de Lot-et-Garonne Habitalys que la société Belotti lui a fourni, dans le cadre d'une opération de construction, un acte de sous-traitance comportant en annexe une note indiquant les moyens en personnel et en matériel de l'entreprise de M. A..., signée par ce dernier, et que la société Belotti, titulaire du marché, a demandé le paiement direct de son sous-traitant. De même, la société HLM Ciliopée Habitat a fourni au vérificateur, le 6 mai 2015, des états de paiement direct à l'entreprise A... pour des prestations effectuées en 2011 et en 2012 en qualité de sous-traitant de la société Belotti. Enfin, il résulte du procès-verbal de l'entretien réalisé avec le vérificateur dans le cadre du débat oral et contradictoire le 30 mars 2015 que M. A... a admis qu'il disposait de tout le matériel nécessaire à la réalisation des travaux confiés par la société Belotti, qu'il recrutait ses employés en Pologne, assurant par ses propres moyens leur transport en France, et qu'il les rémunérait. L'ensemble de ces éléments, qui ne sont pas sérieusement contestés par M. A..., démontre que ce dernier n'agissait pas en qualité de salarié de la société Belotti mais en qualité d'entreprise sous-traitante, sans qu'aient d'incidence les circonstances, notamment, qu'il aurait œuvré exclusivement pour cette société et qu'il ait été astreint à des contraintes de calendrier ou à des processus de travaux déterminés. Dès lors, contrairement à ce qui est soutenu, l'administration établit que les revenus perçus par M. A... entre les années 2010 et 2012 devaient être imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et non dans celle des traitements et salaires.
En ce qui concerne le montant de l'imposition :
S'agissant de la charge de la preuve :
12. Aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales : " Peuvent être évalués d'office : / 1° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus provenant d'entreprises industrielles, commerciales ou artisanales, ou des revenus d'exploitations agricoles imposables selon un régime de bénéfice réel, lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 53 A du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal ; / (...) / Les dispositions de l'article L. 68 sont applicables dans les cas d'évaluation d'office prévus aux 1° et 2°. ". Aux termes de l'article L. 66 du même livre : " Sont taxés d'office : / 1° à l'impôt sur le revenu, les contribuables qui n'ont pas déposé dans le délai légal la déclaration d'ensemble de leurs revenus (...) sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l'article L. 67 ; (...) ". Aux termes de l'article L. 67 du même livre : " La procédure de taxation d'office prévue aux 1° et 4° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. (...) ". Aux termes de l'article L. 68 du même livre, dans sa rédaction applicable au présent litige : " La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. / Toutefois, il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure : / (...) / 3° Si le contribuable ne s'est pas fait connaître d'un centre de formalités des entreprises ou du greffe du tribunal de commerce (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 193 du même livre : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ".
13. Il est constant, d'une part, que, s'agissant des revenus catégoriels, M. A... n'a pas déposé de déclaration annuelle prévue à l'article 53 A du code général des impôts au titre des exercices 2010 à 2012 et ne s'est pas fait connaître auprès du centre de formalités des entreprises. L'administration a procédé, par suite, en application des dispositions combinées du 1° de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales et du 3° de l'article L. 68 du même livre, à l'évaluation d'office des bénéfices industriels et commerciaux, sans lui adresser une mise en demeure de déposer sa déclaration. D'autre part, s'agissant de l'imposition du revenu global, il résulte de l'instruction que, malgré une mise en demeure adressée à M. A... le 25 février 2015, celui-ci n'a pas déposé de déclaration de revenus au titre des années 2010 à 2012. En application des dispositions combinées des articles L. 66 et L. 67 du même livre, le service l'a taxé d'office à l'impôt sur le revenu au titre de ces années. Par suite, en application de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, la preuve de l'exagération des bases d'imposition retenues par le service incombe à M. A....
S'agissant de la pertinence de la méthode de reconstitution des résultats :
14. M. A... n'a pas été en mesure, au cours des opérations de contrôle, de présenter la comptabilité ainsi que les factures d'achats et de ventes, relatives à son activité. Un procès-verbal d'absence de présentation de comptabilité, contresigné par le requérant, a été dressé le 26 janvier 2015. Pour procéder à la reconstitution du chiffre d'affaires de l'entreprise, le vérificateur a pris en compte les sommes créditées sur ses comptes bancaires, à partir des relevés de ces comptes fournis par la banque Caisse régionale de crédit agricole mutuel (CRCAM) d'Aquitaine, les sommes réglées par la société Belotti et non retracées sur les comptes bancaires français de M. A... et les sommes directement virées par l'Office public de l'habitat de Lot-et-Garonne Habitalys et la société HLM Ciliopée Habitat sur les comptes bancaires détenus par le contribuable en Pologne. Les charges ont, quant à elles, été déterminées par le service en faisant application d'un taux de charges égal à celui retenu dans le cadre du régime des micro-entreprises prévu par l'article 50-0 du code général des impôts, soit 50 % du montant hors taxes du chiffre d'affaires reconstitué.
15. En premier lieu, M. A... soutient que cette méthode de reconstitution est radicalement viciée ou, à tout le moins, excessivement sommaire dès lors que la prise en compte des sommes prétendument réglées par la société Belotti résulte uniquement de l'analyse des éléments comptables, qui ne lui ont jamais été communiqués, effectuée par l'administration au cours de la vérification de comptabilité de cette société. Toutefois, ainsi qu'il a été rappelé au point 8, l'administration a restitué le détail de chaque versement ainsi pris en compte après analyse des comptes " caisse " et " banque " de la société Belotti et a indiqué au contribuable qu'aucune copie de ces documents comptables n'avait été conservée. M. A..., qui n'a fourni au vérificateur aucun élément propre à son entreprise et à qui incombe la charge de la preuve, a ainsi été mis en mesure de discuter, somme par somme, le montant du chiffre d'affaires reconstitué de son entreprise à partir, notamment, des règlements effectués par la société Belotti, au besoin en se rapprochant de cette dernière. Par suite, le requérant n'est pas fondé à critiquer, pour ce motif, la pertinence de la méthode mise en œuvre par le vérificateur.
16. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, il résulte de l'instruction et notamment des pièces annexées à la réponse aux observations du contribuable du 19 novembre 2015 que l'administration n'est pas en possession des relevés des comptes bancaires détenus par M. A... en Pologne mais a constaté, à la réception des documents et certificats de paiement communiqués par l'Office public de l'habitat de Lot-et-Garonne Habitalys et la société HLM Ciliopée Habitat, qui ont été transmis au contribuable, que des règlements de prestations de services réalisées par l'entreprise de M. A... ont été effectués au bénéfice de ce dernier sur des comptes bancaires ouverts à son nom et portant un identifiant international polonais. Par suite, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que, dès lors que les relevés de ses comptes bancaires détenus en Pologne ne lui ont pas été communiqués, la méthode de reconstitution mise en œuvre par le vérificateur est radicalement viciée ou excessivement sommaire.
17. En troisième lieu, les seules déclarations de chiffre d'affaires que M. A... aurait déposées en Pologne au titre des années litigieuses, qui au demeurant ne sont pas versées au dossier, ne constituent pas en elles-mêmes des documents comptables qui peuvent, en outre, être rattachés à l'activité professionnelle du contribuable en France et justifier du montant des résultats. Par suite, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que ces documents constituent des éléments réels d'exploitation dont le vérificateur aurait dû tenir compte lors de la reconstitution du chiffre d'affaires de l'entreprise.
18. En dernier lieu, ainsi qu'il a été rappelé, malgré l'absence de tout justificatif, l'administration a admis, dans un souci de réalisme économique, un montant de charges égal à 50 % hors taxes, égal à celui retenu dans le cadre du régime des micro-entreprises prévu par l'article 50-0 du code général des impôts. Il résulte de l'instruction que l'administration n'a procédé ainsi que parce qu'elle ne disposait d'aucun document comptable ni de factures de dépenses afférentes à l'activité exercée par M. A.... La seule circonstance que l'administration a fait état, au cours de la procédure de contrôle, de la réponse apportée le 13 mars 2015 par l'Office public de l'habitat de Lot-et-Garonne Habitalys indiquant que la société Belotti lui a fourni, dans le cadre d'une opération de construction, un acte de sous-traitance comportant en annexe une note indiquant les moyens en personnel et en matériel de l'entreprise, ne permet pas d'établir que le service aurait pu déterminer le montant des charges de manière plus précise, à partir d'éléments réels d'exploitation, que le requérant ne fournit pas. Par suite, ce dernier, à qui incombe la charge d'établir dans leur principe et dans leur montant les charges qu'il entend déduire de ses résultats imposables, n'est pas fondé à soutenir que la méthode de détermination des charges serait excessivement sommaire.
S'agissant du montant des recettes :
19. M. A... soutient que le vérificateur a, à tort, intégré aux recettes la somme de 8 000 euros inscrite le 8 juin 2012 au crédit de son relevé bancaire d'un compte détenu auprès de la CRCAM d'Aquitaine alors qu'elle correspond à un chèque qui, en définitive, a été rejeté le 18 juin 2012. Toutefois, si cette somme est effectivement portée au débit du même relevé bancaire à cette date avec la mention " IMP CHQ N5808803 ", le requérant ne fournit, d'une part, aucune explication précise quant à l'intitulé de cette mention, d'autre part, alors que la charge de la preuve lui incombe, aucun justificatif de nature à établir qu'il n'aurait pas, en définitive, encaissé, sous une autre forme, la recette de 8 000 euros initialement enregistrée sur son compte bancaire. Par suite, le moyen doit être écarté.
S'agissant de la méthode de reconstitution proposée par le contribuable :
20. En premier lieu, s'agissant des recettes, M. A... se borne à proposer une méthode alternative de reconstitution de recettes consistant à ne prendre en compte que les sommes inscrites au crédit de ses comptes bancaires détenus auprès de la CRCAM d'Aquitaine. Toutefois, ainsi qu'il a été exposé aux points 14 à 16, l'administration a, à juste titre, également tenu compte des sommes réglées par la société Belotti et non retracées sur les comptes bancaires français de M. A... ainsi que les sommes directement virées par l'Office public de l'habitat de Lot-et-Garonne Habitalys et la société HLM Ciliopée Habitat sur les comptes bancaires ouverts par le contribuable en Pologne. Par suite, la méthode de reconstitution des recettes proposée par le contribuable est dénuée de toute pertinence et doit être écartée.
21. En second lieu, M. A... soutient que les sommes retirées en espèces sur ses comptes bancaires français auraient servi à rémunérer ses employés à hauteur de 57 830 euros au titre de l'année 2010, 158 450 euros au titre de l'année 2011 et 243 530 euros au titre de l'année 2012. Il sollicite, par suite, qu'à l'instar d'autres contribuables, les bases d'imposition des années litigieuses soient réduites en fonction de l'application d'un coefficient de 80 % au titre des frais et charges, correspondant aux rémunérations versées, augmentées des autres frais et charges de l'entreprise. Toutefois, le requérant ne produit aucune facture, bulletin de paie ou tout autre justificatif correspondant aux charges déductibles pouvant être rattachées à son activité au titre de la période vérifiée ou permettant d'établir un quelconque lien entre les sommes retirées en espèces sur ses comptes bancaires et de telles charges. Par suite, la prise en compte d'un coefficient de charges correspondant au taux fixé dans le cadre du régime des micro-entreprises pour les entreprises ayant une activité de prestations de services apparaît plus pertinente que la méthode alternative de détermination des charges proposée par M. A..., qui n'est assortie d'aucun élément probant.
S'agissant de la double imposition :
22. M. A... soutient que l'imposition en France de ses bénéfices méconnaît les stipulations de la convention du 20 juin 1975 entre le Gouvernement de la République Française et le Gouvernement de la République de Pologne tendant à éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune. Toutefois, en se bornant à affirmer qu'il aurait déposé des déclarations de chiffre d'affaires en Pologne, sans produire ces déclarations ni établir que ces dernières ont réellement été souscrites et payées en Pologne, il n'établit pas qu'il se trouverait dans une situation de double imposition. Par suite, le moyen doit être écarté.
Sur le bien-fondé des majorations :
23. Aux termes de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales : " La juridiction saisie peut, lorsqu'une erreur non substantielle a été commise dans la procédure d'imposition, prononcer, sur ce seul motif, la décharge des majorations et amendes, à l'exclusion des droits dus en principal et des intérêts de retard. / Elle prononce la décharge de l'ensemble lorsque l'erreur a eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense ou lorsqu'elle est de celles pour lesquelles la nullité est expressément prévue par la loi ou par les engagements internationaux conclus par la France. ". Il résulte de ce qui a été exposé ci-avant que la procédure d'imposition n'est entachée d'aucune erreur, au sens de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales. Par suite, M. A... n'est pas fondé à demander, à titre subsidiaire, sur le fondement de ces dispositions, la décharge des majorations qui lui ont été appliquées.
24. Il résulte de tout ce qui précède M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées par voie de conséquence.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 5 décembre 2023 à laquelle siégeaient :
M. Luc Derepas, président de la cour,
Mme Evelyne Balzamo, présidente de chambre,
M. Michaël Kauffmann, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 décembre 2023.
Le rapporteur,
Michaël Kauffmann Le président,
Luc Derepas
Le greffier,
Christophe Pelletier
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 21BX03486
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