Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 25 mars 2021 par laquelle le directeur général des Hospices Civils de Lyon (HCL) a prononcé à son encontre la sanction de révocation à titre disciplinaire, ensemble la décision du 9 juin 2021 portant rejet de son recours gracieux présenté le 25 mai 2021.
Par un jugement n° 2109690 du 8 décembre 2022, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision portant révocation de M. A..., ainsi que la décision portant rejet de son recours gracieux, et a rejeté les conclusions des parties présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 23 décembre 2022 et un mémoire en réplique enregistré le 28 novembre 2023, les Hospices Civils de Lyon, représentés par la SELARL Carnot Avocats, agissant par Me Prouvez, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 8 décembre 2022 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Lyon ;
3°) de mettre à la charge de M. B... A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la sanction de révocation, prise après avis favorable du conseil de discipline, repose sur des faits dont la matérialité est établie ;
- cette sanction est proportionnée à la gravité des fautes commises par l'intéressé, qui avait déjà fait l'objet le 11 mars 2005 d'une sanction d'exclusion temporaire de quinze jours, dont douze jours avec sursis, puis le 11 mars 2019 d'une nouvelle sanction d'exclusion temporaire de quinze jours, dont huit jours avec sursis, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges.
Par un mémoire enregistré le 23 novembre 2023, M. A..., représenté par Me Bouillet, conclut au rejet de la requête et à ce que le paiement d'une somme de 1 500 euros à son avocat soit mis à la charge des Hospices Civils de Lyon, sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 décembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Joël Arnould, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;
- les observations de Me Rey, représentant les Hospices Civils de Lyon, et celles de Me Bouillet, avocat de M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A... a été employé par les Hospices Civils de Lyon (HCL) à compter de l'année 1997, d'abord en qualité d'agent contractuel, puis en qualité de fonctionnaire. Titularisé en 2004 dans le corps des agents d'entretien, il a ultérieurement intégré celui du personnel ouvrier, dans lequel il a été titularisé en 2007. Ayant atteint le grade d'ouvrier principal de deuxième classe, il était affecté depuis le 1er avril 2008 à la pharmacie centrale des HCL. Par une décision du 25 mars 2021, le directeur général des Hospices Civils de Lyon a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire de la révocation. Les Hospices Civils relèvent appel du jugement du 8 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé cette décision ainsi que la décision du 9 juin 2021 portant rejet du recours gracieux formé par l'intéressé le 25 mai 2021.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 visée ci-dessus portant droits et obligations des fonctionnaires, alors applicable : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ". Aux termes de l'article 81 de la loi du 9 janvier 1986 visée ci-dessus portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, alors applicable : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Premier groupe : L'avertissement, le blâme, l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours / Deuxième groupe : La radiation du tableau d'avancement, l'abaissement d'échelon à l'échelon immédiatement inférieur à celui détenu par l'agent, l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatre à quinze jours / Troisième groupe : La rétrogradation au grade immédiatement inférieur et à l'échelon correspondant à un indice égal ou, à défaut, immédiatement inférieur à celui afférent à l'échelon détenu par l'agent, l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans / Quatrième groupe : La mise à la retraite d'office, la révocation / (...) ".
3. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire sont établis, s'ils constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
4. En l'espèce, la sanction de révocation de M. A... prononcée le 25 mars 2021 par le directeur général des HCL repose sur les circonstances que le 8 avril 2020, l'agent a harcelé ses supérieurs hiérarchiques au téléphone, en proférant des menaces, que le 1er septembre 2020, il a contesté les ordres du chef d'équipe et a eu une attitude de nouveau menaçante, avant de quitter son poste en se déclarant gréviste, que le 23 septembre 2020, alors qu'il était en état d'ébriété, il s'est montré insistant auprès d'une collègue féminine, ne portait pas de masque, puis a quitté son poste de travail en se déclarant gréviste, et enfin, que de janvier 2019 à septembre 2020, il a fait preuve d'un absentéisme récurrent et d'un manque de ponctualité, se traduisant par onze jours d'absence irrégulière et trente-quatre retards de plus de dix minutes.
5. Il incombe à l'autorité investie du pouvoir disciplinaire d'établir les faits sur le fondement desquels elle inflige une sanction à un agent public.
6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, en particulier du rapport de saisine du conseil de discipline joint en première instance, et des messages électroniques échangés le 8 avril 2020 entre les supérieurs hiérarchiques de M. A... et de l'entretien s'étant tenu le 23 octobre 2020 entre ce dernier, la directrice de la direction transversale " pharmacie stérilisation " et l'un de ses encadrants, que celui-ci a contacté ses supérieurs le 8 avril à neuf reprises par téléphone pour avertir de son absence, expliquant avec une grande confusion qu'il souhaitait se déclarer gréviste, alors même qu'il convenait qu'aucune grève n'avait lieu, et qu'il ne pouvait contacter son médecin traitant, et a finalement proféré des menaces envers l'un de ses supérieurs.
7. En deuxième lieu, il ressort d'un message électronique de l'agent de maîtrise magasin du 1er septembre 2020, que M. A..., sous l'empire de l'alcool et mécontent de la commande dont l'exécution lui avait été assignée, a réclamé qu'elle lui soit retirée, a proféré des menaces à l'adresse de l'agent de maîtrise puis s'est déclaré en grève pour la journée. Le requérant, qui s'est borné à faire valoir au cours de la procédure disciplinaire le caractère injuste de la répartition des taches à la pharmacie centrale, ne conteste pas utilement avoir adopté l'attitude irrespectueuse et menaçante qui lui est reprochée.
8. En troisième lieu, par un message adressé le 23 septembre 2020 à la directrice de la direction transversale de la pharmacie centrale et stérilisation, une cadre de cette direction a signalé qu'une agente de nettoyage lui avait rapporté que M. A..., sous l'empire de l'alcool, lui avait tenu des propos insistants, et ne portait pas de masque. Il ressort en outre du message électronique envoyé ce même jour par l'un de ses supérieurs que celui-ci a fourni deux masques de types différents à M. A..., qui les a refusés et a quitté son poste en se déclarant en grève.
9. Enfin, en dernier lieu, il ressort des déclarations de M. A... au cours de son entretien avec la directrice de la direction transversale de la pharmacie centrale et désinfection le 23 octobre 2020, que celui-ci n'a pas nié avoir accusé des retards de plus de dix minutes à trente-quatre reprises depuis janvier 2019, se bornant à souligner qu'il s'agissait de retards de moins d'un quart d'heure. Par ailleurs, il ressort du relevé des absences de M. A..., annexé au rapport de saisine du conseil de discipline, que celui-ci, outre de très nombreuses absences pour maladie et pour grève entre janvier 2019 et septembre 2020, a été noté absent sans autorisation préalable ni autre motif, le 11 janvier 2019, le 18 mars 2019, du 8 au 14 avril 2019 et le 19 décembre 2019. Le requérant ne produit aucun élément justifiant de ce qu'il aurait été ces jours-là en arrêt pour maladie, ou se serait régulièrement déclaré en grève.
10. Ainsi que les premiers juges l'ont estimé et contrairement à ce que M. A... soutient de nouveau en appel, il résulte des points précédents que les faits retenus à son encontre, dont la matérialité a d'ailleurs été reconnue par le conseil de discipline dans sa séance du 11 mars 2021, sont dès lors établis.
11. Ces faits constituent un manquement aux obligations de dignité, d'intégrité et d'obéissance hiérarchique. Ils ont ainsi un caractère fautif et sont de nature à justifier une sanction disciplinaire. M. A..., s'il justifie souffrir d'un état dépressif, ne produit aucune pièce établissant que son discernement aurait été aboli ou altéré par sa maladie, ou qu'il existerait un lien entre son état de santé et le comportement qui lui est reproché. Il ne justifie pas davantage d'une allergie ou toute autre circonstance l'ayant empêché de porter un masque dans le cadre des mesures visant à limiter la contamination par la Covid-19. Enfin, M. A..., qui avait fait l'objet d'une sanction d'exclusion temporaire de fonctions de quinze jours dont douze avec sursis en 2005 pour le vol d'un clé USB, son utilisation à des fins personnelles et la détérioration des fichiers qu'elle contenait, a en outre fait l'objet en 2019 d'une nouvelle sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de quinze jours, dont huit jours avec sursis pour des menaces et insultes adressées à un chef d'équipe lors d'appels téléphoniques, des propos irrespectueux et sexistes concernant une pharmacienne et un manque de ponctualité et d'assiduité, soit pour des faits similaires à ceux qui ont été retenus par la décision en litige du 25 mars 2021. Eu égard à la répétition des fautes, dans un contexte où ce comportement a perturbé gravement le fonctionnement du service public de santé auquel M. A... est affecté, en période de crise sanitaire, la sanction de la révocation contestée ne présente pas un caractère disproportionné. C'est dès lors à tort que, pour annuler les décisions attaquées, le tribunal administratif de Lyon a retenu comme fondé le moyen tiré du caractère disproportionné de la sanction disciplinaire litigieuse.
12. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les Hospices Civils de Lyon sont fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé les décisions des 25 mars et 9 juin 2021.
Sur les frais liés au litige :
13. Les dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la cour mette à la charge des Hospices Civils de Lyon, qui ne sont pas la partie perdante, le versement d'une somme à l'avocat de M. A... au titre des frais exposés dans la présente instance. Il n'y a en revanche pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier le paiement de la somme réclamée par les Hospices Civils de Lyon au titre des frais exposés pour l'instance, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 8 décembre 2022 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Lyon est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié aux Hospices Civils de Lyon et à M. B... A....
Délibéré après l'audience du 12 décembre 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Emilie Felmy, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
M. Joël Arnould, premier conseiller,
Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 janvier 2024.
Le rapporteur,
Joël ArnouldLa présidente,
Emilie Felmy
La greffière,
Sandra Bertrand
La République mande et ordonne à la préfète du Rhône en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 22LY03758