Vu 1°/, sous le n° 89BX00839 la décision en date du 16 janvier 1989, enregistrée au greffe de la cour le 3 mars 1989, par laquelle le président de la 2ème sous-section de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée le 25 mars 1985 pour la SOCIETE NATIONALE DE CONSTRUCTION QUILLERY ;
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 mars 1985 et 10 juillet 1985 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société anonyme "SOCIETE NATIONALE DE CONSTRUCTION QUILLERY" dont le siège social est ..., représentée par son président-directeur général et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 23 janvier 1985 par lequel le tribunal administratif de Poitiers, a, avant dire droit sur la demande de la Ville de Niort tendant à voir déclarer la société requérante et M. X..., architecte, responsable des désordres affectant les bâtiments du lycée d'enseignement professionnel "Carrosserie", ordonné une expertise ;
2°) constate l'irrecevabilité de la requête de la Ville de Niort au regard de l'expiration du délai de garantie décennale ;
Vu 2°/, sous le n° 89BX00838 la décision en date du 7 février 1989, enregistrée au greffe de la cour le 3 mars 1989, par laquelle le président de la 2ème sous-section de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée le 2 septembre 1987 pour la SOCIETE NATIONALE DE CONSTRUCTION QUILLERY ;
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 septembre 1987 et 18 décembre 1987 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE NATIONALE DE CONSTRUCTION QUILLERY dont le siège social est ..., représentée par son représentant légal et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 1er juillet 1987 par lequel le tribunal administratif de Poitiers, d'une part, l'a condamnée à verser à la Ville de Niort (Deux-Sèvres) la somme de 114.066,20 F en réparation des désordres affectant le lycée d'enseignement professionnel "Carrosserie" de Niort et, d'autre part, a mis à sa charge les frais d'expertise du litige à concurrence de la somme de 2.630,84 F ;
2°) à titre subsidiaire, réforme ledit jugement en réduisant le quantum de sa condamnation, compte-tenu des travaux de reprise antérieurement réalisés par elle et également, d'un abattement pour vétusté qui ne saurait être inférieur à 50 % du coût des travaux de remise en état des huisseries et des terrasses ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu les articles 1792 et 2270 du code civil ;
Vu le code des communes ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de
l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mars 1991 :
- le rapport de M. PIOT, conseiller ;
- et les conclusions de M. CIPRIANI, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les deux requêtes susvisées de la SOCIETE NATIONALE DE CONSTRUCTION QUILLERY sont relatives au même litige ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur la régularité de la représentation de la Ville de Niort devant la cour :
Considérant qu'aux termes de l'article L 316-1 du code des communes, dans la rédaction que lui a donné la loi n° 85-97 du 25 janvier 1985 : "sous réserve des dispositions du 16° de l'article L.122-20 le conseil municipal délibère sur les actions à intenter au nom de la commune", qu'aux termes de l'article L.122-20 du même code, dans sa rédaction issue de la loi précitée du 25 janvier 1985 : "le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout en partie, et pour la durée de son mandat : ... 1°) d'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil municipal" ; qu'il résulte de ces dispositions que le conseil municipal peut légalement donner au maire une délégation pour ester en justice au nom de la commune pendant la durée de son mandat dans les cas définis par lui ;
Considérant qu'il n'est pas justifié, à l'appui du mémoire en défense et d'appel incident produit par la Ville de Niort et tendant à la condamnation de la SOCIETE NATIONALE DE CONSTRUCTION QUILLERY à lui verser une indemnité de 1.144.314,90 F avec intérêts de droit à compter du 20 juillet 1984 avec capitalisation des intérêts à la date dudit mémoire, d'aucune délibération du conseil municipal de cette commune habilitant son maire à présenter de telles conclusions ; qu'ainsi les conclusions dont s'agit ne sont pas recevables ;
Sur la recevabilité de l'action en garantie décennale intentée par la Ville de Niort devant le tribunal administratif de Poitiers à l'encontre de la SOCIETE NATIONALE DE CONSTRUCTION QUILLERY :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société requérante a, à la demande de la Ville de Niort, exécuté en septembre 1978, novembre 1979 et juin 1982 divers travaux de reprise au niveau des huisseries et des terrasses à la suite d'infiltrations survenues aux mêmes endroits que ceux qui ont donné lieu au litige ; que, dans les circonstances de l'espèce, l'exécution et la prise en charge financière de ces travaux par l'entreprise QUILLERY ainsi que les correspondances échangées ont constitué, de la part de ladite entreprise, une reconnaissance de responsabilité qui a eu pour effet d'interrompre, vis à vis de la seule entreprise et non de l'architecte le cours du délai décennal ; que dès lors, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'action que, à raison des mêmes désordres, la Ville de Niort a, le 20 juillet 1984, introduite devant le tribunal administratif de Poitiers sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil, a été formée, en tant qu'elle tendait à sa condamnation, après l'expiration du délai décennal, devait pour ce motif être rejetée ;
Sur la responsabilité de l'entreprise QUILLERY :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert commis par les premiers juges que la cause des désordres constatés dans les huisseries et les terrasses se traduisant par des infiltrations qui, si elles n'interdisent pas l'utilisation des ouvrages, ne permettent plus d'en assurer le clos et le couvert, ne tient ni à la conception ni à l'entretien défectueux des ouvrages mais à l'emploi de matériaux non conformes aux règles de l'art et à des défauts dans l'exécution et la surveillance des travaux concernant les huisseries ; qu'ils procèdent donc de fautes d'exécution imputables à l'entreprise SOCIETE NATIONALE DE CONSTRUCTION QUILLERY et de fautes de surveillance imputables à l'architecte ; que ces dégradations non apparentes lors de la prise de possession des ouvrages ont rendu ceux-ci impropres à leur destination que, par suite, et alors même que le montant des réparations ne représente qu'une faible part du coût d'ensemble des travaux, elles étaient de nature à donner lieu à la garantie qu'impliquent les principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ; que dès lors que le dommage est, fût-ce partiellement imputable à la SOCIETE NATIONALE DE CONSTRUCTION QUILLERY, celle-ci saurait utilement invoquer, comme il a été dit ci-dessus, pour atténuer sa responsabilité envers le maître de l'ouvrage, le défaut de surveillance des travaux imputable à l'architecte ;
Sur le montant de l'indemnité :
Considérant que la Ville de Niort a droit à être indemnisée des travaux nécessaires pour remédier auxdits désordres dont il n'est pas démontré que les travaux de reprise déjà effectués aient été suffisants pour les supprimer ; que de tels travaux ne sont pas de nature à conférer aux bâtiments une plus-value ; qu'enfin, eu égard à la date d'apparition des premiers désordres, il n'y a pas lieu d'appliquer, en l'espèce, un abattement pour vétusté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE NATIONALE DE CONSTRUCTION QUILLERY n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement en date du 1er juillet 1987, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Poitiers l'a condamnée à payer à la Ville de Niort la somme de 114.066,20 F ;
Article 1ER : les requêtes de la SOCIETE NATIONALE DE CONSTRUCTION QUILLERY et les conclusions d'appel incident de la Ville de Niort sont rejetées.